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Supporters au temps du coronavirus: « J’ai économisé environ 2.800 euros cette année »

Ce maudit virus condamne les supporters les plus fanatiques à suivre les matches à la télévision. Troisième partie: Wilfried, supporter des Diables rouges.

Wilfried Thelen (66 ans) habite Saint-Vith, à proximité de la frontière allemande. Il est toutefois supporter d’Anderlecht depuis son plus jeune âge. En 2011, il s’est laissé tenter par les Diables rouges. Il a assisté à un match de qualifications pour l’EURO 2012, contre la Turquie. « Le match durant lequel Axel Witsel a botté un penalty en visant la boule la plus haute de l’Atomium. » 1-1. La déception totale. Wilfried: « Mais qu’a dit Vincent Kompany? Nous allons gagner en Allemagne. » J’ai trouvé ça génial.

L’enthousiasme de Wilfried s’avère contagieux. Car l’homme remplit cinq bus à destination de Düsseldorf. Les Diables s’y inclinent 3-1, mais le déplacement se déroule dans une ambiance formidable. Le club de supporters Rote Teufel Sankt Vith était né et n’allait pas se cantonner aux germanophones. « On fait ça à la belge », raconte Wilfried. « On attire aussi des francophones de Malmédy, par exemple. Après tout, le pluralisme est le plus beau trésor de notre pays. »

Le patriotisme de Wilfried atteint son point culminant en 2014, quand il se décide à peindre la façade de sa maison en jaune et rouge, sachant que le toit était déjà noir. Les autorités locales estiment cependant qu’il enfreint certaines règles. L’affaire passe devant le Conseil d’État, mais Wilfried ne s’avoue pas vaincu, même s’il a déjà déboursé 4.000 euros en frais d’avocat.

Le football sans public, c’est comme des patates sans sel. Ce n’est pas aussi bon.

Wilfried, supporter des Diables rouges

Cette année, à cause de la pandémie, Wilfried a passé plus de temps qu’il ne l’aurait souhaité dans sa maison tricolore. Avec quand même un effet positif: il a rééquilibré ses finances. En temps normal, il ne manque aucun match des Diables, qu’ils se produisent à Bruxelles ou à l’étranger. « Vols compris, ça représentait environ 2.800 euros cette année. Sans compter les boissons. » ( Rires)

Wilfried boit maintenant en famille. Avec un appareil important: une tireuse de bière. « Un soir de match, avec mon fils et sa femme, nous en tirons douze litres. » Convivial, donc. Mais très différent de la vraie vie d’un supporter. « Elle me manque terriblement. Ces démarches sans fin pour procurer le bon billet à chacun, les longues heures en car, les danses dans le couloir trop étroit. » La nostalgie s’empare de lui et d’autres. « Récemment, un copain m’a demandé de lui envoyer le film tourné au retour du pays de Galles. Nous avions perdu, mais nous avions fait la fête sur le ferry. »

La moitié des personnes qui voyagent normalement avec le club de supporters ne regardent pas les matches à la télévision, raconte Wilfried. « Parce que ce n’est pas le football qui les attire, mais l’ambiance et les rencontres inattendues qu’on fait sur le dernier bout de chemin jusqu’au stade. Je pense à ce chauffeur de taxi bosnien avec son minibus orange. Nous avons fait sa connaissance à Sarajevo. C’est un homme de 75 ans, qui doit vivre et entretenir son fils et sa fille avec 300 euros par mois. Il n’avait encore jamais quitté son pays. Nous l’avons donc invité, en compagnie de son fils, à venir en Belgique quand la Bosnie se produirait à Bruxelles. Nous avons payé leur vol. Ils ont logé chez moi pendant cinq jours. Nous avons rendu visite à ma mère, car ils avaient un cadeau pour elle. Le jour du match, nous sommes allés ensemble au Heysel. Des rencontres comme celles-là représentent une part importante du football. Pourvu que tout redevienne vite comme avant. Car le football sans public, c’est comme des patates sans sel. Ce n’est pas aussi bon. »

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