Le ministre bruxellois des Finances, Sven Gatz (Open Vld). © Belga

« Pure folie »: pourquoi le budget bruxellois est le pire du pays

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

Malgré les efforts voulus par le ministre bruxellois des Finances Sven Gatz (Open Vld), le budget régional présente un déficit presque cinq fois plus élevé que celui de la Belgique.

Depuis le 15 octobre dernier, les détails du budget bruxellois sont connus. L’année prochaine, le déficit sera réduit de 150 millions d’euros par rapport à 2023. Un petit pas vers l’assainissement budgétaire, au vu des 600 millions d’euros d’économie initialement prévus. Plusieurs efforts ont été consentis: baisse des salaires (de 3%), des frais de fonctionnement (de 5%) et des investissements (de 10%). Pour autant, le manque à gagner – 950 millions d’euros – reste énorme, et montre le déséquilibre entre des dépenses toujours aussi gourmandes et des recettes insuffisantes.

« Bruxelles n’est pas en faillite », assure le ministre des Finances Sven Gatz (Open VLD), qui reconnait néanmoins que le budget n’est pas idéal. « Le train des dépenses est en marche, j’essaie de le freiner mais il n’est pas possible de l’arrêter pour le moment ».

Le budget bruxellois en difficulté

« Le budget bruxellois est le pire du pays, le seul qui ne redresse pas la barre malgré les mesures prises », commente Maxime Fontaine, chercheur en finances publiques à l’ULB. « Le déficit de la région s’élève à 25% : c’est quasiment 5 fois plus que celui de la Belgique ! Chaque année, un quart des dépenses à Bruxelles ne sont pas financées par le budget ».

En particulier, les investissements dans la mobilité (tunnels, trams, nouveau métro) pèseraient lourd sur les finances. Ce sont des investissements stratégiques décidés lors de la précédente législature, à hauteur de 500 millions d’euros par an. « Ils étaient intéressants au départ, car le taux d’emprunt était de 0%, développe le chercheur. Mais aujourd’hui on continue à financer ces projets, alors que les taux n’en finissent plus d’augmenter ». Ces investissements stratégiques ne se retrouvent pas dans le budget.

« La Cour des Comptes refuse de lire et de certifier les budgets parce qu’ils ne tiennent pas la route »

La situation se dégrade à un tel point à Bruxelles que la Cour des Comptes – qui contrôle les comptes des gouvernements – s’abstient depuis 3 ans de donner un avis sur la conformité des finances régionales bruxelloises. « En gros, résume Maxime Fontaine, la Cour refuse de lire et de certifier les budgets ne tiennent pas la route ».

« Selon l’agence Standard & Poor’s, le gouvernement bruxellois continue de maintenir les finances publiques sous contrôle« , réplique-t-on du côté du cabinet de Sven Gatz. Pour rappel, l’agence de notation a maintenu en mars dernier la notation AA – qui porte sur la solvabilité de la Région bruxelloise – avec une perspective négative.

« Pure folie »: le budget bruxellois agite la classe politique

Critiqué à gauche pour son austérité et à droite pour son manque d’ambition, le budget bruxellois n’a pas manqué de faire réagir l’opposition au gouvernement bruxellois. Le dossier agite aussi la majorité: cette semaine, le député DéFI Christophe Magdalijns a annoncé au Soir quitter le parti amarante. Il siégera désormais au parlement régional comme indépendant.

Critique de son parti depuis quelque temps, le député avait l’intention de rester dans les rangs de la majorité jusqu’à la fin de son mandat. Mais la situation budgétaire de la Région l’a incité à changer d’attitude. À ses yeux, l’augmentation de l’endettement public de celle-ci devient « pure folie ». Je ne veux pas partir sur un bilan où j’aurais donné un blanc-seing à une telle dégradation des finances publiques régionales. Je suis inspecteur des Finances. Dans mon métier, je prône la raison et le sérieux budgétaire, les équilibres, l’efficience et l’efficacité des politiques publiques. Et parce que je serais élu au Parlement, j’accepterais tout et n’importe quoi ? Parce que la politique budgétaire du gouvernement, c’est ça aujourd’hui », a-t-il expliqué.

DéFi réagit

DéFI a réagi dans la matinée en annonçant qu’un comité des sages du parti venait d’exclure le mandataire. L’intéressé faisait l’objet d’une procédure disciplinaire en raison de la création d’une liste dissidente à Auderghem, ce qui le plaçait en infraction à l’égard des statuts de DéFI. La décision devait lui être communiquée cette semaine. Aux yeux du parti, il a donc « habillé » cette exclusion due à un conflit local en « départ volontaire pour de grands principes ». Quant au refus de voter le budget, il étonne également les amarantes puisque le député a approuvé les quatre exercices précédents. Avec le départ de M. Magdalijns, DéFI ne compte plus que huit députés au parlement bruxellois. Durant cette législature, Ariane de Lobkowicz et Sadik Koksal ont rejoint le MR tandis qu’Emin Ozkara (ex-PS) a rallié DéFI.

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