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Comment prendre soin de son foie?

Ludivine Ponciau
Ludivine Ponciau Journaliste au Vif

L’ alcool n’est pas le seul ennemi du plus imposant de nos organes. La graisse, les médicaments et certains aliments lui mènent aussi la vie dure.

C’est l’organe le plus volumineux et le plus lourd de notre corps. Pourtant, il ne se plaint jamais lorsqu’il est en souffrance. C’est bien la première chose à savoir sur lui: l’absence de douleur n’est jamais une garantie du bon fonctionnement d’un foie. Les pathologies qui viennent le plus spontanément à l’esprit lorsqu’on évoque la santé de cet organe sont évidemment la cirrhose et ce à quoi elle mène lorsqu’elle dégénère, le cancer. Or, un autre fléau, bien plus répandu encore, touche nos sociétés occidentales: la stéatohépatite non alcoolique, aussi appelée Nash (Non-Alcoholic SteatoHepatitis) mais plus connue encore sous le nom de maladie du foie gras. Liée à la malbouffe, elle affecte déjà 20% à 30% de la population belge et est régulièrement détectée chez les personnes obèses ou celles qui présentent un syndrome métabolique, soit une surcharge pondérale abdominale, de l’hypertension, un taux de cholestérol trop élevé, etc. «Dans la grande majorité des cas, note le Pr Christophe Moreno, hépatologue à l’hôpital Erasme, cette pathologie reste bénigne. Mais chez une petite partie de ces patients, qui ne présentent pas seulement de la graisse dans le foie mais également une inflammation (hépatite), on peut voir apparaître un phénomène de fibroses, soit des cicatrices susceptibles, si elles sont trop importantes ou trop nombreuses, d’évoluer vers la cirrhose. En général, le cancer ne se développe d’ailleurs que chez les patients qui ont une cirrhose ou une précirrhose.» Sans surprise, l’alcool est la première cause d’une cirrhose grave nécessitant une transplantation.

Des gammas GT au top?

Comment dépister les maladies hépatiques, étant donné qu’elles sont asymptomatiques? Une prise de sang permettant de vérifier certains marqueurs comme le taux de gamma-glutamyl transférase (GGT) est un bon début mais, met en garde Christophe Moreno, un taux normal de gamma GT ne signifie pas forcément que le foie est en parfait état. «Le taux de transaminases peut augmenter parce que vous avez beaucoup bu pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois puis redescendre lorsque vous faites plus attention. Vous êtes alors faussement rassuré étant donné que les résultats de votre prise de sang ne vous indiqueront pas si votre foie présente de nombreuses cicatrices ou pas. La meilleure chose à faire, c’est de réaliser un dépistage au moyen d’une élastographie (NDLR: sorte d’échographie permettant d’évaluer l’élasticité du foie, celui-ci se durcissant lorsqu’il est malade) sur les patients présentant des facteurs de risque. L’ examen permettra de détecter ces fameuses fibroses, de voir s’il y a de la graisse dans le foie. Un bilan hépatique sanguin permet également de déceler la présence de lésions.»

Si aucun symptôme ne peut vous mettre la puce à l’oreille, d’autres signaux comme le jaunissement du blanc des yeux, signe d’une accumulation de bilirubine dans le sang, peuvent attirer votre attention.

L’effet protecteur du café

Soigner son foie avec des aliments ou des plantes qui le soulageraient – artichaut, radis noir, chardon- Marie –, est-ce une bonne idée? Aucun aliment ne «soigne» un foie malade, prévient encore le gastroentérologue. Le seul moyen de le préserver est d’éviter l’alcool et les aliments riches en sucre et en graisse. Aucun miracle à attendre non plus avec les compléments alimentaires ou les cures détox. Certains aliments, comme le riz rouge à qui on attribue la propriété de faire baisser le cholestérol, sont même potentiellement toxiques pour le foie. «Le seul qui ait montré un bénéfice chez les patients présentant des facteurs de risques, c’est le café. Les personnes qui en consomment au moins trois tasses par jour présentent moins de risques de développer une cirrhose que celles qui n’en boivent pas.»

Autre point d’attention: les médicaments, comme le paracétamol. Sa surconsommation ou sa prise régulière peut provoquer des hépatites aiguës très dommageables. «Tout ce qui est ingéré passe et est métabolisé par le foie. Or, il y a toujours un risque potentiel de toxicité. On sait, par exemple, que la première cause de toxicité médicamenteuse et de retrait d’un médicament du marché, c’est son effet sur le foie». Mollo sur l’alcool comme sur le paracétamol, donc. D’autant que les deux vont parfois de pair…

30%

La maladie du foie gras toucherait aujourd’hui jusqu’à un tiers de la population belge. Liée à nos habitudes alimentaires, elle concerne surtout les personnes en surpoids ou qui présentent certains facteurs comme un excès en cholestérol ou une tension trop élevée.

Une molécule prometteuse

Selon une étude randomisée à laquelle a participé l’hôpital universitaire d’Anvers et dont les résultats ont été publiés, en octobre 2021, dans The New England Journal of Medecine, le candidat médicament Lanifibranor s’est révélé prometteur dans le traitement de la maladie de Nash. L’étude clinique native de laquelle sont tirés ces résultats a démontré pour la première fois une combinaison de la résolution de la Nash et d’une amélioration de la fibrose hépatique avec la molécule prometteuse.

Pour aller plus loin

Quelles astuces mettre en place pour éviter de développer la maladie du foie gras? Comment notre foie se régénère-t-il et comment l’aider à réaliser cet exploit? S’appuyant sur les dernières découvertes médicales, Gabriel Perlemuter, chef du service d’hépato-gastro-entérologie et nutrition à l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart (Paris), dévoilait, en 2018, Les Pouvoirs cachés du foie (Flammarion).

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