Après Eva De Bleeker, la N-VA réussira-t-elle à faire tomber Sarah Schlitz ?

Sarah Schlitz, poussée à la démission par une stratégie sexiste de la N-VA ? (analyse)

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

En six mois, la N-VA s’est attaquée à trois des dix femmes qui composent la majorité Vivaldi. Après Eva De Bleeker et Ludivine Dedonder, la Secrétaire d’Etat à l’Egalité des chances Sarah Schlitz est la nouvelle cible féminine des nationalistes flamands.

À l’origine de la polémique du logo personnel de Sarah Schlitz, il y a Sander Loones, député fédéral N-VA. C’est déjà lui qui, en novembre 2022, avait précipité la chute d’Eva De Bleeker, alors secrétaire d’Etat au Budget (Open VLD). Un mois plus tard, le parti nationaliste tirait à boulets rouges sur une autre femme membre du gouvernement, la ministre de la Défense Ludivine Dedonder (PS). Theo Francken avait (entre autres) trouvé « peu approprié » que la socialiste enfile des baskets pour aller travailler.

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Le deuxième parti flamand du pays a-t-il une dent contre les femmes du gouvernement ? « Je ne sais pas si c’est une stratégie consciente de la part de la N-VA », analyse Emilie van Haute, chercheuse au Centre d’étude de la vie politique (Cevipol). « En tout cas, dans le chef du parti, certaines attaques sont plus débridées que d’autres. Les propos tenus sont parfois plus agressifs quand ils s’adressent à des femmes. Les critiques sont beaucoup plus axées sur les questions de compétences et visent à décrédibiliser leur travail. Les femmes sont attaquées personnellement, là où la critique se limite souvent au bilan politique pour les hommes ».

Stratégie sexiste de la N-VA ou travail d’opposition ?

Pour Jean Faniel, directeur général du CRISP, ces attaques répétées du parti flamand ont une autre explication, plus simple. « Je ne suis pas sûr qu’on puisse parler de stratégie sexiste de la N-VA. C’est l’un des principaux partis d’opposition, qui contrôle donc l’action du gouvernement. Et il n’est pas le seul. Le PTB est également au taquet dans les différentes assemblées pour dénoncer les abus (sur le dossier des pensions illégales à la Chambre notamment, ndlr) ».

Emilie van Haute partage ce point de vue, mais estime qu’on pourrait imaginer une stratégie sexiste de la N-VA. « C’est assez logique de vouloir déstabiliser le gouvernement. À un an des élections, les débats vont se tendre de plus en plus. Mais dans ce cas-ci, on cherche aussi à déstabiliser un membre du gouvernement en particulier, dans un parti (Ecolo) qui se place à la pointe sur ces questions (de transparence, ndlr) ».

Quoi qu’il en soit, c’est une stratégie à double tranchant pour la N-VA

Emilie van Haute, chercheuse au Cevipol

En dénonçant l’utilisation d’un logo personnel dans des dossiers publics par Sarah Schlitz, la N-VA s’est peut-être tiré une balle dans le pied. Ainsi, le Standaard a révélé que Zuhal Demir avait également utilisé son logo personnel pour des projets subsidiés, alors qu’elle occupait le même poste que la secrétaire d’Etat écologiste dans le précédent gouvernement. Bis repetita ? L’actuelle ministre flamande de l’Ecologie s’est défendue, refusant la comparaison dans le quotidien flamand : « La grande erreur de Mme Schlitz est d’avoir menti et trompé le Parlement et donc le peuple. Ai-je fait cela ? Non. »

Le précédent Zuhal Demir

Mais pour les deux politologues, les situations sont bien comparables. « Dans les deux cas, relève Emilie van Haute, on se trouve face à des pratiques limites, qui passent parfois sous les radars des mécanismes de contrôle existants. Cela réduit fortement l’idée que le contrôle des élus est efficace, et renforce l’image d’un monde politique pourri. Quoi qu’il en soit, c’est une stratégie à double tranchant pour la N-VA ». Selon Jean Faniel, le fait que les deux femmes politiques aient enfreint les règles sur les communications gouvernementales n’est peut-être pas une coïncidence. « Est-ce lié au département qu’elles ont toutes les deux occupé ? On peut l’imaginer car c’est un poste (secrétaire d’Etat à l’Egalité des genres, à l’Egalité des chances et à la Diversité, ndlr) qui amène à distribuer toute une série de subsides pour une multitude d’associations ».

Les révélations concernant Zuhal Demir, coup dur ou opportunité pour la formation de Bart De Wever ? La balle est dans le camp du parti nationaliste. « Soit la N-VA continuera à chercher des éléments à charge pour aggraver la situation de Sarah Schlitz, résume Jean Faniel, soit elle va s’arrêter là pour protéger Zuhal Demir, qui est l’étoile montante du parti. À moins qu’en interne, certains veuillent sa peau et profitent de cette histoire pour l’écarter de leur chemin… ».

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