Anne-Sophie Bailly

Dans les yeux rouges de la jeunesse (édito)

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Depuis quelques semaines, les jeunes sont au centre de toutes les préoccupations. Comment les aider? Les soutenir? Quel avenir proposer? Quelles perspectives leur donner? Et surtout: est-ce vraiment de vaccins dont les jeunes ont le plus besoin? L’édito d’Anne-Sophie Bailly, rédactrice en chef du Vif/L’Express.

Depuis quelques semaines, les jeunes sont au centre de toutes les préoccupations. Leur santé mentale mise à rude épreuve, leur difficulté d’accéder au marché de l’emploi, voire même de trouver un stage, leur besoin irrépressible de vie sociale, leur trop-plein d’écrans, pour certains leur manque de moyens financiers, pour d’autres leur décrochage scolaire avéré ou latent. Et pour tous, ce temps perdu au coeur de ce qu’on qualifiait encore il y a peu de plus belles années de leur vie.

Comment les aider? Les soutenir? Sont-ils plus mal lotis que d’autres? Quel avenir leur proposer? Quelles perspectives leur donner?

Le problème est devenu si aigu que mesurettes et propositions s’enchaînent. A commencer par la décision de reprise partielle et limitée des activités extérieures pour les 12-18 ans couplée à une réduction de la bulle des moins de 12 ans. Suivie de la proposition d’instaurer une « bulle de kot » pour les étudiants ou d’une allocation spéciale jeunes.

Et puis, tout récemment, l’idée de vacciner les jeunes. Prioritairement. Ou plus précisément, quand la vaccination à grande échelle débutera et donc après le personnel soignant et les personnes vulnérables, de les faire passer avant d’autres tranches de la population.

L’intention répond à au moins une demande des jeunes. Qu’on les entende, eux et leur détresse, et qu’on leur propose des solutions.

Néanmoins et pour louable qu’elle soit, l’idée véhicule son lot de questions. Quelles libertés accorder à ces nouveaux vaccinés? Comment continuer à gérer la transmission du virus? Et quid des autres, ceux qui attendent comme ceux qui se méfient? Est-ce la finalité d’un outil de prévention d’une maladie de devenir un laisser-passer pour la liberté?

Et surtout: est-ce vraiment de vaccins dont les jeunes ont le plus besoin et envie?

Evidemment, cette question de la priorisation ne se poserait pas si celle de la disponibilité était résolue. Or, à cause d’un manque de composants, de retards sur la chaîne de production voire de travaux de maintenance, AstraZeneca, Pfizer ou Moderna peinent à maintenir la cadence et à livrer les doses initialement promises. L’Europe a beau taper du poing sur la table, elle se montre très démunie face à ces big pharma, obligeant de facto tous les pays du Vieux Continent à revoir en permanence le calendrier de vaccination de leur population.

Et à relancer le débat autour du calendrier de vaccination.

Mais peut-on pour autant se permettre d’attendre jusqu’en juin – minimum – pour offrir de l’espoir à cette jeunesse aux yeux rouges dont la détresse est multiple et criante? Non. Et la réponse « vaccin » est à cet égard un peu courte. D’autres dimensions dont le soutien psychologique, le parcours scolaire ou l’avenir professionnel, un brin de légèreté aussi, doivent faire partie de la solution. Impérativement.

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