Anne-Sophie Bailly

bpost: le pire reste-t-il à venir?

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Après les accords litigieux sur la distribution de journaux et les contrats de consultance chez McKinsey, quel grand déballage risque encore de faire trembler bpost?

Impossible de dire où et quand ça s’arrêtera, mais les déboires de bpost semblent s’accumuler sans fin. Ce constat publié il y a quelques semaines reste d’une désolante actualité.

Après la découverte de contrats litigieux pour la concession de la distribution de journaux, des audits insuffisamment pris en compte, des comptes plombés par l’incertitude et des soupçons de surfacturation pour des services rendus pour le compte de l’Etat, les révélations sur les pratiques en vigueur au sein de l’entreprise postale continuent de tomber. S’ajoutent désormais à la liste des contrats de consultance octroyés à McKinsey sans appel d’offres préalable et pour plusieurs millions d’euros.

En marge de ces dysfonctionnements majeurs, un autre dossier étroitement lié: la présence au sein du cabinet de la ministre des Entreprises publiques, Petra De Sutter (Groen), de deux travailleurs détachés de bpost et payés par l’entreprise postale.

On sait que cette pratique est courante et légale. Qu’elle trouve son origine dans le besoin des cabinets ministériels d’attirer des compétences techniques, une expertise, un réseau de contacts. Qu’elle s’explique aussi par le besoin de sécurité du travailleur qui n’accepterait de rejoindre temporairement le monde politique qu’à condition de retrouver son emploi en fin de législature.

On sait aussi que cette pratique reste éthiquement discutable. Comment, en effet, garantir l’indépendance d’un collaborateur détaché tiraillé entre sa mission à durée déterminée pour son ministre de tutelle et son employeur au long cours? Qui plus est quand ledit employeur est tout à la fois une société commerciale et une entreprise de service public. Que privilégier dans les orientations proposées: la maximisation du profit ou la mission de service public? Surtout: qui prend en charge la rémunération?

Rien ne laisse présager qu’on soit déjà au bout du grand déballage.

«C’est une mauvaise pratique du passé», a d’ailleurs admis Petra De Sutter. L’écologiste plaidant même pour une modification de l’arrêté royal relatif aux détachements pour en exclure les entreprises cotées. Car si il «fait partie du passé», ce procédé reste largement employé. Et le cas de bpost est loin d’être isolé. On compte par exemple des travailleurs détachés d’Infrabel, de la SNCB ou de Skeyes au sein du cabinet de la Mobilité de Georges Gilkinet (Ecolo) mais aussi des experts issus d’universités ou de fédérations professionnelles dans la plupart des cabinets.

Une habitude qui s’explique, on l’a dit, par le besoin des ministres en place de s’entourer de personnes de terrain, d’experts dans leur domaine. Compétences qu’ils ne trouvent pas, pas suffisamment ou plus dans leurs administrations? La question mérite qu’on s’y intéresse.

Autant qu’aux dysfonctionnements majeurs au sein de bpost. La semaine prochaine, ce sera d’ailleurs au tour de la présidente Audrey Hanard, étiquetée PS, de s’expliquer devant le Parlement et de répondre aux interrogations sur sa gestion de ces crises multiples. Quid de la probabilité de se voir infliger des amendes européennes de plusieurs dizaines de millions d’euros? Qu’est-il advenu du plan de réorganisation proposé par l’ancien management? Comment regagner la confiance des marchés et celle des syndicats?

D’autant que rien ne laisse présager qu’on soit déjà au bout du grand déballage. Ni que le pire ne reste pas à venir.

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