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La Belgique se prépare à siéger au Conseil de sécurité de l’ONU, mais dans quel but?

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Ce lundi, Charles Michel accompagné d’une délégation ministérielle doit atterrir à New York pour participer à la 73ème Assemblée générale de l’ONU. La Belgique a obtenu au terme d’une longue campagne de siéger en tant que membre non permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies pour deux ans.

Dans le cadre de la 73ème Assemblée générale de l’ONU, le Premier ministre Charles Michel rejoint ce lundi à New York le ministre des Affaires Etrangères Didier Reynders sur place depuis vendredi.

Après avoir obtenu au mois de juin dernier un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité, la plus haute instance de l’ONU, pour la période 2019-2020, la délégation ministérielle poursuivra toute cette semaine son travail de préparation intense à l’exercice de ce mandat. De nombreuses rencontres sont prévues à différents niveaux. La semaine sera largement dominée par l’entrée imminente de notre Royaume dans le centre névralgique de la politique internationale.

La Belgique a obtenu avec 181 voix un siège non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, le Saint Grâle pour Didier Reynders et ses acolytes au terme d’un marathon diplomatique intense de plus de deux ans fait de dizaines de rencontres et de multiples voyages aux quatre coins de la planète. A partir du mois d’octobre, la Belgique sera conviée en tant qu’observateur à suivre les travaux du Conseil de sécurité avant de prendre effectivement place autour de sa prestigieuse table dès janvier 2019.

Outre le prestige qu’il représente, un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité est l’occasion privilégiée pour la Belgique d’apporter sa petite pierre à l’édifice pour le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde. Pour être élue par les membres de l’ONU, la Belgique a misé sur son profil de pays fondateur de l’organisation internationale avec des diplomates reconnus. De plus, la Belgique a résolument joué la carte de sa culture du compromis, un aspect très apprécié des milieux diplomatiques internationaux.

L’Allemagne, la Belgique, l’Afrique du Sud, l’Indonésie et la République dominicaine ont également été élues par l’Assemblée générale de l’ONU en tant que membres non permanents pour la période 2019-2020. Excepté la République dominicaine pour qui c’est une première, toutes ont déjà été membres du Conseil de sécurité à plusieurs reprises. La Belgique a déjà siégé pour la période 2007-2008.

Le Conseil de sécurité de l'ONU.
Le Conseil de sécurité de l’ONU. © REUTERS

Le Conseil de sécurité, ça sert à quoi?

Le Conseil de sécurité des Nations Unies est chargé du « maintien de la paix et de la sécurité internationale » par la Charte des Nations Unies. Plus haute instance de l’ONU, elle se compose de 15 membres, dont 5 permanents – Chine, Etats-Unis, Russie, Royaume-Uni, France – et 10 membres élus pour un mandat de deux ans.

Le Conseil de sécurité a le pouvoir de peser sur les grandes questions liées au maintien de la paix dans le monde. Si un État devient une menace sur la sécurité internationale, ses membres peuvent décider d’appliquer des sanctions. Contrairement à l’Assemblée générale, les résolutions que le Conseil vote sont contraignantes juridiquement. Elles sont ainsi capables de lancer des opérations sur le terrain.

Les membres non permanents, comme c’est le cas de la Belgique, disposent d’un droit de vote lors des prises de décisions. Une voix sur 15 donc. Cependant, lors de son mandat, la Belgique n’aura pas de droit de veto, qui est réservé uniquement aux membres permanents. Un siège de membre non permanent du Conseil de sécurité de l’ONU permet également de se positionner comme un acteur important dans l’ensemble des Nations Unies et faire entendre le point de vue plus général de l’Europe, dans le cas de la Belgique. Certains pays ont une voix plus prépondérante que d’autres, c’est le cas des États-Unis par exemple, dont les allocutions à la tribune de l’ONU sont toujours très attendues.

Dévoiler les priorités internationales du pays

Charles Michel inaugurera cette semaine onusienne par une réception donnée par le président américain Donald et son épouse Melania Trump. A son agenda chargé et à celui du ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders, figurent de nombreuses rencontres bilatérales, notamment avec leurs collègues des pays qui siégeront avec eux. La participation de membres du gouvernement à plusieurs « side-events » a comme objectif de dévoiler les priorités internationales du pays.

Lundi, le Premier ministre et le ministre Reynders se rendront à un sommet sur la paix organisé en l’honneur du centenaire de la naissance de Nelson Mandela. Dans le courant de la semaine, Didier Reynders participera à des évènements dédiés, entre autres, au sort des enfants dans les conflits armés et au droit international. Le Premier ministre sera présent à un déjeuner de travail sur la région des Grands Lacs. Mardi soir se tiendra un sommet sur le climat avec le président français Emmanuel Macron et l’ancien maire de New York Michael Bloomberg.

Le discours de Charles Michel à la tribune onusienne est prévu pour jeudi après-midi à New York, soit vers 20 heures en Belgique.

La Belgique se prépare à siéger au Conseil de sécurité de l'ONU, mais dans quel but?
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Trump l’imprévisible

Contrairement à ses homologues russe et chinois, Vladimir Poutine et Xi Jinping, le président américain se rendra à l’Assemblée générale des Nations unies en personne. Main de fer contre l’Iran, gant de velours pour la Corée du Nord, pour sa deuxième tribune à l’Assemblée générale de l’ONU, l’imprévisible Donald Trump est attendu avec circonspection par ses adversaires comme ses alliés. Il est connu pour être un critique notoire de l’ONU, il avait qualifié l’année dernière les Nations Unies de « club où les gens passent du bon temps ».

Mardi matin se tiendra l’ouverture du débat général de la 73ème session de l’Assemblée générale avec son allocution qui devrait donner le ton. L’édition précédente, Donald Trump avait traité le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un de « Rocket Man » (« homme fusée ») et avait fait la promesse « de détruire totalement » la Corée du Nord en cas d’attaque de ce pays. Cette année, l’heure est à la détente, avec une nouvelle rencontre envisagée prochainement entre les chefs de la diplomatie américaine et nord-coréenne.

Donald Trump pourrait cette fois s’en prendre à l’Iran. Son intervention et attitude seront scrutées avec attention en raison de son unilatéralisme peu orthodoxe après le retrait américain de l’accord de Paris sur le climat, de l’Unesco et de l’accord nucléaire avec l’Iran.

L’Iran en ligne de mire

Mercredi matin aura lieu un autre temps fort de la semaine avec une réunion ministérielle du Conseil de sécurité qui « attirera comme jamais l’attention », selon les dires de Nikki Haley, l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU. Comme d’autres chefs d’Etat américains en leur temps, Donald Trump présidera, marteau à la main, cette réunion de chefs d’Etat ou de gouvernement avec en ligne de mire l’Iran, bête noire de Washington accusée de déstabiliser le Moyen-Orient. La présence du président iranien Hassan Rohani n’est pas confirmée. La Belgique devrait pouvoir y siéger en tant que nouveau membre, avant qu’elle n’obtienne officiellement le statut d’observateur à partir d’octobre.

Par ailleurs, deux autres ministres fédéraux belges ont aussi fait le déplacement outre-Atlantique. Ainsi, Alexander De Croo, ministre de la Coopération au développement, se rendra au siège des Nations unies durant deux jours, notamment pour soutenir une initiative éducative de l’Unicef. Figure aussi à son agenda, la signature de nouveaux accords généraux avec la Guinée et le Rwanda.

La ministre de la Santé Maggie De Block traversera aussi l’Atlantique. Elle présentera notamment les pratiques belges sur la lutte contre la tuberculose lors du premier sommet international sur cette maladie dont l’épidémie est encore loin d’être éradiquée. Le milliardaire philanthrope Bill Gates sera l’une des têtes d’affiche de ce sommet qui se tiendra le 26 septembre en marge de l’Assemblée générale. Maggie De Block abordera également la problématique des maladies mentales et s’entretiendra avec la Fondation Born This Way de l’artiste Lady Gaga, association dont la mission est d’encourager tout individu dans l’expression et l’affirmation de soi.

La reine Mathilde accompagne également la délégation ministérielle belge à New York cette semaine. Elle effectuera une visite de trois jours au siège de l’ONU, en sa capacité de défenseur des objectifs de développement durable.

130 chefs d’Etat réunis

L’ouverture de l’Assemblée générale des Nations unies constitue chaque année la grand-messe de la diplomatie internationale. Le siège de l’ONU, transformé par la police en camp retranché dans l’est de Manhattan, et son secrétaire général, le Portugais Antonio Guterres, attendent environ 130 chefs d’Etat et de gouvernement – en hausse par rapport à 2017 -, quatre vice-présidents et plus de 40 ministres des Affaires étrangères. Pour la première fois, c’est une femme qui présidera l’Assemblée, la latino-américaine Maria Fernanda Espinosa.

Les priorités seront l’égalité des sexes, les pactes mondiaux sur la migration et les réfugiés, l’avenir du travail,…Une semaine de discours – un par pays, 193 nations formant l’ONU -, d’apartés et d’évènements en tous genres sont prévus: défense de l’éducation, lutte contre l’antisémitisme, le plastique qui pollue, la tuberculose, inauguration d’une statue de Nelson Mandela, discours cubain dans une église, show d’un groupe pop… Le climat, considéré par certains dirigeants comme la menace principale pour la planète, fera l’objet d’une mobilisation particulière.

Petits et surtout grands conflits, avec ou sans mission de paix de Casques bleus, seront comme chaque année au menu des discussions, du Sahel à la Birmanie, en passant par la Libye, la Centrafrique, la Somalie, le Proche-Orient, le Yémen ou le Venezuela.

Lire aussi: L’Assemblée générale de l’ONU en 7 chiffres

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