Gérald Papy

L’euro est sauvé, pas l’Europe

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Il était moins une. En un week-end, les dirigeants européens ont réussi à rétablir la confiance des marchés dans l’euro que des semaines de tergiversations avaient sapée. Il a fallu que les 27 sentent passer le vent du boulet d’un krach boursier, le vendredi 7 mai, pour que les décisions que requéraient les métastases de la crise grecque soient enfin prises.

Par Gérald Papy

Concoctée vendredi soir par les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro, concrétisée dimanche par les grands argentiers des 27 et soutenue lundi par la Banque centrale européenne, la thérapie de choc repose sur un fonds d’assistance et de garantie de 750 milliards d’euros. Une réponse à la hauteur du défi auquel était confronté l’euro. La crise menaçait de devenir « systémique ». Pour preuve, le plan d’aide à Athènes, annoncé une semaine auparavant, n’avait pas réussi à brider les spéculateurs malveillants. Ce qu’il fallait sauver, c’était l’euro, la réalisation la plus palpable de la construction européenne. A l’aune de la réaction des marchés après l’annonce du plan de l’UE, l’opération de sauvetage est réussie. Mais l’avenir de l’Union économique et monétaire ne s’est pas pour autant complètement éclairci.

La réponse des 27 n’est que trop partiellement structurelle. Le fonds mis en place ne l’est que pour 3 ans ; il n’a pas encore l’architecture d’un Fonds monétaire européen permanent, sur le modèle du FMI. L’Union a certes progressé, de facto, sur la voie d’une gouvernance économique, mais la réflexion est loin d’être aboutie et même acceptée. Or, pour battre le fer quand il est chaud, pour transformer les atermoiements d’une crise en acquis concrets et durables, encore faudrait-il que les dirigeants des grandes puissances en expriment la volonté politique. Or les dernières joutes électorales n’en apportent pas les indices. Au contraire.

Même si la responsabilité du fiasco de la gestion initiale du dossier grec est partagée, la chancelière allemande Angela Merkel en sort perdante, et fragilisée, sur deux tableaux. Elle a vu son prestige européen écorné par sa frilosité, en partie justifiée par le comportement des anciens dirigeants grecs, à faire montre d’une grande solidaritéà l’égard d’Athènes. Et elle a néanmoins perdu, en Rhénanie-du-Nord – Wesphalie, une bataille électorale cruciale pour sa majorité au Bundesrat. La voilà donc tributaire du bon vouloir de l’opposition sociale-démocrate pour gérer la première économie européenne.

Le pronostic n’est pas nécessairement plus réjouissant au Royaume-Uni qui, s’il n’a pas adopté la monnaie unique, n’en est pas moins un acteur majeur de l’Europe des 27. Les élections du 6 mai y ont rebattu les cartes politiques. Mais, faute de vainqueur avec une majorité absolue, l’incertitude sur la mise en place d’une coalition solide et la perspective pas du tout farfelue d’un retour rapide dans les isoloirs ne plaident pas en faveur de la stabilité que réclamerait la résorption urgente du déficit des finances publiques. Car, s’il y a bien un enseignement à retenir de la crise de l’euro – dont pourra se prévaloir Angela Merkel – c’est celui-là : les Etats européens ont vécu au-dessus de leurs moyens et le temps est venu de la rigueur et, vraisemblablement, de l’austérité.

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