© Hatim Kaghat

Centre d’étude de la vie magnétique: les petits mensonges et les fausses promesses de Paul Magnette

Nicolas De Decker Journaliste au Vif
Benjamin Hermann Journaliste au Vif

Encyclopédie des revirements, des erreurs factuelles et des fautes logiques de Paul Magnette et, par conséquent, de sa formation politique.

Leur parcours à tous est lesté de plusieurs années de déclarations de campagne, de petits et de gros mensonges, de fausses promesses et d’erreurs factuelles que la vérité des faits, ou la logique, ou la morale, ou les trois, contredisent, sans que jamais ils n’aient dû s’en justifier. Bien sûr, il y a parmi eux des spécialistes, qui s’adonnent au bluff politique plus souvent que les autres, mais chacun s’en est déjà rendu coupable. C’est précisément pourquoi Le Vif a décidé de répertorier ces petits et gros mensonges dans un dictionnaire très didactique des pseudo-vérités politiques en Belgique francophone. Pour ne flinguer personne, chacun aura le droit de s’expliquer sur ses mensonges, ses contre-vérités et ses fausses promesses passés. Et nos différents dictionnaires seront alimentés, jusqu’au 9 juin. Après le MR (Observatoire du gloubisme), place au PS, avec le Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag).

Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag)

Sur la pension à 65 ans

Le retour de la pension à 65 ans comme condition pour monter dans un gouvernement fédéral? «Ça, c’est du pur bon sens. Justin Trudeau l’a fait au Canada», disait Paul Magnette au Soir, le 21 octobre 2017. Le PS avait été renvoyé dans l’opposition par le gouvernement Michel, qui s’empressa de hausser à 67 ans l’âge légal de la pension, ce que ni le MR, ni la N-VA, ni le CD&V, ni l’Open VLD n’avaient à leur programme, soit dit en passant. Ce n’était pas très populaire comme décision, et donc, s’ils revenaient au pouvoir, les socialistes devaient «poser des exigences non négociables» comme celle-ci. Mais à la seconde où ils revinrent au pouvoir, les socialistes abandonnèrent cette exigence finalement très négociable du retour de la pension à 65 ans. «La pension à 65 ans, c’était un mauvais combat de campagne électorale», expliqua Paul Magnette, toujours au Soir, en octobre 2020, juste après l’installation du gouvernement De Croo, avec l’air de celui qui «à titre individuel, ne l’avait jamais défendu», et c’était faux. Mais peut-être qu’il avait oublié sa précédente interview de pur bon sens au Soir, en 2017. Et sans doute l’a-t-il toujours oubliée parce que quand on la lui a rappelée, il a froncé les sourcils et il a pris un air sérieux, mais il n’a pas eu l’air de s’en souvenir. «Evidemment, s’il y a une majorité possible pour revenir sur les 67 ans, on le fera. Mais comme condition, non, je n’ai jamais dit ça, j’ai toujours pensé que les vraies questions, c’étaient la durée de la carrière et l’âge de départ effectif», maintient, contre toute évidence, le parrain du Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag).

Sur la régionalisation de l’enseignement et de la culture

On dit que la fonction fait l’homme, et les recherches du Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag) tendent à confirmer là la sagesse populaire. En juin 2016 en effet, le ministre-président wallon en fonction, Paul Magnette, revendiquait élégamment la régionalisation de la Culture et de l’Enseignement, compétences de la Communauté française/Fédération Wallonie-Bruxelles, sans lesquelles «la Wallonie est eunuque». Pour cela, une septième réforme de l’Etat était nécessaire, et il la souhaitait.

Et en juin 2022, le président du Parti socialiste en fonction, Paul Magnette, réunissait les socialistes wallons en congrès, et leur faisait revendiquer, beaucoup moins masculinement, le maintien de la Culture et de l’Enseignement dans le giron communautaire/de la Fédération Wallonie-Bruxelles. «Dans mon esprit, même s’il y a quatre Régions, la Wallonie et Bruxelles reforment ensemble une Fédération et gèrent en commun l’enseignement, l’enseignement supérieur, la culture…», affirmait alors Paul Magnette. Pour cela, il ne fallait surtout pas passer par une septième réforme de l’Etat, que les socialistes et leur président estimaient «ni souhaitable ni nécessaire».

«Je pense toujours que c’est très compliqué pour les Régions de ne pas avoir prise sur tout ce qui représente la formation et les mentalités. Mais c’est un équilibre à trouver, et il est honnêtement très compliqué de régionaliser ces compétences à Bruxelles…» répond, en mars 2024, l’homme que plusieurs fonctions, mais pas encore celle d’éponyme du Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag), auront fait.

Sur l’allocation universelle

«C’est le sens de l’histoire», disait Paul Magnette en 2016, de l’allocation universelle, garantie de revenu sans condition d’emploi. Mais les grosses têtes du Centre d’études magnétique (Cevimag) ont dû constater un léger trouble de l’orientation chez leur sujet, qui se faisait contredire par son parti, qu’à l’époque il ne présidait pas. Et qui, une fois président, faisait expliquer à nos confrères de la DH, en 2022, que le PS n’était pas du tout convaincu par cette idée, contradictoire avec celle, inscrite au programme socialiste, d’une garantie d’emploi associé à un revenu pour tous les citoyens. Sur ce chemin tortueux de l’histoire toutefois, le PS présidé par Paul Magnette a marqué un récent virage, intégrant à son programme pour les élections 2024 une allocation universelle mais ciblée, sous la forme d’un revenu de base de 1.000 euros, cumulables avec un salaire, pour les jeunes de 18 à 25 ans. «C’est vrai, j’aurais dû être plus précis en 2016, c’était un peu une déclaration à l’emporte-pièce», reconnait aujourd’hui Paul Magnette, qui se garde, dit-il, un cap vers l’universel. «La conditionnalité de la sécurité sociale pose des problèmes, parce que ça la rend moins universelle: il y a trop de gens qui en sont exclus. Nous poursuivons l’universalisation de la sécurité sociale. C’est ça, le sens de l’histoire», précise-t-il, jusqu’au prochain virage que devra rattraper la patrouille du Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag).

Sur les communistes au pouvoir

En sciences politiques, le professeur Paul Magnette (fondateur du Centre d’étude de la vie politique-Cevipol) se spécialise dans l’histoire des idées. Dans la vie politique, le ministre-président Paul Magnette (inspirateur du Centre d’étude de la vie magnétique-Cevimag) se faisait une idée spéciale de l’histoire quand, dans une interview à Sudpresse (l’ancêtre de Sudinfo) en 2015, il défiait son interlocuteur de lui citer «un exemple où s’allier aux communistes avait été un succès». C’était en 2015 et Paul Magnette, aujourd’hui vice-président de l’Internationale socialiste, ne pouvait pas encore évoquer, comme il le fait depuis avec une infatigable régularité, l’exemple des gouvernements espagnols dirigés par son ami Pedro Sanchez, aujourd’hui président de l’Internationale socialiste, allié depuis 2020 à des communistes (associés à Podemos, puis dans Sumar, deux plateformes de la gauche de la gauche hispanique). Mais le francophile ne pouvait pas ignorer à l’époque les fondatrices expériences françaises du Front populaire de 1936, puis du Conseil national de la Résistance, puis du Programme commun, et l’italophone ne pouvait pas snober les réalisations du PCI de Togliatti et Berlinguer, et le parfait bilingue ne pouvait pas zapper les succès des gouvernements socialistes-libéraux-communistes belges de l’après-guerre. «Ce sont des exemples extrêmement anciens. Il y a ces exemples historiques très anciens. Mais sinon, voilà…». Oui, voilà: l’histoire appliquée des idées est une discipline encore à perfectionner, au Centre d’études de la vie magnétique.

Sur la fermeture du nucléaire

«La question ne se pose même pas. Elle est pliée. Le dossier est clôturé», disait Paul Magnette au Soir, le 12 novembre 2021, et il parlait de la fermeture des sept réacteurs nucléaires de Belgique, avec une assertivité qui, rétrospectivement, aura surpris tout le monde, et surtout les archivistes du Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag). Le gouvernement De Croo a en effet, quelques mois plus tard, choisi de prolonger les réacteurs de Doel 4 et Tihange 3. C’était après l’invasion russe en Ukraine, qui a fait exploser pendant quelques mois les coûts énergétiques, c’est vrai. «Mais à ce moment-là le dossier était vraiment clos. On avait dit dans l’accord de gouvernement qu’il y avait deux pistes, et à ce moment-là on pouvait suivre le plan A sans problème. Après, ça arrive qu’on rouvre un dossier, et la guerre en Ukraine est un game changer», avoue aujourd’hui Paul Magnette. Le game changer vraiment changé le game puisque le programme 2024 du Parti socialiste est beaucoup plus prudent que son prédécesseur de 2019, qui proclamait, comme celui de tous les autres partis, qu’il fallait se tenir au calendrier de sortie en 2025. Les socialistes veulent maintenant «envisager l’extension des centrales nucléaires qui ont été prolongées à la suite de la guerre en Ukraine, si le besoin en sécurité d’approvisionnement en électricité est confirmé». Car «pour le PS, le nucléaire est une énergie de transition qui permet de répondre à la demande en énergie dans le cadre de l’électrification massive de la société», lit-on dans le profession de foi socialiste pour le 9 juin.

Sur le froid glacial à Gaza

Le jeudi 9 novembre, en débat à la RTBF face à un Georges-Louis Bouchez très proche, comme son parti, des positions israéliennes, Paul Magnette veut appuyer l’inclination historiquement propalestinienne de son parti, et il s’aide d’une tournure de phrase remarquable. Paul Magnette réclame un cessez-le-feu immédiat et une entrée massive d’aide humanitaire à Gaza. Les Gazaouites, expulsés de chez eux par la riposte israélienne aux attaques terroristes du 7 novembre, sont menacés de mort brutale par les bombes et exposés à une mort lente par le blocus. C’est là que Paul Magnette ajoute à leur malheur immense une pesanteur aussi supplémentaire que controuvée. Ils sont livrés à eux-mêmes «dans un froid glacial», dit-il. Il le répétera très souvent ensuite, dans plusieurs interventions, au fil d’un hiver alourdi par le spectacle des privations dont souffre la population palestinienne. Mais le jeudi 9 novembre, les Gazaouites qui tremblent de peur et de colère n’ont pas encore le déplaisir de grelotter sous ce «froid glacial». Il fait alors 18 degrés, et il n’a pas fallu longtemps aux experts du Centre d’étude de la vie magnétique (Cevimag) pour s’en apercevoir (Google suffisait). Interrogé sur la précocité fictionnelle de cet hiver proche-oriental, Paul Magnette ne nie pas le bluff, enfin, la formule rhétorique. «C’est ça, c’était une formule rhétorique, pas la météo», dit-il pour justifier cette opportune exonération de clause de vérité.

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