Comptes d’épargne : quelle banque choisir ? « Un taux à 3% est parfois moins intéressant qu’un autre à 2% » (infographies)
Argenta relèvera les taux d’intérêt sur le compte d’accroissement et le compte de fidélité à partir du 1er décembre. Les principales banques belges ont, elles aussi, toutes augmenté leurs taux d’intérêt sur les comptes d’épargne. Mais entre taux de base et prime de fidélité, il est parfois complexe de comparer les offres. Déchiffrage avec Nicolas Claeys, expert financier chez Test-Achats.
Argenta va, à son tour, relever les taux d’intérêt sur le compte d’accroissement et le compte de fidélité à partir du 1er décembre. Sur le compte d’accroissement, le taux de base passera de 0,75 à 1,20% avec une prime de fidélité de 1,80%. Le taux de base du compte de fidélité augmentera, lui, de 0,15 à 0,25% tandis que la prime de fidélité sera de 1,75% (contre 1,10%). La prime de fidélité n’est acquise que pour les montants qui restent sur le compte d’épargne réglementé sans interruption pendant 12 mois après le dépôt. Toujours à partir du 1er décembre, le compte d’épargne non réglementé Pro Plus rapportera par ailleurs 0,50% de taux de base et 0,25% de prime de fidélité.
Ce n’est pas la seule: BNP Paribas Fortis, Belfius, ING, KBC, Beobank… la majorité des grandes banques actives en Belgique ont augmenté en cascade leurs taux d’intérêt sur les comptes d’épargne. Avec des hausses plus franches chez certaines que chez d’autres. Pour le client, il demeure complexe de savoir quelle offre correspond le mieux à son profil.
De fait, en Belgique, le taux d’intérêt global sur l’épargne comprend le taux de base et la prime de fidélité. C’est souvent cette dernière que les banques ont tendance à augmenter le plus, et c’est parfois trompeur (voir explications ci-dessous).
Mais pourquoi les banques haussent-elles presque toutes simultanément leur taux d’intérêt depuis quelques semaines ? « Ces augmentations suivent les taux de la BCE, qui ont augmenté depuis quelques mois. Progressivement, les banques suivent le mouvement, même si cela se fait de façon très lente », cadre Nicolas Clayes, expert financier chez Test-Achats.
Comptes d’épargne : les petites banques jouent le jeu
Selon le spécialiste, un aspect saute aux yeux : les banques augmentent surtout leur prime de fidélité, comprise dans le taux global affiché, mais qui s’applique différemment sur l’épargne. « La prime de fidélité ne s’applique qu’avec un effet retard, car le montant versé doit être présent sur le compte au moins un an pour profiter du taux. C’est beaucoup moins avantageux », rappelle Nicolas Claeys.
Globalement, les quatre grandes banques belges restent (très) timides dans leurs hausses de taux sur leur compte d’épargne classique. Récemment, BNP Paribas Fortis a annoncé une augmentation de 0,25% sur son taux de base. Belfius le relève de 0,10%, ING de 0,05%, KBC de 0,35%. Les progressions sont donc minimes, au regard de celle des taux de la BCE.
MeDirect, Santander et Keytrade sont actuellement les trois banques les plus avantageuses pour l’épargne.
Nicolas Claeys (Test-Achats)
« En revanche, les « petites » banques jouent plus nettement le jeu, remarque Nicolas Claeys. Comme MeDirect, qui offre un taux de base de 2% et une prime de fidélité de 0,80%. Ce qui égale le taux du dernier bon d’Etat. »
Au sein des « petits » acteurs (MeDirect, Santander et Keytrade), une concurrence est en effet de retour. Et c’est une bonne chose pour l’épargnant. « Pour l’instant, ces trois banques sont les plus avantageuses pour l’épargne », confirme l’expert Test-Achats.
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Effets d’annonce trompeurs
Il insiste sur les effets d’annonce parfois trompeurs de certaines institutions. « ING s’est fendu dans un communiqué qu’elle était la première banque à offrir un taux de 3% sur un compte à termes. Mais ce 3% n’en est pas un, car il est composé de 1,15% de taux de base, et de 1,85% de prime de fidélité. Beobank a annoncé la même chose, avec un compte qui va jusqu’à 3,10%, mais là aussi, c’est un taux axé essentiellement sur la prime de fidélité, avec un compte à versement mensuel. Cela signifie que lorsqu’on retire son argent, on perd toujours une partie des primes qui sont en cours de constitution », souligne Nicolas Claeys.
Une personne qui laisse son argent moins d’un an en compte doit vraiment privilégier les comptes avec un taux de base élevé.
Nicolas Claeys (Test-Achats)
Dès lors, comment y voir clair ? Tout dépend du profil de l’épargnant. « Une personne qui fait souvent des allers-retours sur son compte d’épargne, -ou qui laisse son argent moins d’un an en compte-, doit vraiment privilégier les comptes avec un taux de base élevé. Pour ceux qui peuvent garder leur argent en compte pendant plusieurs années, on peut alors envisager des comptes à primes de fidélité élevées », distingue le spécialiste Test-Achats. La différence entre le taux affiché et le taux réel est parfois très grande. Si la banque propose un taux global à 3%, on ne l’obtient jamais si on retire son argent trop tôt ».
Comptes d’épargne: vers une fusion entre taux de base et prime de fidélité ?
C’est dans cette optique que Test-Achats réclame la fusion entre le taux de base et la prime de fidélité. « Les banques ne pourraient alors proposer qu’un seul taux, qui serait le ‘taux vérité’, explique Nicolas Clayes. La comparaison entre les offres bancaires serait alors beaucoup plus aisée. Aujourd’hui, une banque qui offre un taux de 3% cumulés peut être moins intéressante qu’une banque qui offre 2%, mais où le taux de base a une proportion plus grande. »
Pour l’expert financier, cette prime de fidélité n’a pas de raison d’être. Elle n’existe d’ailleurs pas chez nos voisins français ou hollandais, pour qui le compte d’épargne se résume au taux de base. « Les banques belges ont toujours justifié l’existence de la prime de fidélité en disant qu’elle servait à la stabilité de l’épargne. Mais il n’y a jamais eu d’exode massif des épargnants même lorsque que les taux étaient nuls. »
Aujourd’hui, une banque qui offre un taux de 3% cumulés peut être moins intéressante qu’une banque qui offre 2%, mais où le taux de base a une proportion plus grande.
Nicolas Claeys
L’Autorité belge de la concurrence, dans son dernier rapport, est sans équivoque. L’organe indépendant dépeint une situation d’oligopole sur un marché bancaire belge « très concentré », dominé par quatre grands acteurs (BNP Paribas Fortis, KBC, Belfius et ING). Un avis qui permet de mieux comprendre pourquoi les taux d’intérêt demeurent très faibles alors que les taux directeurs de la BCE ont significativement augmenté (4%). « Nous constatons que les quatre grandes banques ont tendance à rouler en peloton et à offrir aux consommateurs des produits à des conditions commerciales substantiellement similaires », affirme l’étude.
Manque de concurrence frappant
« Le manque de concurrence est donc frappant alors que, vu leur forte solvabilité, BNP Paribas Fortis, KBC, Belfius et ING pourraient très bien supporter un degré plus élevé de concurrence sans compromettre la stabilité du secteur », commente le ministre de l’Economie Pierre-Yves Dermagne (PS).
« Le rapport évoque également le manque de transparence des tarifs et propose la suppression de la prime de fidélité », ajoute Nicolas Claeys.
C’est dans cette logique, aussi, que Test-Achats appelle à une fiscalité neutre pour tous les produits d’épargne. « Le problème est que comme le compte d’épargne est attractif fiscalement, les banques ne se battent même plus pour offrir des taux décents. » L’organisation de défense des consommateurs plaide donc pour élargir l’avantage fiscal des comptes d’épargne à l’ensemble des revenus mobiliers de façon à ce que le choix d’un placement ou d’un produit d’épargne pour un particulier soit neutre fiscalement. » Et de préciser : « La personne qui prend un compte à termes aujourd’hui a 30% de pénalité sur les intérêts. Il est donc compliqué de rivaliser avec un compte d’épargne, qui lui n’est pas taxé. »
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