Steven Vandeput (N-VA), ministre de la Défense © Belga

La Belgique consacre près de 150 millions d’euros à de nouveaux satellites-espions

La Belgique va consacrer au total près de 150 millions d’euros à sa participation au programme français de satellites-espions de nouvelle génération, dont le premier des trois exemplaires doit être lancé avant la fin de cette année, a-t-on appris jeudi de sources concordantes.

Le ministère de la Défense est déjà l’un des partenaires de l’actuelle famille de satellites de reconnaissance militaire Helios II, dont deux engins tournent en permanence autour de la Terre pour fournir 24 heures sur 24 des images de haute résolution – la précision exacte relève du secret militaire. L’armée française parlant de « quelques dizaines de centimètres » et de « largement submétrique ».

Mais les deux satellites Helios II A et B, lancés respectivement le 12 décembre 2004 et le 18 décembre 2009, arriveront en fin de vie vers 2020. Paris a dès lors lancé un programme de remplacement baptisé CSO (Composante Spatiale Optique). Trois pays européens (Allemagne, Suède et Belgique) s’y sont associés pour financer, sous direction française, trois satellites plus performants, selon la Direction générale de l’Armement (DGA), qui dépend du ministère français des Armées.

En Belgique, la Politique scientifique (Belspo) a amorcé en 2013 la pompe des paiements pour concrétiser cette participation en versant 49 millions d’euros comme « ticket d’entrée » et afin d’obtenir des retours industriels. La Défense a enchaîné en décidant en septembre dernier d’investir 98 millions d’euros – 88 pour obtenir le droit de programmer de manière autonome les satellites afin d’obtenir durant douze ans des images exclusives et dix pour les travaux d’infrastructures, dont une nouvelle station-sol au centre satellitaire installé à Evere pour recueillir et traiter les images venues de l’espace, selon le cabinet du ministre de la Défense, Steven Vandeput.

Un tel investissement est inscrit dans la « Vision stratégique » préparée par M. Vandeput et approuvée en juin 2016 par le gouvernement, qui dessine les contours de l’armée belge à l’horizon 2030. Ce plan prévoit le maintien d’une capacité du renseignement via l’imagerie satellitaire (ou IMINT pour « Imagery Intelligence »).

Le système CSO comprendra trois satellites optiques identiques pesant 3,5 tonnes, à lancer entre fin 2018 et 2021. Ils survoleront la Terre sur des orbites polaires d »altitude différente, pour répondre à une double mission: celle de reconnaissance menée depuis l’altitude de 800 km et privilégiant les capacités de couverture, d’acquisition sur théâtre et de revisite et celle d’identification remplie depuis l’altitude de 480 km et permettant d’atteindre « le plus haut niveau de résolution, de qualité d’image et de précision d’analyse », selon Paris.

Les images obtenues par la Belgique seront utilisées par la Défense, mais aussi par d’autres services fédéraux, comme le SPF Affaires étrangères et la police fédérale, selon le cabinet de M. Vandeput (N-VA).

Le programme CSO avait au départ été lancé sous le nom de Musis (« Multinational Space Based Imaging System »). Cette désignation est encore utilisée en France, mais plus dans le sens initial. Il s’agissait alors de fédérer plusieurs composantes spatiales européennes y compris de l’imagerie radar, comme celle fournie par les satellites allemands SAR-Lupe. Seule subsiste finalement la composante optique française – entre-temps élargie à trois satellites -, a expliqué un spécialiste du dossier à l’agence Belga.

Selon lui, la participation belge ne se fera pas sur le même modèle que Hélios, qui prévoyait que chaque pays participant reçoive des images au prorata de sa contribution financière.

« Il s’agit ici d’acquérir des droits de programmation et d’une relation bilatérale (pour chaque partenaire). Nous serons (Belgique) donc propriétaires de notre segment sol mais pas des images », a-t-il souligné.

Le maître d’oeuvre du programme CSO est la DGA qui a donné délégation au Centre national d’Etudes spatiales (CNES) pour la réalisation du segment espace, dont le lancement et la recette en vol.

Airbus Defence and Space (ADS) France est chargé de la conception et de la réalisation des satellites, tandis que Thales Alenia Space France fournit l’instrument optique. ADS France est également maître d’oeuvre des différents segments sol utilisateurs, sous la responsabilité contractuelle directe de la DGA.

Un retour industriel belge à concurrence du montant investi par Belspo – une cinquantaine de millions d’euros – a été réalisé par le CNES.

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