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Travailler assis sans y laisser sa vie

Plusieurs études voient dans le travail sédentaire un facteur de réduction de l’espérance de vie. De quoi terroriser les salariés de bureau et autres employés cloués sur leur siège à longueur de journée.

La nouvelle a de quoi faire pâlir le plus téméraire des salariés sédentaires, confortablement installé quelque huit heures par jour dans son fauteuil de bureau. Selon plusieurs études scientifiques anglo-saxonnes, travailler assis réduirait de plusieurs années l’espérance de vie. Ou en termes plus crus : travailler assis tue.
L’an dernier, l’American Cancer Society estimait que les personnes assises plus de six heures par jour avaient un taux de mortalité 20% supérieur – et jusqu’à 40% chez les femmes – à celui des salariés immobilisés moins de trois heures par jour. Début juillet, le British Medical Journal en a remis une couche, et une revue britannique proclamait plus largement mercredi que le manque d’activité physique cause un décès sur dix dans le monde.

« Les études qui concluent que le travail assis réduit l’espérance de vie mériteraient selon moi des contre-études », nuance Jean-Pierre Zana, ergonome à l’INRS, l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Mais quoi qu’il en soit « les conséquences négatives de l’inactivité sont réelles et connues depuis longtemps ».

Penché vers l’avant, le dos rond

Parmi elles, les troubles musculo-squelettiques, dont le mal de dos, qui toucherait un Français sur deux. « Les salariés qui travaillent assis en souffrent plus que ceux qui exercent debout », note Jean-Pierre Zana. S’y ajoutent des problèmes circulaires, voire cardiaques -« le coeur s’encrasse quand il n’est pas sollicité »- et même de possibles problèmes d’incontinence, liés, là encore, à des muscles laissés trop longtemps inactifs.

En première ligne, les employés de bureaux, les métiers qui reposent sur l’informatique -« secrétaires, salariés dans des salles de contrôle, traders, etc. »- mais aussi de l’industrie. Pour eux, la position assise peut être plus pénible que la station debout, car « elle oblige à se pencher vers l’avant, à faire le dos rond, précise Jean-Pierre Zana. Et à la différence du salarié debout, qui réclamera un siège au bout d’un certain temps, celui qui est déjà assis ne s’arrêtera pas de travailler. »

L’imprimante trop loin, un prétexte pour bouger

A moins de changer radicalement de vie professionnelle, le salut est plutôt à chercher du côté du pragmatisme. « On peut commencer par accepter les modifications entraînées par le contexte économique : une imprimante dans les couloirs plutôt que dans chaque bureau ? C’est l’occasion de rompre avec la position assise. Un open space qui empêche de parler trop fort ? Un prétexte pour se déplacer jusqu’à une salle de réunion. »

Plus extrêmes, des concepteurs se sont engouffrés dans la brèche en imaginant des postes pour travailler debout, voir juché sur un tapis roulant. Une partie des salariés de Google ou Facebook s’y seraient convertis.

Anecdotique et peu pertinent, juge toutefois Jean-Pierre Zana : « Nos études ont montré que le travail assis, debout et ‘assis-debout’ peuvent tous avoir des conséquences néfastes. Quelle que soit celle que l’on adopte, l’important est justement de varier entre ces positions, plus que de définir ce qu’est un bon ou un mauvais siège. »

Une philosophie que les entreprises auraient tout intérêt à développer. « Il serait bon qu’elles réfléchissent à ces questions pour des salariés qui exercent un travail entièrement sédentaire, explique-t-il. Des chaises et des bureaux à hauteur ajustable permettraient de changer de position en fonction des activités, de passer debout pour lire ou ‘assis-debout’ lors d’une rencontre avec un client. » Il paraît même que cette position intermédiaire renforcerait l’impression de dynamisme, permettant au salarié de mieux convaincre son interlocuteur.

Alexia Eychenne, L’Express.fr

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