L'e-cigarette pourrait être intéressante pour les fumeurs, mais elle reste bien évidemment un produit nocif pour les autres, souligne Stefaan Hendrickx. © Getty Images/EyeEm

« La cigarette électronique reste infiniment préférable à la vraie »

Si la cigarette électronique représente une alternative moins nocive aux produits du tabac traditionnels, le débat à ce sujet reste extrêmement complexe. Pourtant, elle pourrait apporter aux fumeurs de cigarettes de réels bénéfices.

Fin 2019, la presse américaine faisait ses choux gras des victimes d’e-cigarettes: décès de plusieurs dizaines de consommateurs et hospitalisation de milliers d’autres. Un décès avait également été rapporté en Belgique. Les victimes avaient probablement toutes utilisé des huiles illégales contenant du cannabis. « À l’époque, les informations relayées par les médias ont provoqué un vent de confusion et d’anxiété », commente Stefaan Hendrickx, spécialiste des produits du tabac à l’Institut flamand pour la promotion d’un mode de vie sain, qui suit de près les comportements tabagiques et la politique anti-tabac depuis une quinzaine d’années. « Dans ce cas, l’e-cigarette et l’e-liquide n’avaient pas été utilisés correctement, ce que l’on a souvent omis de préciser. De l’huile dans une e-cigarette peut provoquer de graves problèmes pulmonaires – une pathologie connue sous le nom de pneumopathie associée au vapotage (PAV) qui n’a jusqu’ici jamais été rapportée en Europe. Veillez donc à n’acheter de l’e-liquide que dans les points de vente officiels et évitez les mélanges illégaux, faits maison et ‘enrichis’. »

Avantages pour les fumeurs

Aujourd’hui, bien des fumeurs s’imaginent que l’e-cigarette est aussi nocive (voire plus) que la cigarette classique. C’est vrai, le vapotage n’est pas sans risques. Et s’il est moins nocif que le tabagisme proprement dit, ses effets exacts sur la santé restent controversés et son impact à plus long terme n’est pas (suffisamment) connu.

« Dans le débat de santé, le vapotage doit toujours être comparé au tabagisme, souligne Stefaan Hendrickx. L’e-cigarette pourrait être intéressante pour les fumeurs, mais elle reste bien évidemment un produit nocif pour les autres. Il est important ici de faire la distinction entre tabac et nicotine: nombre de fumeurs ignorent que cette dernière n’est pas la substance la plus nocive dans les produits du tabac. C’est elle qui provoque l’addiction, mais le vrai danger pour la santé réside surtout dans les milliers d’autres substances chimiques qui composent la fumée du tabac. L’objectif est donc d’arrêter de fumer le plus rapidement possible, par exemple en passant à l’e-cigarette. Celle-ci deviendra alors votre source de nicotine et pourra vous aider à vous sevrer progressivement. Vous n’obtiendrez un bénéfice de santé qu’en remplaçant complètement la cigarette par son équivalent électronique, pas en continuant à consommer les deux. Limitez donc le plus possible la période d’utilisation conjointe. À plus long terme, l’idéal serait d’abandonner aussi le vapotage. Néanmoins, si vous ne le voulez/pouvez pas, l’e-cigarette reste infiniment préférable à la vraie. »

Une récente étude Cochrane (2021) confirme que l’e-cigarette représente une aide efficace à la cessation tabagique. « N’hésitez pas à essayer cette approche si vous voulez arrêter de fumer. Elle est très efficace chez certains et peut aussi parfaitement se combiner avec les mesures d’aide reconnues. »

Les opposants au vapotage arguent que nombre de fumeurs qui vapotent finissent par revenir au tabac. « Peut-être, mais c’est vrai aussi pour les autres dispositifs d’aide à l’arrêt. Abandonner la cigarette est difficile et, jusqu’à l’arrêt définitif, il est normal de rechuter. »

Expérimentation

D’après l’Enquête de Santé réalisée en 2018 par Sciensano, 90% des consommateurs d’e-cigarettes belges fumaient déjà quand ils l’ont essayée. « En général, ces produits n’intéressent pas ou guère les non-fumeurs, souligne Stefaan Hendrickx. Cependant, les jeunes sont un groupe à surveiller de près: d’après les statistiques, ils s’essaient volontiers au vapotage ; cependant, ils deviennent plus rarement consommateurs réguliers. Rares sont donc ceux qui ‘accrochent’ à l’e-cigarette… et c’est une bonne nouvelle, car les jeunes ont tout intérêt à éviter la nicotine. Au-delà de son impact négatif sur le développement du cerveau, une addiction n’est jamais un bon départ dans la vie. On a aussi observé une relation entre le vapotage et le tabagisme dans ce public: d’après l’Organisation Mondiale de la Santé, l’existence d’un lien de cause à effet n’est pas démontrée. On sait simplement que les jeunes à risque fument et vapotent globalement davantage, vraisemblablement sous l’effet de facteurs de risque communs. L’e-cigarette accroît leur risque d’essayer la vraie, mais pas qu’ils deviennent des fumeurs (réguliers). »

La stratégie politique doit trouver un juste milieu entre les risques pour les jeunes et les opportunités pour les fumeurs, conclut l’expert: « De nombreux pays se focalisent sur le premier aspect, parfois au point d’interdire l’e-cigarette. D’autres comme le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande investissent au contraire beaucoup dans ce dispositif comme aide à l’arrêt. Des recherches réalisées en 2019 ont démontré que l’e-cigarette accompagne jusqu’à 70.000 fumeurs britanniques dans leur sevrage tabagique, alors qu’ils ne l’auraient pas fait autrement. »

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