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«Fier d’être libéral»? Pourquoi le MR est le parti qui aggrave le plus le déficit de la Belgique (infographie)

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

À un mois des élections fédérales, le Bureau Fédéral du Plan a chiffré 300 mesures qui se trouvent dans les programmes des partis. Côté francophone, à situation économique inchangée, c’est la copie du MR qui aggravera le plus le déficit budgétaire belge à l’horizon 2029.

C’était un premier exercice de taille pour les douze partis politiques belges représentés au Parlement fédéral. Ils devaient piocher jusqu’à 30 propositions – prioritaires à leurs yeux – issues de leur programme pour les soumettre au chiffrage du Bureau Fédéral du Plan (BFP), dont les résultats sont tombés.

Afin de cadrer l’exercice, l’organe avait défini huit axes sur lesquels les mesures devaient se retrouver: fiscalité et parafiscalité (contribution de la sécurité sociale), fonctionnement de l’administration publique, marché du travail, soins de santé, protection sociale, investissements publics, énergie/mobilité/environnement et politique économique.

Une fois reçues par le BFP, ces propositions ont été analysées de deux façons. D’abord en mesurant leur impact sur les finances publiques (ce que le Bureau Fédéral du Plan nomme ‘l’impulsion budgétaire’.) Ensuite en rapportant l’effet des mesures sur plusieurs facteurs: environnement, pouvoir d’achat, croissance économique, offre de travail, risque de pauvreté…

Comment expliquer qu’un parti de droite comme le MR, qui prône l’austérité et la prudence des dépenses, grève à ce point le budget de la Belgique?

Le MR grève le plus le budget de l’Etat

Georges-Louis Bouchez © BELGA PHOTO ANTHONY DEHEZ

Un premier coup d’œil aux résultats de ce chiffrage fait sourciller: les 25 propositions transmises par le MR au BFP sont celles qui pèsent le plus sur le déficit budgétaire belge. À politique inchangée, et selon les prévisions économiques 2024-2029 du Bureau du Plan, le déficit de la Belgique serait de 5,6% du PIB en 2029. Le programme du MR amènerait le curseur à 7,6% du PIB. Loin du PS (4,5%), du PTB/PVDA (4,8%), d’Ecolo (5%), des Engagés (5,4%) et de DéFi (6,3%).

Une tendance similaire se dégage des prévisions qui concernent la dette publique noir-jaune-rouge. Le scénario de référence du BFP la porte à 116,8% du PIB en 2029. À nouveau, seul DéFi (121,2% du PIB) et le MR (121,5% du PIB) côté francophone aggraveraient la situation belge à cet égard.

Comment expliquer qu’un parti de droite comme le MR, qui prône l’austérité et la prudence des dépenses, grève à ce point le budget de la Belgique? À titre de comparaison, la N-VA et l’Open Vld, côté néerlandophone, se retrouvent dans les clous du scénario de référence fixé par le BFP.

Cela s’explique en partie par la voie empruntée par les partis pour budgéter leurs mesures-phare: les propositions du PS et d’Ecolo gonfleront les recettes de l’Etat, là où les plans du MR impliquent une baisse drastique de ces mêmes recettes.

Le programme du MR engendrerait la création de 338.000 postes sur cinq ans, portant le taux d’emploi belge à 75,9% en 2029.

Propositions du MR: un effet positif sur la croissance, l’emploi et le pouvoir d’achat…

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Comme le souligne le président des libéraux francophones sur X (ex-Twitter), les 25 mesures de son parti analysées par le BFP remplissent plusieurs objectifs. Elles entendent permettre la meilleure croissance économique et le meilleur pouvoir d’achat – tous deux au-dessus du scénario de référence – pour la prochaine législature. Objectif atteint aussi en matière d’emploi. Le programme du MR engendrerait la création de 338.000 postes sur cinq ans, portant le taux d’emploi belge à 75,9% en 2029. En parallèle, le taux de chômage reculerait à 6,9%, mieux que les 8,2% attendus par le Bureau du Plan.

… mais un coût exorbitant pour les deniers publics

1er mai mr
Contrairement au MR, l'Open Vld d'Alexander De Croo n'aggrave pas le déficit budgétaire belge. De quoi en rire? © Belga Image

Pourquoi les propositions libérales pèsent si lourd dans le portefeuille de l’Etat? Première explication: l’ambition démesurée des deux propositions du MR en matière de fiscalité. Georges-Louis Bouchez et les siens veulent un relèvement progressif de la quotité exemptée d’impôt, pour arriver au niveau du revenu d’intégration sociale (RIS) de catégorie 2 (15.158,08 euros), soit celui dont bénéficient les personnes isolées. La mise en place d’une telle mesure créerait un manque à gagner important pour l’Etat. Tout comme l’autre proposition: augmenter les salaires nets des travailleurs, en supprimant la cotisation spéciale de sécurité sociale dès 2027.

Seconde explication: malgré les recettes issues de la limitation des allocations de chômage à deux ans, la volonté du MR d’instaurer un bonus d’activité pour les travailleurs qui gagnent moins de 4.500 euros brut par mois pèserait aussi négativement dans la balance. Tout comme, dans une moindre mesure, la réduction de l’impôt des sociétés à 15% pour les PME.

Le président des bleus francophones a réagi au chiffrage de l'institution. "Nous ne laissons pas courir le déficit mais le Bureau du plan n'a pu évaluer l'impact de certaines de nos mesures comme le budget base zéro car elles ne rentrent pas dans leur modèle", justifie Georges-Louis Bouchez.

Les limites du chiffrage

«Les discussions avec les partis ont été tendues, certains pensent toujours qu’ils peuvent mettre en place des mesures qui rapportent de l’argent mais ne coûtent rien», glisse un des experts qui a participé au chiffrage lors de la conférence de presse.

À noter que le chiffrage du Bureau Fédéral du Plan a ses limites. Certaines mesures présentes dans les programmes des partis, qui comptent par exemple sur un retour de l’argent issu de la fraude fiscale, ne sont pas reprises dans le calcul. «Tout comme les propositions qui ne sont applicables qu’en sortant du cadre, c’est-à-dire l’Union européenne ou la Constitution», pointent encore les experts.

Qui ont rappelé pendant la conférence de presse que leur travail était d’informer le citoyen de manière neutre et impartiale, sans porter de jugement sur les mesures envisagées par les partis. À la démocratie de faire le reste…

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