Les Belges passent en moyenne 1h34 par jour sur les réseaux sociaux selon un rapport de Global Web Index © BELGA

Faire une cure hors des réseaux sociaux, c’est bon pour le moral ?

Ludivine Ponciau
Ludivine Ponciau Journaliste au Vif

« A bientôt », « Je ressens le besoin de m’éloigner », « Je reviendrai plus tard », « Je veux échanger avec de vraies personnes », certains internautes expriment le besoin de se distancier des réseaux sociaux pour, disent-ils, préserver leur santé mentale. Quels sont les effets, réels ou présumés, de cette cure d’écrans?

Trop. Trop de photos brutales, d’infos anxiogènes, de commentaires agressifs, de pubs insistantes, de contenus bébêtes, de blagues douteuses, de chorégraphies loupées, d’influenceurs un peu trop influencés… Gavés de contenus, au bord de l’apoplexie, certains internautes tentent l’expérience de la déconnexion. Pour une semaine, un mois, un an, ils décident de se mettre en retrait des plateformes. Un peu comme ceux qui relèvent le défi de la tournée minérale en février ou du mois sans tabac.

Pour se mettre au vert, il leur faudra une volonté d’acier. Omniprésents dans notre quotidien, les réseaux sociaux constituent une part de plus en plus importante de nos interactions.

Les chiffres le prouvent. En 2022, Facebook comptait 8.546.600 utilisateurs en Belgique. Messenger un peu plus de six millions, soit près de la moitié de la population. Le réseau Instagram compte près de 500.000 profils actifs, tandis que TikTok capitalise 3,5 millions d’utilisateurs réguliers. Quant à YouTube, il comptait un peu plus de 7,5 millions d’utilisateurs Belges fin 2020, selon les statistiques internes à Google.

Le Belge est en outre un gros consommateur de contenus.  Le francophone moyen (de 18 à 64 ans) visionne chaque jour cinq heures et 37 minutes de vidéos en tout genre, indique une récente étude menée par Kantar.

Combien de temps passons-nous à scroller et à swiper? Selon un rapport publié en 2022 par Hootsuite, un outil de gestion de réseaux sociaux, les Belges passent en moyenne 1h34 par jour sur les différentes plateformes. Sans surprise, la génération Z se situe bien au-dessus de la moyenne, avec 4,5 heures.

Toujours selon ce rapport, les sites et les applications les plus consultés sur internet dans le monde concernent prioritairement les tchats et les messageries (95,7% des utilisateurs). Les réseaux sociaux suivent de près (95,2%).

Complètement addicts

Cette envie insatiable de consommer des contenus est le signe que nous sommes devenus ultra-dépendants des écrans. Pour le pédiatre et neuroendocrinologue américain Robert Lustig, auteur de plusieurs ouvrages sur l’industrie agroalimentaire dont « Fat Chance », cette addiction aux réseaux sociaux est comparable à celle qui nous pousse à manger toujours plus de sucre et de plats transformés.

Mais peut-on réellement se lancer dans une cure de réseaux sociaux comme dans une bonne diète après les fêtes de fin d’année?

Ces abstinences de courte durée ne font pas de miracle mais elles permettent tout de même de nous faire prendre conscience du lien de dépendance, estime Alexandra Balikdjian, thérapeute et psychologue de la consommation à l’ULB. « Les personnes qui observent le mois sans alcool vont assez vite ressentir les effets positifs, comme une meilleure qualité de leur peau et de leur sommeil. Mais les effets sur la santé, physique et mentale, restent difficiles à objectiver sur le long terme ».

Ca l’est encore plus avec les écrans. On sait en effet que les réseaux sociaux sont un facteur d’anxiété, mais évaluer l’impact d’une pause de quelques semaines ou de quelques mois sur le moral des utilisateurs ou sur leur santé mentale s’avère particulièrement complexe.

« Souvent, quand on dévoile aux utilisateurs le temps qu’ils ont passé sur les réseaux sociaux, ils se demandent comment ils ont pu consommer autant d’heures. En se mettant en pause, ils pourront tout de même se rendre compte qu’ils peuvent occuper tout ce temps différemment, en voyant plus de monde, en lisant ou en faisant du sport, par exemple. Par la suite, ils pourront aussi s’aider d’applis qui permettent de modérer sa présence en ligne ».

Car le lien qui nous unit à notre smartphone est si fort qu’une pause ne suffit pas à nous déshabituer. « Les réseaux sociaux, c’est quelque chose de très immersif, d’hypnotique. Cela nous permet de nous couper de l’extérieur, de ne pas entendre le conjoint qui râle, les enfants qui crient, de trouver des images qui nous plaisent et dans lesquelles nous pouvons nous projeter. Et avec les algorithmes, plus on en consomme, plus on nous en propose ». Reste à pouvoir dire « non, merci ».

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