Viktor Orban
Viktor Orban © GETTY IMAGES

La vie après le coronavirus: vers un renforcement du nationalisme?

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

La pandémie a conforté la proximité, a nourri une réflexion sur la relocalisation. Mais elle a aussi conduit à la fermeture des frontières, à l’égoïsme national, à l’adoption de mesures sécuritaires. Un terreau fertile pour l’extrémisme.

La crise sanitaire a révélé les limites du capitalisme mondialisé, a mis en évidence notre dépendance pour toute une série de produits. Des voix plaident pour la  » relocalisation  » et le  » patriotisme économique « . Au nom du principe de précaution, certains de ceux qui célébraient naguère les valeurs universalistes vantent désormais les vertus du protectionnisme. La propagation du virus a conduit à la fermeture des frontières, au renforcement de l’Etat (pouvoirs spéciaux…), à l’adoption de mesures sécuritaires, autant de thèmes chers à l’extrême droite et aux leaders populistes. L’angoisse née du Covid-19 et de la dégradation brutale de l’économie va-t-elle favoriser la montée du nationalisme, déjà très présent en Europe ? L’avis d’Eric Maurice, responsable du bureau de Bruxelles de la fondation Robert Schuman.

Le déficit de solidarité et de coordination en Europe pendant la crise sanitaire favorise-t-il le nationalisme identitaire ?

Face à l’ampleur du choc du coronavirus, le cadre national s’est imposé à nos gouvernants et à la population comme le plus adéquat. Fermer les frontières, limites profondément ancrées dans nos mentalités, est apparu comme la mesure évidente à prendre contre la contagion, même si l’Organisation mondiale de la santé n’était pas de cet avis. Pourtant, on voit bien aujourd’hui qu’il aurait fallu utiliser des outils plus fins, puisque la situation sanitaire varie fortement non seulement d’un Etat européen à l’autre, mais aussi d’une région à l’autre d’un même pays.

La désunion et le repli sur soi gouvernent-ils aujourd’hui l’Europe ?

L’Union n’est que la somme des volontés politiques de ses membres, soumis à des défis sanitaires et économiques d’intensités diverses. Des pays sont plus touchés par le coronavirus que d’autres, et ce sont souvent les plus fragiles éco- nomiquement. Déjà très réticentes à l’idée d’augmenter leur contribution au budget européen, les nations les plus solides sont aussi les plus sollicitées pour venir en aide aux plus démunies. La crise renforce l’opposition entre ces deux Europe, alors que la priorité, si l’on veut sauver le projet européen, est d’apaiser ces divisions.

La crise sanitaire et économique fait-elle le jeu de l’extrême droite et des populistes ?

L’autocrate hongrois Viktor Orban l’utilise pour se doter des pleins pouvoirs sans limitation de temps et pour affaiblir l’opposition. En Pologne, les conservateurs nationalistes au pouvoir ont voulu imposer une élection présidentielle par correspondance sans qu’il y ait eu une vraie campagne ouverte et équilibrée. De son côté, l’extrême droite européenne instrumentalise la crise sanitaire dans son combat contre l’immigration. Un constat : quand les partis populistes assument des responsabilités, il ne font pas mieux que les autres. En Italie, les régions les plus touchées par la pandémie, la Lombardie et la Vénétie, sont toutes deux dirigées par la Ligue. Or, le gouverneur de Lombardie a fait le même genre d’erreurs que celles commises ailleurs en Europe.

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