Michelle O’Neill, qui emmenait la liste du Sinn Féin aux élections, devrait être la future cheffe de l’exécutif. © getty images

Irlande du Nord: risque d’impasse entre le Brexit et la menace de réunification

Le Vif

La victoire du Sinn Féin aux élections régionales met la province britannique un peu plus sous tensions, entre désaccord sur le Brexit et «menace» de réunification.

Après la victoire «historique» du Sinn Féin (républicain, favorable à la réunification avec l’Irlande) aux élections régionales, quel avenir pour l’Irlande du Nord? Eléments de réponse avec Elodie Gallet, maître de conférences en civilisation britannique et études irlandaises à l’université d’Orléans.

Assiste-t-on avec ce résultat à une nouvelle étape de la normalisation du Sinn Féin?

Il est vrai que le Sinn Féin a remporté plus de voix en première préférence. Mais au final, il conserve le même nombre de sièges que lors des élections précédentes. La nouveauté réside dans le fait que le DUP (NDLR: Parti unioniste démocrate, tenant du maintien dans le Royaume-Uni), qui était le premier parti, a perdu beaucoup de suffrages. Ce résultat conforte néanmoins une tendance observée lors du dernier scrutin en République d’Irlande où le Sinn Féin est arrivé en tête en nombre de votes. Mais il n’est pas au gouvernement parce que les autres formations n’ont pas souhaité créer de coalition avec lui.

Le risque de violences n’est pas forcément accentué par le résultat des élections.

La figure de Michelle O’Neill, promise à diriger l’exécutif, contribue-t-elle à cette tendance?

Ce n’est pas certain. Ce qui est sûr, c’est qu’en 2018, le Sinn Féin a changé de stratégie de communication. Gerry Adams et Martin McGuinness, qui avaient incarné le parti pendant un demi-siècle, se sont retirés de la scène médiatique pour laisser place à deux femmes, Mary Lou McDonald, présidente du parti, et Michelle O’Neill, la vice-présidente. Ce serait plutôt l’effet de ce changement. La première a notamment déclaré qu’elle voulait faire du Sinn Féin un «parti normal dans un pays normal».

La volonté du DUP de suspendre sa participation à l’exécutif à une révision du protocole nord-irlandais de l’accord du Brexit préfigure-t-elle une crise de longue durée?

La question n’est pas nouvelle. Le Premier ministre DUP, Paul Givan, s’est retiré de ses fonctions en février 2022 en disant qu’il fallait modifier ce protocole. Aujourd’hui, il y a une impasse. La crise durera- t-elle? C’est difficile à dire. Les Nord-Irlandais attendent des actes de la part du gouvernement britannique et essentiellement de l’Union européenne. Il existe peu d’options.

La tenue, dans les cinq ans, d’un référendum sur la réunification avec la République d’Irlande voulue par le Sinn Féin n’irait-elle pas à l’encontre des intérêts des républicains, les sondages indiquant que 30% seulement des Nord-Irlandais y consentiraient?

D’autres sondages indiquent que si un référendum était organisé dans les dix ans à venir, deux tiers des sondés pensent qu’ils pourraient être favorables à une réunification. Mais effectivement, pas dans les cinq ans. Auparavant, on ne parlait pas d’échéance. On a commencé à parler d’un délai de cinq ans. Mais cela semble un peu court. Si bien que le Sinn Féin n’a pas tellement mis la question de la réunification en avant lors de la campagne électorale. Il s’est plutôt concentré sur les questions sociales.

La possibilité de violences est-elle renforcée par le résultat du scrutin?

Le risque est permanent. Mais il n’est pas forcément accentué par le résultat des élections. Il le serait davantage si un référendum à très court terme sur la réunification était évoqué.

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