A 72 ans, Elio Di Rupo (PS) pourrait bien briguer un mandat européen en 2024

Toujours plus vieux, les politiques ? « Ils doivent être mentalement et physiquement aptes à exercer » (infographie)

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

Alors que la classe politique européenne rajeunit de plus en plus, les carrières des dirigeants, elles, s’allongent. L’élastique se tend, et casse par moments, alors que les départs de la vie politique pour cause de santé s’accumulent. Analyse avec Caroline Sägesser, chercheuse au Centre de recherche et d’information socio-politiques (CRISP).  

Toujours plus vieux, les politiques ? A 70 ans, Guy Verhofstadt a annoncé qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat lors des élections législatives de 2024, à moins que des listes transnationales ne soient organisées à l’échelle européenne. Celui qui a été Premier ministre belge entre 1999 et 2008 prend donc sa retraite. « Je trouve sa décision pleine de sagesse », commente Caroline Sägesser, chercheuse au Centre de recherche et d’information socio-politiques (CRISP).

Si la politologue salue la décision prise par Guy Verhofstadt, elle confirme qu’elle est plus l’exception que la règle. Surtout en Belgique, où le ministre-président wallon Elio Di Rupo (PS) donne l’impression d’avoir toujours fait partie du paysage politique. Alors qu’il soufflera ses 72 bougies cet été, le Montois, de la même génération que son collègue flamand, pourrait bien se présenter sur une liste européenne l’an prochain. « Ça peut paraitre paradoxal pour l’ancien président d’un parti qui a milité pour limiter l’âge de la pension à 65 ans, glisse Caroline Sägesser. Cela revient à dire faites ce que je dis, mais pas ce que je fais… ».

En Belgique, pas si vieux les politiques

Au-delà de ces deux cas concrets, Le Vif s’est demandé si nos politiques enchainaient les mandats au point de quitter la politique avec davantage de cheveux blancs que leurs prédécesseurs. De ce point de vue-là, le gouvernement De Croo incarne une certaine forme de renouveau. La chercheuse au CRISP rappelle que l’attelage est le plus jeune et le plus féminin de l’histoire belge. Nous avons fait le calcul : si la Vivaldi n’était qu’une seule et même personne, elle aurait 47 ans (voir infographie). Les gouvernements wallon et bruxellois seraient eux composés d’un.e ministre âgé de 51 ans. Au gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, la moyenne d’âge est de 50 ans.

(suite de l’article après l’infographie)

Globalement, selon Caroline Sägesser, on assiste à un rajeunissement des dirigeants européens, à l’image des Alexander De Croo, Emmanuel Macron et autres Xavier Bettel (le Premier ministre du Luxembourg, ndlr). « Dans ce débat, il faut distinguer l’exécutif du législatif. C’est normal de retrouver des personnes plus âgées au parlement, censé représenter le corps social dans sa diversité ». Mais pour la chercheuse, gouverner demande plus d’aptitudes physiques et mentales que n’en ont parfois les personnes âgées. « Les dirigeants ne dorment pas beaucoup. Les décisions se prennent après des marathons-débats qui durent toute une nuit. En trois ans, on voit qu’Alexander De Croo a vieilli. Assurer une fonction exécutive requiert d’être en bonne santé, d’autant que trouver un consensus entre les 7 partis de la Vivaldi n’est pas chose aisée ». Les départs de ce gouvernement se sont d’ailleurs enchainés ces derniers mois (Sophie Wilmès pour aider son mari à combattre un cancer du cerveau, Meryam Kitir avait fait une pause pour préserver sa santé mentale).

Un âge maximum pour exercer en politique ?

Historiquement, un âge minimum pour pouvoir faire de la politique a été instauré par moments et par endroits. Caroline Sägesser rappelle qu’avant 1993, il fallait avoir au moins 40 ans pour être sénateur en Belgique. « La volonté était de laisser la place aux sages aux cheveux blancs expérimentés, qui avaient déjà fait leur preuve ». La mesure a depuis été effacée des textes légaux belges mais existe encore à certains endroits du globe. Aux Etats-Unis par exemple, il faut être âgé d’au moins 35 ans pour se présenter aux élections présidentielles. Un seuil largement dépassé par Donald Trump (76 ans) et Joe Biden (80 ans), les deux derniers présidents américains en date. La tendance au vieillissement des politiques irriterait à ce point les citoyens outre-Atlantique qu’ils seraient une majorité à vouloir instaurer un âge maximum pour exercer.

C’est complètement différent de politiques aux cheveux blancs qui sont assis dans une assemblée depuis 30 ans

Caroline Sägesser, chercheuse au CRISP

La chercheuse du CRISP comprend qu’une telle mesure soit envisagée: « Les dirigeants doivent être mentalement et physiquement aptes à exercer ». Tout en apportant une nuance : « Un parlement composé pour une part de personnes âgées qui exercent un mandat en marge de leur métier, c’est positif. Mais c’est complètement différent de politiques aux cheveux blancs qui sont assis dans une assemblée depuis 30 ans ». Caroline Sägesser déplore que la politique soit devenue un métier, où les carrières bardées de mandats sont de plus en plus longues. « Un parlement avec une part de retraités, c’est intéressant. Un parlement majoritairement peuplé de personnes âgées qui vont prendre leur retraite l’est moins ».

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