Yves Van Laethem.

Yves Van Laethem: « La situation reste fragile, hésitante »

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Si les hospitalisations et les décès continuent de diminuer, les nouvelles contaminations sont à la hausse depuis quelques jours. Comment analyser ces chiffres ?

Trois explications

Depuis quatre jours, les nouvelles contaminations au Covid en Belgique sont en augmentation. Selon le porte-parole interfédéral Yves Van Laethem, il y a plusieurs explications:

  • On réalise plus de tests que pendant la période des fêtes. La moyenne est désormais de 40 000 tests par jour.
  • On réalise des tests sur des personnes revenant de zone rouge.
  • Dans la semaine de référence, il y a le 1er janvier. Or, on teste généralement moins lors des jours fériés. « Cela fausse partiellement les données. »

Le nombre de cas actuel est cependant toujours plus bas que la courbe précédant les vacances de Noël. « Mais la situation reste fragile, hésitante. Il pourrait y avoir une recrudescence dans les semaines qui viennent, même si l’évolution inverse ne peut pas être exclue. »

Les voyages, moteur de la circulation du virus ?

L’augmentation est présente globalement dans toutes les tranches d’âge, plus prononcée chez les enfants de 10 ans, les jeunes adultes et, plus inquiétant, les personnes de plus de 90 ans. En chiffres absolus, on retrouve le plus de contaminations chez les populations jeune et active de la vingtaine et de la trentaine. « Peut-être une des populations qui a le plus voyagé », note Van Laethem.

On observe une augmentation dans toutes les provinces. La plus petite augmentation, de 2%, concerne la province de Luxembourg. La région bruxelloise connait en revanche une « augmentation majeure » de 94%, « pratiquement un doublement des chiffres sur base hebdomadaire ». A Bruxelles, le plus grand nombre de cas se trouve chez les jeunes adultes, jusqu’à 40 ans, principalement dans les communes d’Ixelles, d’Etterbeek et de Bruxelles-Ville, « des communes où habite entre autres une population internationale qui voyage sans doute plus. » Au niveau des provinces, ce sont le Brabant wallon et du Brabant flamand qui montrent la plus forte augmentation. En chiffres absolus, ce sont toujours dans les provinces d’Anvers, de Flandre orientale et de Flandre occidentale qu’on dénombre le plus de cas.

2020, année la plus mortelle depuis 1918

Les hospitalisations continuent, lentement, leur diminution. « Si l’évolution continue au rythme actuel, nous atteindrons les 75 admissions seulement dans la deuxième partie du mois de février. » Trois provinces connaissent une légère augmentation des admissions : Brabant flamand, Anvers et la région bruxelloise. Il y a toujours plus de sorties d’hôpital que d’entrées.

Les décès continuent également leur diminution. Si le pic des décès n’a pas été aussi important que lors de la première vague, la deuxième vague aura fait davantage de morts (52% des décès). La Belgique compte depuis ce week-end plus de 20.000 décès dus au Covid depuis le début de la pandémie. « 2020 sera marquée par la mortalité la plus importante que la Belgique ait connue depuis la période de la grippe espagnole et la fin de la guerre en 1918 », précise encore le porte-parole.

L’impact dévastateur de la crise sur les soignants

Le porte-parole a également fourni les résultats d’une enquête réalisée auprès de 3.140 professionnels de soin et d’aide et aidants proches. La pression qui s’exerce sur ces professionnels a augmenté en raison de la crise sanitaire, suite à l’impact des soins à apporter aux personnes (présumées) infectées par le virus, à l’obligation de respecter les mesures d’hygiène et de protection personnelle et en raison d’une augmentation des tâches administratives.

Les participants ont classé, de 0 (jamais) à 10 (toujours), des symptômes connus comme étant le résultat d’une pression importante, selon l’apparition de ces symptômes dans des circonstances habituelles (hors Covid) ainsi que lors de la semaine précédant l’enquête. Sciensano a analysé le nombre de participants qui ont donné un score élevé, de 7 ou plus, à ces symptômes.

10 mois après le début de la crise, les répondants ont rapporté avoir ressenti plus souvent qu’avant une série de symptômes pouvant être la conséquence d’une pression plus importante. Ces signaux étaient clairement identifiés par les répondants des différents secteurs (hôpitaux, maisons de repos, la première ligne, le secteur du bien-être) et des différentes régions du pays.

Sur le plan personnel, les symptômes suivants, qui peuvent être la conséquence d’un stress chronique, sont apparus plus souvent que la normale :

  • Sentiment de fatigue (56% contre 38% en temps normal)
  • Être sous pression (51% contre 34% en temps normal)
  • Ne pas pouvoir se détendre suffisamment (46% contre 27% en temps normal)
  • Privation de sommeil (40% contre 25% en temps normal)
  • Troubles de la concentration (26% contre 15% en temps normal)

Des symptômes en rapport avec un stress aigu sont également apparus plus régulièrement :

  • Hypervigilance (38% contre 24% en temps normal)
  • Sentiments d’anxiété (27% contre 12% en temps normal)

Un soutien nécessaire

Sur le plan professionnel, la crise du Covid-19 laisse également des traces. En décembre 2020, 22% envisageaient de cesser leur activité (contre 10 % en temps normal). Ces résultats peuvent être liés à un sentiment d’isolement au travail (25 % contre 13 % en temps normal), a une baisse du sentiment de faire partie d’une équipe (58 % contre 69% en temps normal) et à une augmentation du sentiment d’incertitude dans leur équipe (16 % contre 7 % en temps normal). La constante réorganisation du travail, par suite de la crise, est une raison potentielle.

Il est alarmant de constater que même des problèmes physiques en rapport avec un stress chronique se sont manifestés davantage qu’en temps normal :

  • Douleurs musculaires et articulaires (38 % contre 21 % en temps normal)
  • Maux de tête (30 % contre 12 % en temps normal)
  • Problèmes d’estomac (21 % contre 11 % en temps normal)

La gravité des réactions psychiques et physiques à cette crise dépend en partie de la mesure dans laquelle les professionnels de soin et d’aide sont soutenus. Le besoin de soutien dans le futur est grand. Plus de la moitié des professionnels de soin et d’aide a indiqué avoir certainement ou probablement besoin du soutien de son chef et presque 40 % d’un professionnel.

Lire notre dossier : Covid: et si je refuse le vaccin?

Nous pouvons déduire de cette enquête nationale menée auprès des professionnels de soin et d’aide que dans la période qui a suivi le pic de la deuxième vague de la crise, la gravité des réactions psychiques et physiques dans ce groupe est toujours très élevée. Sciensano souligne donc l’importance d’une aide appropriée et accessible pour ces professionnels et leurs dirigeants.

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