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La douche quotidienne, habitude sociale ou mesure d’hygiène indispensable ?

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Près de la moitié des Belges prennent une douche tous les jours : habitude dictée par les conventions sociales ou indispensable pour une bonne hygiène ? Analyse.

À en croire une enquête iVox réalisée à la demande du fabricants de sanitaires Grohe, près de la moitié des Belges équipés d’une douche s’en servent tous les jours, voire plusieurs fois par jour. 18% d’entre eux prennent une douche tous les deux jours.

Interrogé par le quotidien De Morgen, le dermatologue Jan Gutermuth (UZ Brussel) affirme que beaucoup de gens se douchent uniquement par convention sociale. « Dans notre société, l’odeur corporelle est perçue comme sale. Surtout pour ceux qui sont en contact professionnel avec des clients ou qui vont tous les jours au bureau». Aussi conseille-t-il ne de pas prendre de douche tous les jours.

Réduire le nombre de douches serait non seulement bénéfique pour la planète, mais aussi pour la santé, car l’eau dessèche la peau, un phénomène qui peut paraître paradoxal. « La peau, en surface, renferme un film hydrolipidique qui la protège et qui contient du sébum et la couche cornée, la kératine. Ce film se reconstitue tous les jours et constitue une véritable protection, notamment contre les bactéries. Les contacts répétés avec l’eau vont fragiliser cette barrière et la peau. Si l’on prend plus que, par exemple, une douche par jour, le film hydrolipidique n’a pas la possibilité de se reconstituer » , explique Pierre Vereecken, dermatologue (CHIREC et CLIDERM).  

Un excès d’eau

Pour restaurer le film hydrolipidique altéré par l’eau, les dermatologues conseillent d’appliquer une crème hydratante après la douche. « Nous avons parfois des patients qui nous consultent simplement parce qu’ils se grattent et finalement les interrogeant, il s’avère qu’ils n’ont pas de problème dermatologique particulier, c’est juste un excès d’eau qui contribue à faire apparaître ces symptômes », ajoute Pierre Vereecken.

L’eau n’est pas l’unique responsable de la détérioration du film hydrolipidique: certains savons peuvent également irriter la peau. Ex-chef du service dermatologie des cliniques universitaires Saint-Luc, le professeur Dominique Tennstedt conseille d’utiliser un savon doux. « Il faut éviter les savons trop basiques, et en particulier les anciens savons qui contiennent beaucoup de soude ». Il insiste également sur la nécessité de bien rincer la peau et les muqueuses, les traces de savon étant irritantes pour la peau.

Pour Dominique Tennstedt, cela ne signifie pas qu’il faut faire l’impasse sur la douche quotidienne. « Il me semble évident qu’il faut prendre une douche par jour. Voire deux pour des gens qui transpirent beaucoup. Pour ces personnes, il n’y a pas d’inconvénients à se doucher une à deux fois par jour ». Il conseille toutefois de ne pas s’attarder trop longtemps sous la douche et de ne pas régler l’eau à une température trop élevée.

Eczéma

Certains patients ont plus intérêt que d’autres à réduire leur temps de contact avec l’eau, notamment les enfants atteints de dermatite atopique, une affection qui concerne 10% d’entre eux. « Ils sont beaucoup plus à risque de développer une fragilisation de la peau, et d’aggraver leur eczéma. Et c’est d’ailleurs le premier conseil que l’on va donner en consultation, c’est de réduire le temps de contact avec l’eau, voire même, pour les tout-petits, de ne pas laver l’enfant tous les jours », explique Pierre Vereecken.

Bien entendu, les adultes peuvent également souffrir d’eczéma ou de psoriasis, une maladie de la peau qui se manifeste en général par des plaques ou taches rougeâtres recouvertes de squames. « La fragilisation de la peau va certainement contribuer à ce que des patients qui sont prédisposés génétiquement voient leurs problèmes dermatologiques empirer. Là aussi, nous allons leur conseiller de réduire le temps de contact avec l’eau ».

L’excès d’eau n’aggrave pas seulement l’eczéma ou le psoriasis, il peut également entraîner d’autres complications. « Quand il y a une fragilisation du film hydrolipidique de la peau, il peut y avoir des complications infectieuses. Les enfants se verront atteints de mollusca ( NDLR : lésions dermatologiques contagieuses induites par un virus) par exemple, ou des infections à staphylocoques. Les mycoses aussi sont souvent générées par des humidifications prolongées, par le fait que l’on ne se sèche pas suffisamment certaines parties du corps, comme les pieds. Il faut donc repenser l’hygiène à la lumière de ces données biologiques », conclut Pierre Vereecken.

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