Factcheck | Les Solidarités, festival « bourré d’argent public »? (infographie)

Après les Francofolies de Spa, les Solidarités est le festival qui reçoit le plus d'argent de la part des autorités © Facebook / Les Solidarités
Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

Selon le président du MR Georges-Louis Bouchez, le festival des Solidarités serait « bourré d’argent public ». Réponse de l’organisateur : « Notre festival est l’un des moins financés par l’argent public ». La vérité se situe quelque part entre les deux.

Ce vendredi 25 août, le festival des Solidarités ouvre ses portes à Namur pour une nouvelle édition. Tout le weekend, la capitale wallonne bougera sur les airs de Big Flo & Oli, Louise Attaque ou encore Zazie. Avec une nouveauté : le déménagement depuis l’ancien site de la Citadelle vers le site d’Ecolys, en périphérie namuroise. Et une annulation de dernière minute du concert de Médine, rappeur français critiqué pour un tweet jugé antisémite.

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Début de semaine, le président du MR Georges-Louis Bouchez avait mis le feu aux poudres dans un tweet, demandant aux organisateurs « un peu de décence en ne faisant pas venir cette personne ». Le lendemain, Denis Gérardy et son équipe annulaient la venue du rappeur français. « Cela n’a strictement rien à voir avec la déclaration de Monsieur Bouchez », assure le directeur des Solidarités. Les organisateurs ont justifié leur décision par « un souci d’apaisement ».

Loin de limiter sa critique au seul cas de Médine, Georges-Louis Bouchez assure également dans le même tweet que le festival est « bourré d’argent public ». Quand on lui pose la question, le secrétaire général de Solidaris (mutualité socialiste qui est à l’origine de la création du festival), Jean-Pascal Labille, s’offusque. « Nous sommes de loin le festival le moins subsidié, Monsieur Bouchez ferait mieux de regarder dans sa propre assiette. Quand on voit le pactole octroyé aux Francofolies de Spa… » (organisé par Charles Gardier, député MR en Fédération Wallonie-Bruxelles, NDLR).

Les Solidarités, second festival le plus arrosé

Prenons les chiffres de l’été dernier (voir infographie ci-dessous). En 2022, le festival des Solidarités a reçu 186.100€ d’argent public, provenant tant de la Fédération Wallonie-Bruxelles que de la Région wallonne. Seules les Francofolies de Spa (509.331€) ont reçu une plus grande manne financière de la part des autorités. Les Ardentes (168.063€), Couleur Café (164.096€) et le Dour Festival (129.553€) complètent le top 5.

Les Francofolies sont, de loin, le festival le plus subsidié par les autorités. Mais derrière ce mastodonte de la musique – qui semble hors compétition – c’est bien le festival des Solidarités qui est le plus financé. On est donc loin du discours des organisateurs, selon lequel l’événement namurois est le festival le moins subsidié de la bande.

Surtout qu’il ne bénéficie pas d’un contrat-programme – qui assure à certains opérateurs un financement annuel de leur événement pendant 5 ans – au contraire des quatre autres festivals les plus subsidiés par les gouvernements du sud du pays. Pour obtenir ce fameux contrat-programme (le dernier étant établi pour la période 2018-2022), les festivals doivent remplir toute une série de critères : quota d’artistes de la Fédération Wallonie-Bruxelles, rémunération des artistes, espace d’expression, égalité des chances, durabilité…

« On n’est pas jaloux des autres festivals, tant mieux pour eux »

Jean-Pascal Labille, secrétaire général de Solidaris

Lors de la dernière négociation des contrats-programme, le festival des Solidarités n’avait pas obtenu le graal, au grand dam des organisateurs. « Nous recevons des aides exceptionnelles de la ministre de la Culture pour compenser », explique le directeur de l’événement Denis Gérardy. Jean-Pascal Labille en rajoute une couche : « On n’est pas jaloux des autres festivals, tant mieux pour eux. Mais il y a un manque d’équité, quand on voit ce que les Francofolies reçoivent ».

Un festival privilégié ?

Frédéric Daerden (PS) est le ministre qui a octroyé le plus d’argent aux Solidarités © Jean-Marc Quinet/ISOPIX

Manque d’équité ou pas, le festival des Solidarités est celui qui a reçu – en ce qui concerne les subsides facultatifs – le montant le plus important de la part des ministres wallons et de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Parmi eux, Frédéric Daerden (PS), ministre en charge du Budget et de l’Egalité des chances en FWB. L’homme politique liégeois a été le plus généreux de tous, puisqu’il a octroyé quelque 62.000€ aux organisateurs des Solidarités. Soit un tiers du montant total reçu par le festival namurois. Etonnant, au vu de ses compétences ? « L’essence de l’événement est l’inclusion et la diversité, rétorque le cabinet Daerden. De par cette intervention, nous favorisons l’accessibilité pour certains publics (PMR, personnes sourdes, personnes en situation de handicap mental, personnes âgées et jeunes…) ». Le cabinet justifie également son intervention par la volonté des Solidarités de pratiquer des prix démocratiques, accessibles aux plus précaires.

« L’implication de Solidaris dans les budgets du festival n’était pas claire »

Ministère de la Culture

Dans les autres personnalités politiques qui contribuent au financement du festival, on retrouve notamment Philippe Henry (Ecolo), ministre wallon en charge du Transport. Les Solidarités est le seul festival de notre top 5 que l’écologiste finance (à hauteur de 23.000€). « Nous finançons ainsi la mise à disposition de navettes gratuites pour les festivaliers », indique le cabinet du ministre wallon.

Bientôt un contrat-programme pour les Solidarités ?

Pourquoi le festival n’a pas obtenu de contrat-programme en 2017 ? « Il y avait un manque de transparence dans leurs dossiers », répond le cabinet de Bénédicte Linard, qui précise que cela s’est amélioré avec le temps. « L’implication de Solidaris dans les budgets du festival n’était pas claire ». Le ministère de la Culture cite en exemple le fait que la mutuelle bénéficiait d’un nombre important de places gratuites pour ses affiliés, mais que cela n’était pas pris en compte dans les chiffres de fréquentation.

Les organisateurs ne comptent pas essuyer un deuxième échec d’affilée, et espèrent que le dossier qu’ils ont introduit leur permettra d’enfin obtenir, comme les autres festivals de leur envergure, un contrat-programme. Denis Gérardy et Jean-Pascal Labille devront attendre la fin novembre pour être fixés.

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