Le député N-VA Sander Loones, figure emblématique de l'opposition, a poussé la secrétaire d'Etat Sarah Schlitz (Ecolo) à la démission.

Sander Loones, l’homme qui fait trembler la Vivaldi: « Il sait où sont les failles potentielles du gouvernement » (portrait)

Elise Legrand
Elise Legrand Journaliste

Sander Loones, figure phare de l’opposition, a déjà deux victimes à son actif au sein du gouvernement De Croo. Fin connaisseur de ses dossiers, rigoureux, l’élu nationaliste originaire de Furnes sait repérer les brèches et s’y engouffrer.

On pensait sa carrière politique sur le déclin. Un temps considéré comme l’étoile montante de la N-VA, Sander Loones avait plutôt regagné l’anonymat des rangs parlementaires ces dernières années. Avant que son travail dans l’opposition ne le replace à l’avant-plan.

En novembre, d’abord. En repérant des irrégularités dans le projet du budget fédéral 2023, l’élu nationaliste sème la zizanie chez les libéraux flamands et contraint la secrétaire d’Etat Eva De Bleeker (Open VLD) à démissionner. Cinq mois plus tard, le parlementaire remet le couvert. Même stratégie, autre cible : il débusque des manquements dans l’utilisation du logo personnel de Sarah Schlitz et provoque un vent de panique au sein du cabinet de l’écologiste. Malgré des excuses répétées, la secrétaire d’Etat à l’Egalité des Chances fera finalement les frais du jusqu’au-boutisme du député et présentera sa démission quelques jours plus tard.

Ces deux épisodes, similaires en de nombreux points, témoignent d’une certaine obstination: l’Ouest-Flandrien a plutôt la réputation d’un homme de dossiers, moins de bagout. C’est d’ailleurs au sein du service d’études de la N-VA, en 2010, que le juriste de formation fait ses débuts en politique. Il y est repéré par Bart De Wever. Les deux hommes deviennent très proches, si bien que le président lui-même le désigne pour prendre les rênes du parti, en 2014. Une surprise, qui n’en restera qu’au stade de promesse, le bourgmestre d’Anvers préférant finalement rempiler.

Ministre pendant …. 27 jours

Sander Loones prend alors la direction de l’Europe. Il remplace au pied levé l’eurodéputé Johan Van Overtveldt, nommé ministre au fédéral, et navigue entre Bruxelles et Strasbourg durant quatre ans. En novembre 2018, Loones revient à la politique belge. Il profite de l’élection de Steven Vandeput comme bourgmestre à Hasselt pour être propulsé au fédéral au poste de ministre de la Défense. Il n’est en place que depuis 27 jours quand la N-VA décide de claquer la porte de la Suédoise, au terme de la saga du « Pacte de Marrakech ». Bon gré mal gré, il cède sa place au libéral Didier Reynders et n’emporte avec lui que le sombre record du mandat ministériel le plus court depuis le 19e siècle. Sander Loones disparaîtra ensuite progressivement des radars, avant de retrouver les bancs du Parlement fédéral comme député ordinaire en 2020.

« C’est l’homme fort de la N-VA sur les questions institutionnelles »

Véritable expert budgétaire de la N-VA, il siège en Commission Finances, où il dénonce à l’envi « l’amateurisme » de la Vivaldi dans la gestion de ses comptes. Mais le cheval de bataille de Sander Loones, c’est avant tout le confédéralisme. « C’est l’homme fort de la N-VA sur les questions institutionnelles », insiste Bart Maddens, politologue à la KULeuven. Fin 2013, il développe la théorie du confédéralisme du parti, qui deviendra une des marques de fabrique de la formation politique. Loones est lui-même un nationaliste convaincu. Il puise l’origine de ces valeurs dans ses racines familiales. « Son père, Jan, était député à la Volksunie, rappelle Bart Maddens. Il a le même profil. C’est-à-dire que pour lui, le communautaire reste la priorité absolue : il veut d’abord l’autonomie de la Flandre, avant de mener d’autres combats ».

Détermination et feeling politique

L’élu flamand jouit également d’une grande notoriété en Flandre-Occidentale, notamment dans le Westhoek. Résidant à Coxyde, où son père fut échevin jusqu’en 2018, il y dispose d’un large soutien électoral. « C’est quelqu’un qui ne veut pas paraître supérieur, illustre Bart Maddens. Il est assez aimable, ce qui est souligné par nombre de ses collaborateurs. Il connait les prénoms et les noms de tout le monde, ce qui n’est pas le cas de certains parlementaires qui mettent davantage de distance. »

Mais la clé de ses récentes victoires réside surtout dans sa rigueur et sa détermination. « C’est un politicien qui connaît ses dossiers sur le bout des doigts et qui donne du résultat, précise Bart Maddens. C’est le genre de parlementaires des années 1980 : ce n’est pas un homme de punchlines ou d’apparence. Il ne laisse rien au hasard. Il abat beaucoup de travail et étudie le fond.» Sander Loones dispose également d’un bon feeling politique. « Cela s’est vu dans les affaires Schlitz et De Bleeker : il sait où sont les failles potentielles du gouvernement et il en profite, observe Dave Sinardet, politologue à la VUB. C’est l’une des figures les plus efficaces dans l’opposition pour le moment. »

Une valeur sûre pour 2024

« Après sa courte carrière de ministre en 2018, on a eu l’impression qu’il allait disparaître de la circulation et que sa carrière s’arrêterait là, se souvient Dave Sinardet. Quand la N-VA n’est pas montée dans la majorité fédérale en 2019, il a dû se réinventer comme simple parlementaire dans l’opposition. C’est assez réussi finalement : il est parvenu à s’imposer et à rendre la tâche difficile au gouvernement. Il a clairement réussi à se refaire un nom. »   

« C’est l’une des figures les plus efficaces dans l’opposition pour le moment. »

De bonne augure pour 2024 ? « Il avait déjà les épaules pour être ministrable en 2018. Aujourd’hui, il a un profil encore plus complet qu’il y a cinq ans. C’est assez évident qu’il sera le premier choix de la N-VA comme ministre si le parti entre dans la majorité », conclut Bart Maddens.

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