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Payer plus, recevoir moins: la « shrinkflation », ou comment les marques brouillent les cartes (enquête)

Christophe Leroy Journaliste au Vif
Ludivine Ponciau Journaliste au Vif

Plus encore en période d’inflation, des marques camouflent les hausses de prix en réduisant la quantité ou la qualité. Faut-il sévir? Est-ce la fin d’un modèle économique? Décryptage.

Quand le consommateur placera machinalement ce produit qu’il a l’habitude d’acheter dans son caddie, il ne se rendra même pas compte que quelque chose a changé. Logique, puisque tout sera fait pour qu’il ne s’en aperçoive pas. Même marque, mêmes couleurs, même emballage… A quelques détails près. Quand l’inflation bat des records, quoi de mieux qu’un petit tour de passe-passe pour préserver ses marges, tout en donnant l’illusion que le prix reste plus ou moins identique? Dix grammes par-ci, quinze millilitres par-là: du paquet de chips au plat surgelé en passant par le shampoing, certaines marques réduiront subrepticement le grammage ou le volume de leur produit, sans jamais faire machine arrière.

« On ne pourrait pas imaginer changer tous les emballages pour préciser que le grammage a diminué afin de limiter la hausse de prix. »

Bien connues des industries en tout genre, ces pratiques se résument en deux néologismes particulièrement hideux: la «shrinkflation» ou la réduflation, qui combinent respectivement l’inflation au verbe anglais «to shrink» (réduire, rétrécir) ou à son équivalent français. Dans d’autres cas encore plus insidieux, elles franchiront un pas de plus, en ajustant cette fois le curseur des ingrédients ou des composants: moins de pourcentage de viande dans une lasagne, de mailles de coton dans un tee-shirt, plus d’eau dans un liquide lessive, de pièces fragiles en plastique dans un aspirateur… C’est ce que l’on appelle la «skimpflation» (du verbe «to skimp», signifiant lésiner, mégoter, économiser) ou «cheapflation», à savoir une baisse qualitative d’un produit ou d’un service.

Une méthode éprouvée… et légale des marques

Particulièrement décrié ces derniers mois dans un contexte d’inflation, le phénomène serait marginal. Du moins au regard des cas avérés, qui ne constituent indéniablement que la partie émergée de l’iceberg. «Une étude britannique a estimé que la shrinkflation concernerait 2% des produits alimentaires, rapporte Isabelle Schuiling, professeure de marketing à l’UCLouvain. Il ne faut pas croire que toutes les entreprises veulent tricher.» D’après l’association française 60 millions de consommateurs, la shrinkflation concernerait environ 150 références parmi les dix mille à trente mille produits que l’on retrouve en rayon, soit un ratio de l’ordre de 0,5 à 1,5%. En l’absence d’une base de données ou d’un contrôle exhaustif de cette tactique commerciale, les informations sur la question restent toutefois très parcellaires.

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La méthode n’a par ailleurs rien de nouveau. «Elle est vieille comme le commerce lui-même, retrace Pierre-Alexandre Billiet, CEO de Gondola et auteur du livre Consommation de crise. Grandeur, décadence… et transcendance de la société de consommation au XXIe siècle (éd. Gondola, 2023, 169 p.). Dès que les marges d’un business en continuité sont sous pression, soit on accepte une baisse de celles-ci, soit on adapte le produit, son emballage, sa composition, etc. En économie, rares sont les périodes pendant lesquelles il y a une combinaison de prix et de qualité stables. Or, en tant que consommateur, notre référentiel repose sur des prix stables. D’où les questionnements que l’on entend aujourd’hui: comment est-ce possible, et est-ce bien légal?»

Oui, c’est bien légal, confirme le SPF Economie, en charge de la protection des consommateurs: «La shrinkflation est permise tant que la véritable quantité nette de produit est indiquée de manière claire sur l’emballage.» En revanche, «si l’entreprise tente de vous tromper par des indications incorrectes ou ambiguës concernant la quantité nette, elle devient une pratique déloyale et à ce titre, elle est interdite». En résumé, les marques restent dans les clous tant que la description de leurs produits correspond à leurs caractéristiques réelles… Tout l’inverse de l’hypermédiatique scandale des lasagnes Findus, en 2013, soi-disant pur bœuf mais composées en réalité de viande de cheval, dans des proportions variables selon les pays.

« Un marché libéralisé va-t-il nécessairement tirer les prix vers le bas et éventuellement la qualité vers le haut? Non. »

La «sensation de s’être fait avoir» par les marques

La position de l’inspection économique ne satisfait toutefois pas Testachats. «A l’heure actuelle, il n’y a pas de possibilité de condamner le phénomène en tant que tel, confirme Julie Frère, porte-parole de l’organisation de consommateurs. Nous trouvons que c’est problématique, parce que les personnes ayant l’habitude d’acheter un produit ne font pas régulièrement l’exercice de comparer le prix à l’unité. Il est certain que quand elles se rendent compte que le contenu dans l’emballage a discrètement diminué, elles ne sont pas contentes du tout. Le consommateur a alors cette sensation de s’être fait avoir.» Une lecture que conteste la Fevia, la Fédération de l’industrie alimentaire belge. «Nous sommes l’un des secteurs les plus transparents, objecte Carole Dembour, experte économique à la Fevia. Dans notre cas, la shrinkflation n’est absolument pas malhonnête, puisque le consommateur a toutes les informations nécessaires à portée de main.»

Outre-Quiévrain, la shrinkflation agace les associations et les élus. L’ONG Foodwatch dénonce régulièrement ce qu’elle considère, elle, comme un manque de transparence inadmissible, induisant les consommateurs en erreur. Depuis son lancement en septembre 2022, sa pétition sur le sujet a recueilli plus de cinquante mille signatures. Un signal visiblement entendu par le gouvernement français. Le 31 août dernier, sur le plateau du JT de France 2, le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, a promis une lutte contre ces pratiques «trompeuses et abusives»: «Il y aura l’obligation légale pour les industriels de faire figurer le changement de contenu, lorsque celui-ci a baissé mais que le prix reste le même. Stop aux arnaques!» Un texte de loi serait prévu pour 2024. En Allemagne, la ministre fédérale de la Protection des consommateurs, Steffi Lemke, a plaidé pour qu’à l’avenir, les emballages de même taille avec un contenu réduit (ou un emballage agrandi avec un contenu inchangé) ne soient plus autorisés. «De telles pratiques sont problématiques tant du point de vue de la protection des consommateurs que de la réduction des déchets», a-t-elle souligné au quotidien Handelsblatt.

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En Belgique, le PTB compte déposer une proposition de loi visant à interdire purement et simplement ces pratiques, après avoir interpellé le ministre fédéral de l’Economie, Pierre-Yves Dermagne (PS), le 25 septembre dernier. «La shrinkflation, c’est un vol manifeste, dénonçait récemment au Vif le député PTB-PVDA Roberto D’Amico. Nous proposons que cette pratique commerciale soit reprise parmi les pratiques commerciales trompeuses dans le Code de droit économique.» Pas si simple sur le plan juridique, fait cependant remarquer Testachats. «Il y a deux façons de détecter une pratique déloyale dans la réglementation, commente Julie Frère. Soit elle va, par sa présentation générale, induire le consommateur en erreur (NDLR: c’est le cas d’un produit n’indiquant pas les ingrédients corrects), soit on se réfère à la liste noire des pratiques commerciales déloyales en toutes circonstances. Mais cette liste ne peut être modifiée qu’au niveau européen ; les pays ne peuvent pas prendre d’initiatives individuelles à cet égard.»

La manière dont la France procédera pour imposer ou non la transparence au sujet de la shrinkflation fera donc l’objet d’une attention particulière en Belgique. Mais pour la Fevia, une telle mesure serait bien trop contraignante et coûteuse. «Au niveau de la production, on ne pourrait pas imaginer changer tous les emballages pour préciser que le grammage a diminué afin de limiter la hausse de prix, poursuit Carole Dembour. Ajouter un tel message, dans les trois langues du pays, impliquerait de changer tout le design. Il s’agirait en outre d’un emballage temporaire, ce qui s’avérerait bien trop coûteux pour les producteurs.» La fédération ne se dit pas opposée à une meilleure mise en évidence du prix à l’unité ou au kilo de la part des distributeurs, dans l’optique d’attirer l’attention du consommateur… Sans pour autant verser dans la dénonciation des cas de shrinkflation.

Délation

Car, pour la première fois, des distributeurs de renom se mettent eux aussi à clouer au pilori leurs propres fournisseurs. En France, Intermarché a apposé il y a peu une affichette «Ça jette un froid» à des pommes de terres rissolées dont le paquet a perdu dix grammes, en parallèle à une hausse substantielle du prix au kilo. Depuis le 11 septembre dernier, le groupe Carrefour informe pour sa part les clients des cas de shrinkflation, via un étiquetage ciblant dans ses rayons quelque 25 produits dont le contenu a diminué et le prix augmenté. Il s’est également engagé à renégocier avec les marques concernées. Pure hypocrisie? «Ils sont gonflés de faire tout ce tambourinage autour de l’inflation masquée, alors qu’eux-mêmes ont démarré au mois de mai, rétorquait le même jour Lionel Maugain, journaliste au magazine de l’association 60 millions de consommateurs, sur les ondes de France Inter. Pour tenir sa promesse de premier prix en légumes à 0,99 euro, Carrefour est passé d’un paquet de trois à deux salades sucrines. Il est aussi passé, pour les sacs de pommes de terre, d’1,5 kilo à un kilo.»

Peu importe que vous diminuiez la qualité de vos produits, tant qu’elle reste supérieure à celles des autres: c’est le raisonnement de la cheapflation.

Le président de l’Association nationale française des industries alimentaires, Jean-Philippe André, n’avait pas non plus manqué de critiquer la stratégie de délation de Carrefour: «Les distributeurs ont ces produits dans leurs rayons et les ont acceptés comme tels. Au-delà de certains prix, la rotation va baisser. Vous avez un sachet de 300 grammes, si vous le mettez à 280 grammes, vous le vendez mieux et le distributeur le sait aussi.» Pour la Fevia, cette manière de procéder n’est rien d’autre qu’une technique de négociation commerciale, visant à mettre la pression et à rejeter la faute sur les producteurs, dans un contexte où les supermarchés s’approprient la communication sur la préservation du pouvoir d’achat.

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«La grande distribution est très mal armée pour jouer la carte de la transparence, ajoute le CEO de Gondola. Comme on le voit pour la durabilité, cela suppose de connaître la chaîne de valeur. Dans une économie où les matières premières viennent du monde entier, il est très difficile d’être transparent. Des solutions ont déjà été évoquées, en recourant par exemple à la blockchain ou à l’intelligence artificielle, mais on n’y est pas encore à l’heure actuelle.» Il est du reste possible que des marques propres de certains distributeurs, généralement meilleur marché, aient déjà eu recours à la shrinkflation ou la cheapflation mais que ce soit passé sous les radars. «Il est très difficile d’y voir clair, commente Jordan Melmies, maître de conférence en économie à l’université de Lille. J’ai l’impression que cette stratégie existe depuis longtemps dans leur chef. S’il s’avère qu’elles ont déjà fait ce chemin par le passé, il n’est pas surprenant que les marques premium soit davantage pointées du doigt aujourd’hui. Peu importe que vous diminuiez la qualité de vos produits, tant qu’elle reste supérieure à celles des autres: ce serait en quelque sorte leur raisonnement.»

Le différentiel qualitatif entre les marques dites premium et celles de supermarchés n’est toutefois pas systématique. Dans un article publié en 2016 dans Review of Radical Political Economics, l’expert épinglait une enquête menée par le Crioc (l’ex-Centre de recherche et d’information des organisations de consommateurs), avant sa dissolution par le gouvernement, en 2015. S’agissant d’une comparaison de marques de lasagne, «l’étude fait état d’une teneur en viande plus faible pour un produit premium (17%) que pour l’une des marques de distributeur (24,8%) du même poids». Toutefois, «seul le produit de marque premium contenait de la viande de bœuf: 3,5%». Dans la galaxie des ingrédients et des ajustements de proportions au dixième de pourcent, il n’est pas surprenant que même le consommateur le plus attentif s’y perde.

Déjà complexes à débusquer dans le secteur alimentaire (lire l’encadré), les pratiques de shrinkflation et de cheapflation sont encore moins visibles dans d’autres types de produit. Comment déceler la réduction du nombre de mailles d’un tee-shirt de fast fashion, quand celui-ci reste bel et bien 100% coton? Ou le remplacement de composants internes d’un produit électronique par des substituts moins robustes? «La prédominance des cas alimentaires s’explique par le fait que c’est plus facile à montrer, que la répression des fraudes veille à la question et qu’il y a aussi un enjeu sanitaire, poursuit Jordan Melmies. Pour le reste, je ne pourrais affirmer qu’un secteur en particulier soit épargné par de telles pratiques.» D’où les auscultations de produits que Testachats réalise régulièrement, au terme desquelles l’organisation octroie un label au meilleur du test et au «maître-achat» (meilleur rapport qualité-prix).

La grande distribution est très mal armée pour jouer la carte de la transparence.

Le nivellement par le bas n’est cependant pas réitérable à l’infini. Où s’arrêtera la réduction de la taille des emballages, de la proportion des ingrédients essentiels – en principe, puisque certaines marques de fromage râpé, par exemple, ne contiennent plus de fromage dans les faits – d’un produit? «Quand elles arrivent au bout du bout, certaines marques pourront toujours rehausser la taille de certains produits, notamment par l’entremise de formats XL, décode l’économiste. Et dans beaucoup de cas, il y a quand même encore de la marge.»

Les mêmes questions en près d’un siècle

De manière bien plus fondamentale, la shrinkflation ne révèle-t-elle pas les limites du modèle capitaliste, dont l’un des arguments suppose que la mise en concurrence mène à une diminution des prix, voire à une hausse qualitative d’un même bien ou service? «On touche effectivement aux limites d’un système de consommation, confirme Pierre-Alexandre Billiet. Jusqu’ici, notre société a bien plus été influencée par le libéralisme que par un autre mouvement, que l’on appelle l’ordolibéralisme. On a ainsi cru à une autorégulation des marchés qui, certainement dans le cas de la grande consommation, n’est absolument pas d’application. L’ordolibéralisme, en revanche, né en Allemagne dans les années 1930, considère que tout ne peut pas être libéralisé. Un marché libéralisé va-t-il nécessairement tirer les prix vers le bas et éventuellement la qualité vers le haut? La réponse est absolument négative. Il est assez remarquable de constater que l’on entend aujourd’hui ce même questionnement, près d’un siècle plus tard.»

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Face au maintien concomitant des marges et du sacro-saint pouvoir d’achat, sur lequel le monde politique communique abondamment, la shrinkflation ne serait finalement qu’une variable d’ajustement parmi d’autres, au même titre que la délocalisation d’activités ou les coupes dans la main-d’œuvre. Faut-il nécessairement blâmer toutes les entreprises qui la pratiquent? «Bien mise en place, la shrinkflation permet d’éviter des hausses de prix trop brutales pour le consommateur et de stabiliser la perception du pouvoir d’achat, dans un contexte où certaines matières premières ont vu leur prix augmenter de 25% par an, poursuit le CEO de Gondola. On le voit à toute époque: si les prix alimentaires augmentent trop fortement, cela peut déstabiliser toute une économie. De tels ajustements ne sont pas futiles, pour autant qu’ils soient raisonnables.»

De même, la shrinkflation est-elle nécessairement préjudiciable dans une société marquée par la surconsommation? Ne serait-elle pas positive dans certains cas, notamment lorsqu’elle porte sur des produits déjà trop gras, sucrés ou salés? «Cinquante-et-un pour cent des Belges sont en surpoids ; on doit manger moins ou mieux, conclut Pierre-Alexandre Billiet. Dès le troisième mois de l’année, notre mode de vie a épuisé toutes les ressources naturelles regénératives à l’échelle de la planète ; on doit consommer moins, de manière plus durable et circulaire. Il ne s’agit pas de s’adapter à la marge. La shrinkflation peut constituer un accompagnement positif, à condition qu’elle mette en avant cette nécessité de consommer moins. La skimpflation, en revanche, me paraît plus dangereuse, puisqu’elle se manifeste par une diminution de la qualité. Là, on joue avec le feu.»

En l’état actuel, la shrinkflation ne constitue pas une tactique commerciale pertinente, estime Isabelle Schuiling. «C’est pour moi une grossière erreur, puisque cette approche sournoise, quand elle apparaît au grand jour, nuit inévitablement à l’image des marques concernées.» Pour les affaires comme pour la planète, tout semble indiquer que ces dernières seraient mieux avisées de s’emparer du narratif de l’indispensable changement de la consommation, plutôt que de grappiller quelques grammes sans crier gare. A supposer qu’elles trouvent leur place dans cette nouvelle ère qui, pour l’heure, relève davantage du frémissement.

Cheapflation, shrinkflation: trois pistes pour les débusquer

Qui regarde le grammage ou le litrage des produits achetés fréquemment? Comme le souligne Testachats, le consommateur doit renouer avec certains principes essentiels. «Quand on va faire ses courses, il faut prendre quelques minutes supplémentaires pour vérifier le prix à l’unité, au kilo, puis le comparer, conseille Julie Frère, la porte-parole de l’organisation de consommateurs. Peut-être que tel produit que l’on n’a pas l’habitude d’acheter, situé juste à côté, est d’aussi bonne qualité et meilleur marché.» La vigilance est une condition préalable pour détecter de potentiels cas de shrinkflation, tout comme les «economy» ou autres «family packs» trompeurs, dont le prix au kilo s’avère parfois plus cher que les formats plus réduits. Mais elle ne suffit pas. D’où ces trois autres pistes.

Dans les folders: le site promobutler.be est l’un des rares à compiler et à garder sur son site les anciens folders des enseignes de grande distribution, où apparaissent le prix et le grammage de produits tels qu’ils étaient vendus il y a plusieurs années. Cela permet de confirmer ou d’infirmer une suspicion de shrinkflation, en particulier quand le grammage semble suspect (185 grammes plutôt que 200 pour un paquet de chips, 290 millilitres plutôt que 300 pour un pot de glace…). Il subsiste toutefois une difficulté: certains folders mentionnent les grammes là où d’autres expriment un volume en millilitres. La comparaison dans le temps suppose logiquement que les unités choisies soient équivalentes.

Dans des bases de données: le site openfoodfacts.org (il existe aussi une application du même nom) renseigne les ingrédients de milliers de produits de la grande distribution. Une mine d’or pour estimer l’impact environnemental du produit, mais aussi pour retrouver a proportion de certains ingrédients. Toutefois, il ne renseigne pas l’évolution de leur composition au fil du temps.

Dans l’appli du magasin: la numérisation systématique des tickets de caisse, telle que proposée par un nombre croissant d’enseignes dans leur application, peut permettre de retrouver des cas de shrinkflation d’un produit précédemment acheté, puisqu’y apparaissent en général son prix unitaire et, surtout, son grammage.

Ce qu’en dit Danone

En France, l’ONG Foodwatch avait déjà épinglé la shrinkflation chez Danone, dont les bouteilles de la marque La Salvetat, qui lui appartient, avaient perdu dix centilitres en 2020. Qu’en est-il chez nous? Contacté par Le Vif, Danone Belgique indique qu’il n’a «pas l’habitude d’adapter le poids de ses produits et ne prévoit pas de le faire à l’avenir». Toutefois, «en avril de cette année, Danone a exceptionnellement choisi de réduire la taille des portions de ses produits Danio. Le poids de tous les produits de la gamme cœur Danio a été réduit de 180 grammes à 165 grammes, et de 165 grammes à 150 grammes pour la gamme crunchy. La taille de l’emballage a également été réduite de sorte à rendre ce changement clairement visible auprès des consommateurs. Cela a été partagé publiquement sur le site Web de Danone pendant trois mois.» Le groupe invoque deux raisons principales: «D’une part, éviter d’augmenter le prix de vente ecommandé à ses clients de la distribution. D’autre part, dans le cadre de notre objectif de stimuler des habitudes plus saines, la réduction de portion a permis de réduire l’apport en sucre par portion (-1,2% ou -2 grammes et, dans le cas de la variante crunchy, -0,8% ou -1,3 gramme par portion) sans compromettre le goût et la qualité.»

Ce qu’en dit Britvic (Teisseire)

En 2020, la célèbre marque de grenadine à réduit ses bidons de 75 à 60 centilitres et de 1,5 à 1,3 litre. Questionnée par l’ONG française Foodwatch en septembre 2022, Britvic France le reconnaît ouvertement: «Ce changement de nos volumes visait à limiter la répercussion d’une forte hausse de l’un de nos principaux ingrédients sur nos prix de vente, cela afin de maintenir un prix raisonnable et accessible pour nos produits. La forte hausse du prix du sucre en 2019, qui est un ingrédient essentiel et réglementaire de nos sirops, nous a contraints à augmenter nos prix de vente. En tant que marque familiale, notre volonté est de pouvoir toujours offrir aux familles des produits accessibles. Ainsi, pour éviter une hausse importante du prix du bidon, nous avons pris la décision de faire évoluer sa contenance, ce qui a limité les répercussions sur le prix de vente.» Ces changements ont aussi concerné la Belgique.

Ce qu’en dit Mondelēz

Côte d’or, Lu, Philadelphia, Oreo, Milka, Toblerone, Tuc… Le groupe Mondelēz possède de nombreuses marques bien connues du consommateur belge. En 2016, le cas de Toblerone avait fait grand bruit au Royaume Uni, où la baisse de la livre sterling, dans le contexte du Brexit, l’avait incité à réduire le grammage (de 400 à 360 grammes), notamment en augmentant l’espace entre les célèbres triangles… avant de faire machine arrière, face au tollé général. En France, il a plus récemment été pointé du doigt pour certains produits Côte d’or. Contacté par Le Vif, Mondelēz Belux précise que la priorité du groupe international est de garder ses marques «à des tarifs aussi abordables que possible, sans compromis sur le goût et la qualité des produits. Nous sommes confrontés aux mêmes défis que tant d’autres entreprises alimentaires, c’est-à-dire l’augmentation significative des coûts de production – qu’il s’agisse des ingrédients, de l’énergie ou de l’emballage. Cela signifie que nos produits sont beaucoup plus chers à fabriquer. […] Nous essayons d’absorber les coûts le plus que possible, mais, dans le contexte actuel et difficile, nous devons parfois réduire légèrement la taille ou le poids d’un produit spécifique afin de rester compétitifs et de garantir le meilleur rapport qualité/prix pour nos consommateurs. Malgré cela, Mondelēz International n’applique actuellement pas de modifications de grammage sur ses produits en Belgique.»

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