Benjamin Hermann

Le lieu commun de Benjamin Hermann | La Belgique, là où rien ne va et tout va bien

Benjamin Hermann Journaliste au Vif

La Belgique est ingouvernable, entend-on. C’est le royaume de l’absurde, des ministres trop nombreux et de l’incompétence. La Belgique est une lasagne. Il n’y a plus moyen de s’entendre. Même des partis au pouvoir l’admettent. C’est à cause de ceux qui ne veulent ni mettre de l’eau dans leur vin ni voir la réalité en face. La tension est telle que le Premier ministre s’est adressé à ses administrés pour déplorer la situation. «Beste Belgen», a-t-il écrit dans plusieurs quotidiens néerlandophones. «Chères Belges, chers Belges», dans un seul quotidien francophone. Et «Liebe Mitbürgerinnen und Mitbürger», dans le seul quotidien germanophone.

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Il a lui-même commis des erreurs, concède-t-il. Mais il regrette les récentes chamailleries, la politique du clash, cette classe politique qui se préoccupe trop d’elle-même. Il faut coopérer. C’est la seule option. Et travailler sans relâche à une politique qui vole plus haut, avec ceux qui le veulent bien. Il s’y engage.

La lettre était prête depuis plusieurs mois. C’est Alexander De Croo, l’homme politique, pas le Premier ministre, qui a payé cette publication, à travers son parti. Tant pis si les mauvaises langues considèrent qu’il fait campagne, dès lors qu’elles sont toutes elles-mêmes en campagne depuis belle lurette, ces mauvaises langues.

Non, c’est un sursaut, un électrochoc, une prise de conscience qui étaient ici visés. Parce que la population mérite mieux que d’assister à des invectives. Qui pourra lui donner tort, au Premier?

Le plus étonnant, finalement, n’est-il pas l’aveu d’impuissance qui transparaît dans ses mots? Parce qu’en définitive, quoi qu’on pense des choix qui ont été posés jusqu’ici sous son capitanat, il y a au minimum un bilan à défendre. Il n’aura certes pas été constitué dans la meilleure des atmosphères et n’aura pas donné lieu aux grandes réformes attendues. Mais des accords ont été conclus, les indicateurs de croissance ne sont pas si mauvais, le portefeuille des Belges n’a pas été trop mal préservé au plus fort de la crise énergétique, le gouvernement a fini par s’entendre sur les pensions, l’asile, la trajectoire budgétaire, la lutte contre la drogue, la prolongation du nucléaire, rappelle- t-on d’ailleurs au cabinet De Croo.

L’opposition politique est rude, très rude parfois, mais elle joue son rôle. Les médias sont critiques, très critiques parfois, mais ils jouent leur rôle. «Quant à nous, nous sommes fiers du travail accompli. Et il reste du travail à accomplir», souligne-t-on au 16. Le rôle à jouer par la Vivaldi consistait à démontrer que la Belgique était gouvernable. Elle l’est sans doute, mais il fallait se boucher les oreilles, ces dernières semaines, pour continuer à y croire. Quand on déplore les chamailleries politiques à ce niveau de pouvoir, c’est qu’elles sont devenues assourdissantes.

La période est propice au ressourcement à l’étranger. Là où l’on pense souvent que l’herbe est plus verte. On y apprendra qu’un Premier ministre vient de démissionner, ou que l’extrême droite est au pouvoir, ou que le président a procédé à un remaniement ministériel. Et on nous y demandera peut-être par quelle recette, chez nous, on parvient à rendre le pays gouvernable.

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