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Polyamour: « Quand mes partenaires ont eu un rendez-vous sympa, je suis contente pour eux »

Elisa Schanzer
Elisa Schanzer Collaboratrice Knack.be

Avoir plusieurs partenaires alors que tout le monde est au courant, cela fonctionne-t-il? Qu’en est-il de la jalousie et d’un éventuel désir d’avoir des enfants ? Notre consoeur de Knack a interrogé quelques adeptes du polyamour sur leurs relations.

Kristen* (23 ans) a deux amoureux: un ami et une amie. Ils vivent tous ensemble dans la même maison. Ils sont tous deux aussi importants pour elle, il n’y a pas de hiérarchie au sein de leur relation. « Ma famille ignore que je suis polyamoureuse, et donc je vais aux réunions de famille avec mon ami. Sur le plan administratif aussi, mon ami est officiellement mon partenaire. Mais tous mes amis et certains collègues savent que j’ai deux relations. »

Les partenaires de Kristen n’ont pas de relation entre eux. « Nous avons une relation en V : je suis en dessous et mon ami et mon amie sont au bout, mais ils ne sont pas liés entre eux. C’est différent du triangle amoureux. « Les trois ont également une relation ouverte, ils sortent aussi avec d’autres personnes. Mais nous n’essayons pas vraiment d’élargir notre relation. Nous sommes une petite famille. »

Kristen et ses partenaires sont polyamoureux. La polygamie et la polyamorie sont deux choses différentes : la première part d’un mariage (généralement religieux) où une personne est mariée avec plusieurs personnes, alors que la deuxième concerne une relation amoureuse et peut adopter plusieurs formes où tous les partenaires peuvent avoir des partenaires différents.

Pour le sexologue Wim Slabbinck, le polyamour peut fonctionner pour certaines personnes. « Le polyamour n’est pas réservé à tout le monde, tout comme la monogamie ne l’est pas à tous. Pour moi, une bonne relation n’a rien à voir avec la forme, mais elle doit provenir d’un choix délibéré. Si on étudie la qualité rationnelle et la stabilité des relations polyamoureuses, on voit qu’elles sont comparables aux relations monogames. Et quand on regarde le bien-être psychologique de ces partenaires, il est comparable à celui de personnes dans une relation non monogame. »

Il y a deux ans et demi, Hanne* (26) et Joachim* (35) ont choisi délibérément d’entamer une relation polyamoureuse libre. Hanne sortait d’une relation étouffante et ne voulait pas perdre sa liberté, mais elle éprouvait des sentiments pour Joachim. « C’est lui qui a parlé de polyamour, avant, je ne connaissais pas du tout. Comme c’était bien de se donner cette liberté, nous avons commencé », explique Hanne.

Dans le cas de Hanne et Joachim il y a une hiérarchie: leur relation forme la base, depuis peu ils sont même fiancés. « Nous sommes ouverts à la fois aux sex-friends, aux rencontres avec d’autres couples comme nouveaux partenaires romantiques. Pour nous, cela peut se faire séparément ou ensemble », déclare Hanne.

Pour tous les deux, c’était la première fois qu’ils tentaient la relation polyamoureuse. « Lors de mes relations précédentes, j’avais le sentiment que quelque chose me manquait », se rappelle Joachim. « C’était toujours bien avec mon amoureuse, mais il me manquait quelqu’un d’autre. Pas uniquement sur le plan sexuel. Je voulais aussi pratiquer des activités sociales avec quelqu’un d’autre, sans que mon amie me regarde de travers. »

Il y a une différence entre relation libre et polyamour, même si certaines personnes intègrent les deux dans leur(s) relation(s), telles que Hanne et Joachim. Dans le cas d’une relation libre, on fait l’amour avec d’autres personnes, sans qu’il soit question de sentiments. En cas de polyamour, il y a un lien plus profond, il s’agit de relations amoureuses avec plusieurs personnes.

Les bons accords font de bonnes relations

« Le dialogue avec son partenaire et ses partenaires et le respect sont très importants en polyamour », raconte le sexologue Slabbinck. « Grâce à cette ouverture, tous les partis demeurent informés de l’état de la relation. Je trouve absurde que quand on va habiter ensemble, on décide de plein de choses, mais qu’on ne s’interroge jamais sur sa position envers la monogamie ou une autre forme de relation. »

Lars* (31 ans) est d’accord avec Slabbinck. Lars et sa femme sont ensemble depuis treize ans et ils ont deux petits enfants. Ils trouvent important de communiquer ouvertement et d’en informer l’autre si l’un des deux a l’intention d’aller plus loin. « Il n’y a que d’un baiser qu’on ne s’informe pas l’avance, car il faut admettre qu’au niveau logistique, c’est difficile. « Oui, attends, je voudrais t’embrasser, mais je vais d’abord appeler ma femme ».’ (rires)

« Par ailleurs, nous avons également décidé qu’au cas où notre relation ne serait pas au beau fixe, on attendrait d’entamer d’autres liaisons. Entamer une nouvelle relation alors qu’on est frustré n’est pas bénéfique à la première relation. »

Kristen a également passé un accord avec ses partenaires. Quand quelqu’un a un rendez-vous avec d’autres personnes, on communique à l’avance. « Si l’un de nous a un premier rendez-vous avec quelqu’un, il ne peut pas avoir de contact physique ou intime. On souhaite connaître les autres partenaires de chacun. Le but n’est pas de faire des rencontres et de faire l’amour sans en informer les autres. Quand mes amoureux rentrent et disent qu’ils ont eu un rendez-vous sympa, je suis très contente pour eux. Je trouve sexy qu’ils aient rencontré d’autres personnes. »

Le monstre aux yeux verts

Qu’en est-il de la jalousie? Kristen et ses partenaires n’en souffrent pas. « J’ai un tout autre type de relation avec mon ami qu’avec mon amie, ce qui empêche la jalousie. Nous avons une intimité et une sexualité différentes. Chacun partage sa partie. Pour dormir, il n’y a pas de problèmes non plus. Comme mon amie tient fort à son intimité, cela ne lui pose pas de problème que je dorme avec mon ami, et parfois je la rejoins. »

« Nous avons perdu des amis »

« Le polyamour, c’est tromper », « les relations polyamoureuses ne sont pas équivalentes aux relations monogames » ou « les polyamoureux couchent avec tout le monde » ne sont que quelques préjugés qui circulent à propos du polyamour.

Quand Lars et sa seconde amie ont rompu, tout le monde ne comprenait pas que cela lui fasse de la peine. « Certains amis masculins qui m’avaient félicité avec mes deux amies ne comprenaient pas que j’avais le coeur brisé. Manifestement, ils voyaient ma seconde amie comme ‘secondaire’. Mais elle n’était pas secondaire, c’était une relation à part entière, et donc j’étais évidemment triste que ce soit fini. »

Les amis de Lars, certains membres de sa famille et même quelques collègues savent que Lars est polyamoureux. Pour la plupart des gens, cela ne pose pas problème, mais lui aussi a perdu des amis qui ne comprenaient pas son choix. « Cela fait mal de perdre des amis. Ils n’arrivaient pas à accepter notre choix et essayaient d’imposer leur point de vue. »

Pour sa part, Hanne n’ose pas raconter à sa famille qu’elle est polyamoureuse. « Une des raisons pour lesquelles ma famille n’est pas au courant, c’est parce que j’ai peur des préjugés, et parce qu’ils sont conservateurs », raconte-t-elle. « Je constate aussi que d’autres gens ont des préjugés. Quand je dis à certains hommes que je suis polyamoureuse, et surtout dans le cadre de rendez-vous, je vois qu’ils pensent que je suis une fille facile. Ce qui n’est pas le cas. Ce n’est pas parce que nous sommes ouverts à tout que nous acceptons tout. »

Enfants

« Mais que feras-tu si tu veux des enfants ? » est une des questions les plus posées aux polyamoureux sans enfants. Lars a des enfants avec sa femme.

Lars a deux jeunes fils avec sa femme. Au début de leur relation, ils étaient monogames, mais il y a deux ans, ils ont décidé de faire entrer d’autres personnes dans leur vie. Lars ne veut pas d’enfants avec une autre femme. « Mes enfants voient parfois nos partenaires, mais ils ne savent pas que nous sommes polyamoureux. Ils trouvent ces personnes aimables, surtout aux fêtes, parce qu’ils reçoivent plus de cadeaux » (rires). « Pour moi, les enfants viennent en premier lieu. C’est ce que je dis aussi aux partenaires potentiels. Si c’est un problème, je ne me lance pas avec eux. »

« Un jour, on m’a dit que le polyamour faisait du mal à mes fils. J’ai culpabilisé pendant des semaines », se rappelle Lars. « Un jour, j’ai réalisé qu’ils avaient des amis, qu’ils travaillaient bien à l’école, et qu’ils mangeaient tous les jours. Je pense que je les élève bien. Je ne pense pas que le polyamour sera leur perte. »

*Les prénoms ont été changés pour garantir l’anonymat.

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