Le curé entre en résistance

L’abbé Van der Biest n’a pas bénéficié, comme il le souhaitait, d’une nouvelle prolongation de son mandat à l’église des Minimes, à Bruxelles. Désaveu pour un catho trop à gauche ?

C’est une histoire dont l’Eglise se serait bien passée. Le dimanche 13 novembre, le doyen Claude Castiau concélèbre l’eucharistie avec l’abbé Jacques Van der Biest, à l’église des Minimes, dans le quartier populaire des Marolles, à Bruxelles. En guise d’envoi final, le premier remercie le second pour tout le travail effectué au sein de la paroisse, en croyant à tort les fidèles avertis de la mise à la retraite de leur curé (76 ans), au 31 décembre 2006. Une nouvelle prolongation de deux ans ne lui a, en effet, pas été accordée.

L’effet d’une bombe. Il ne faut guère plus de dix jours à Victoria Mandi, Marollienne active dans le secteur associatif, catholique non pratiquante et membre du CDH, pour créer un comité de soutien, lancer une pétition et organiser une manifestation le jeudi 24 novembre devant l’église. Ce jour-là, dans la foulée, le bourgmestre Freddy Thielemans (PS) a convié l’assemblée, à l’Hôtel de Ville, pour la remise de la médaille de citoyen d’honneur de Bruxelles au curé.

Emotion, incompréhension. Face au défenseur des petites gens des Marolles et des sans-papiers de tous bords, en service aux Minimes depuis 1954, l’Eglise endosse le mauvais rôle et fait l’objet de toutes les suspicions. N’a-t-elle pas permis à son pape malade de régner jusqu’à son dernier souffle, elle qui n’est parvenue à ordonner que… 9 prêtres, l’an dernier, pour toute la Belgique ?  » Par son engagement et son charisme, l’abbé Van der Biest n’est jamais rentré dans le rang : cela ne correspond plus à la ligne de conduite d’une Eglise qui se durcit, qui préfère des prêtres moins intransigeants venus d’Afrique, analyse Victoria Mandi. Je reçois des appels scandalisés de Marolliens en pleurs qui veulent changer de religion, passer chez les protestants, mais aussi la réprobation d’habitants de Charleroi, de Jumet…  »

Ce procès d’intention agace le doyen. Il s’étonne que  » des gens qui ne mettent jamais le pied dans une église brandissent le calicot : « Touche pas à mon curé « . » Il espère aussi que  » le principe de séparation entre l’Eglise et l’Etat sera respecté « . Castiau ne partage pas le point de vue de son curé  » qui s’estime lié à vie à son peuple des Marolles « . Le doyen pense que ce n’est pas la meilleure manière de préparer l’avenir de la paroisse.

Le porte-parole des évêques, l’abbé Eric de Beukelaer, rappelle, quant à lui, que, depuis le concile Vatican II, le droit canon suggère aux curés, comme aux évêques, de proposer spontanément leur démission à leur supérieur aux alentours de 75 ans, ce qui ne les empêche nullement de continuer à officier par après, en renfort, comme prêtre auxiliaire, par exemple. Castiau admet que Van der Biest devra en principe poursuivre sa mission sacerdotale  » ailleurs, par déontologie, pour ne pas jouer la belle-mère de son successeur « . Il ne garantit pas pour autant que l’église des Minimes bénéficiera toujours d’un curé  » à demeure « .  » J’espère que la paroisse continuera à être desservie, mais nous devons désormais proportionner nos infrastructures à un nombre de croyants, en diminution.  » Castiau trouve cela plus  » respectueux d’une saine laïcité « . Certains feront remarquer que l’Eglise ne s’est pas toujours embarrassée d’une telle déférence.

Dorothée Klein

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