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Libye: la solution Otan « ne fonctionne pas », les forces de Kadhafi se sont adaptées

Le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, a critiqué l’Otan, jugeant qu’elle ne jouait « pas suffisamment » son rôle contre les forces de Mouammar Kadhafi et pour protéger les civils.

« L’Otan doit jouer pleinement son rôle » et elle ne le fait « pas suffisamment », a dénoncé le chef de la diplomatie française, Alain Juppé. Elle doit détruire « les armes lourdes qui bombardent aujourd’hui la ville de Misrata », a insisté le responsable français qui veut évoquer ce sujet jeudi et vendredi lors d’une réunion ministérielle à Berlin avec ses homologues de l’Otan.

« L’Otan a voulu prendre la direction militaire des opérations, nous l’avons accepté », a rappelé M. Juppé, qui avait regretté en 2009 la réintégration militaire de la France dans l’Otan sans véritable contrepartie.

Cela fait près de deux semaines que l’Alliance atlantique, dominée militairement par les Etats-Unis, a pris les rênes des opérations militaires en Libye.

Le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, dont le pays a fortement influé pour cette prise en mains, a lui aussi appelé mardi l’Otan à « intensifier » ses efforts militaires.

Sur le terrain, le front est figé

Aujourd’hui, « le front sur le terrain est figé et il va le rester un certain temps », juge toutefois un responsable diplomatique français sous le couvert de l’anonymat. « Aucun des deux camps ne peut l’emporter. Les rebelles ne peuvent repartir à la conquête de l’ouest et les forces de Kadhafi, menacées de raids aériens, ne peuvent reprendre l’est », ajoute-t-il.

Près de quatre semaines après le début des premiers bombardements menés par la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis – qui se sont retirés depuis en partie des opérations -, force est de constater que la solution Otan « ne fonctionne pas », note Jean-Pierre Maulny de l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).

A cela, trois explications, selon lui: « un processus de décision lent » entre alliés dont certains sont opposés au recours à la force (Turquie, Allemagne), « l’absence d’adéquation entre les membres de l’Alliance et les intervenants », et le fait que « les Etats-Unis ne sont plus des participants actifs et représentent, consciemment ou inconsciemment, un frein pour l’Otan ».

M. Juppé, qui a affirmé récemment devant des sénateurs que la France et la Grande-Bretagne « n’avaient pas à eux seuls les moyens de piloter une intervention d’une telle envergure », n’a pas expliqué mardi d’où venaient les insuffisances de la plus importante alliance militaire au monde.

Pour la Libye, les alliés ont reproduit un scénario à l’afghane avec des engagements militaires « à la carte ».

Les forces de Kadhafi se sont adaptées

Certains pays participent à la surveillance aérienne du ciel libyen mais ne bombardent pas au sol, d’autres – comme la Belgique – acceptent des attaques mais sous conditions.

A la décharge de l’Alliance, des conditions très strictes ont été établies pour éviter tout « dommage collatéral civil » et il arrive souvent que les avions reviennent à leur base avec missiles et bombes. Ce qui n’a toutefois pas empêché l’Otan d’avoir commis au moins deux « bavures », avec des morts parmi les rebelles qu’elle est censée soutenir.

Le manque de résultats reproché à l’Otan vient aussi de l’adaptation des forces de Kadhafi à la nouvelle donne: ses troupes ont installé des chars dans des villes, utilisent parfois des boucliers humains, et ont recours à des véhicules tout-terrain rapides pour mener des coups de force. Sans troupes au sol, il est difficile à l’Otan de les parer.

Levif.be avec Belga

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