Moutons abattage
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Abattage rituel sans étourdissement à Bruxelles: « Les animaux souffrent autant dans les différentes régions »

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

La Commission de l’environnement du parlement bruxellois vient de rejeter la proposition d’ordonnance sur l’interdiction de l’abattage sans étourdissement. Bruxelles sera-t-elle la seule région belge à autoriser l’abattage sans étourdissement, pratique interdite en Flandre et en Wallonie?

Mise sur la table par les partenaires de la majorité DéFI, Groen et Open VLD, la proposition a été rejetée, par 6 voix contre, 6 pour et 3 abstentions. Le PS et Vooruit, membres de la majorité, ne soutiennent pas la proposition. Idem dans l’opposition pour le PTB.

La proposition reviendra toutefois sur la table en séance plénière le 17 juin, d’abord sous la forme d’un vote sur les conclusions de la commission tendant au rejet de la proposition. Mais en cas de refus de ces conclusions, le débat sur l’ensemble de la proposition sera rouvert en séance, ce qui est loin d’être exclu.

Comme annoncé, le Vlaams Belang a retiré sa proposition pour éviter que le cordon sanitaire à son égard soit invoqué pour ne pas soutenir la proposition d’une partie de la majorité (DéFI-Groen-Open Vld) en faveur de l’interdiction.   En fin de séance, Cieltje Van Achter (N-VA) a également retiré la sienne. 

Un dossier qui divise

A Bruxelles, le dossier divise les partenaires de la majorité. Fin janvier, Défi, Groen et l’Open Vld ont déposé au parlement régional une proposition d’ordonnance qui vise à imposer l’abattage avec étourdissement préalable, même pour les rites religieux. Initialement, le PS bruxellois n’avait pas exclu de laisser la liberté de vote à ses députés. Au cours d’une réunion de groupe, à laquelle assistait notamment le président de la fédération bruxelloise Ahmed Laaouej, il a finalement été décidé de voter contre le texte alors qu’en Wallonie, le PS a voté pour.

Interrogé sur La Première, Ahmed Laaouej, président du groupe PS à la Chambre estime que la problématique de la souffrance animale est bien plus générale que l’abattage rituel sans étourdissement: « Il y a de la souffrance animale dans l’industrie de la pêche ou dans la chasse pour le gibier. Ce n’est pas parce qu’en Wallonie ils ont peut-être été un peu vite en besogne qu’on doit faire la même chose à Bruxelles. Nous souhaitons un dialogue apaisé, et pas une approche qui engendre une forme de fracture sociale » en matière d’abattage rituel, déclare-t-il.

« Les socialistes bruxellois optent résolument pour la souffrance animale »

Une décision « incompréhensible » a déjà réagi la N-VA qui a elle-même déposé au parlement de la Région de Bruxelles-Capitale un projet d’ordonnance visant à interdire l’abattage sans anesthésie. « L’attitude du PS bruxellois visant à empêcher l’obligation d’abattage avec étourdissement est incompréhensible. Ce faisant, les socialistes bruxellois optent résolument pour la souffrance animale », souligne le parti nationaliste dans une réaction envoyée à l’agence Belga.

« Les masques tombent en matière de protection animale. Texte rejeté », souligne pour sa part, sur Twitter, la députée MR Aurélie Czekalski. « La souffrance animale n’est pas à géométrie variable », ajoute la députée Alexia Bertrand (MR).

Du côté du CD&V, enfin, on s’étonne aussi de la position socialiste. « Je suis très surprise que le PS décide d’enterrer une proposition de trois partenaires de la majorité, avant même le début du débat parlementaire. C’est vraiment une drôle de manière de faire de la politique », indique la députée bruxelloise et ex-Secrétaire d’Etat au Bien-être animal Bianca Debaets. « On sait depuis longtemps qu’il existe des méthodes alternatives, acceptées d’ailleurs par de nombreux croyants. Et, voici quelques mois, la Cour de Justice européenne a décrété que cette interdiction de l’abattage rituel n’était pas contraire à la liberté de culte. Par respect pour le bien-être animal, il est désormais temps que nous évoluions une fois pour toutes dans ce dossier, au lieu de s’accrocher à des pratiques ancestrales et trop douloureuses », conclut-elle.

Selon les informations du quotidien De Standaard, Lotte Stoops (Groen) souligne qu’il ne faut pas rompre l’équilibre entre la liberté religieuse et le bien-être animal : l’abattage anesthésié épargnera la souffrance de milliers d’animaux. « Ceux qui disent que ce texte est une interdiction du halal, se trompent », a-t-elle déclaré à la commission. Elle souligne que les législations flamande et wallonne interdisent déjà l’abattage sans anesthésie et que Bruxelles ne devrait pas faire exception : les animaux souffrent de la même façon dans les différentes régions.

« L’issue de ce débat dira si la Région bruxelloise devient ou non une terre à part, où les considérations court-termistes et électoralistes prennent le pas sur les principes universels et progressistes », écrit François De Smet, président de Défi, dans une carte blanche parue sur Le Vif. « Nous – les partisans de l’obligation d’étourdissement, tous partis confondus –  avons de notre côté la science, le droit, et 70% des Bruxellois, en ce compris de nombreux concitoyens juifs et musulmans », souligne-t-il.

« Inacceptable du point de vue du bien-être animal »

Sans surprise, l’organisation de défense des animaux Gaia condamne l’issue du vote. Elle estime que « les membres de la Commission de l’Environnement et du Bien-être animal n’honorent pas les arrêts de la Cour de Justice de l’Union européenne et de la Cour constitutionnelle belge et n’ont pas suivi les avis de différentes associations de vétérinaires ainsi que les rapports scientifiques qui sont très clairs: l’abattage sans étourdissement est inacceptable dans tous les cas du point de vue du bien-être animal ».

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