inflation négative
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Le prix de votre caddie ne redeviendra jamais moins cher, malgré une inflation négative: «Aucune chance car…»

Noé Spies
Noé Spies Journaliste au Vif

En dépit d’une légère inflation négative, les prix de l’alimentaire n’ont «aucune chance» de retrouver leurs niveaux précédents, estime l’économiste Philippe Ledent (ING). En parallèle, les biens et services continuent d’augmenter et rendent la vie quotidienne plus chère. «Ce n’est pas une anomalie».

Pour la première fois depuis 2021, les prix de l’alimentaire connaissent une légère baisse en Belgique. Très légère, même, puisqu’on l’estime à -0,2%. Mais le phénomène est assez rare (et attendu) pour être souligné.

Dans le détail, il existe d’énormes variations dans l’évolution des prix des différents produits. Les pizzas et les quiches sont ceux qui ont le plus baissé en un an (-14,6%). Les pâtes et le couscous ont chuté de 9%, le lait de 8%, les légumes de 6%, ou encore les céréales de 5%, selon les chiffres de Statbel. En revanche, les fruits de mer frais (+32,6%), la bière (+20%), l’huile d’olive (+17%), les pommes de terre (+13%) et le chocolat (+3,6%) font partie des produits qui ont le plus augmenté en un an.

Inflation négative dans l’alimentaire: comment l’expliquer ?

Cette légère diminution générale dans l’alimentaire s’explique simplement. D’abord par la chute considérable des prix des matières premières (céréales, huile de tournesol…) en comparaison avec les sommets atteints en 2021 et 2022. En mars 2023, les prix de l’alimentation avaient alors bondi de 18%, en raison, aussi, des prix de l’énergie et des coûts salariaux indexés. «Entre temps, l’énergie a fameusement baissé, tout comme le prix des matières premières. L’un dans l’autre, il est normal que les prix augmentent de moins en moins vite, voire qu’ils diminuent légèrement», avance l’économiste Philippe Ledent (ING).

La baisse est cependant timide et, selon l’expert, il ne faut pas s’attendre à ce que les prix de l’alimentaire reviennent à leurs niveaux précédents. «Simplement car certains coûts ne diminueront pas, comme les salaires», argumente-t-il.

Oui, une inflation négative signifie que les prix baissent. Mais pas nécessairement au point de revenir à leurs niveaux d’avant-crise. «Il n’y aucune chance que les prix plongent. Car plusieurs choses continuent d’augmenter, en dehors des prix des matières premières», souligne Philippe Ledent.

Inflation négative dans l’alimentaire, mais la vie quotidienne est plus chère

Malgré cette baisse dans l’alimentaire, le vie quotidienne reste 3,37% plus chère que l’année dernière. Car divers biens et services ont augmenté. Les cinémas et théâtres sont devenus 9% plus chers en un an, les fast-foods 8%, les hôtels 6%, et les coiffeurs 4%, entre autres. «En dehors des prix alimentaires, on continue à voir une augmentation de la plupart des prix, confirme Philippe Ledent. Elle s’explique par des effets retardés dans différents secteurs de l’économie. Les entreprises, par exemple, n’ont pas directement reporté la hausse de coûts salariaux sur leurs prix de vente. Cette conséquence met énormément de temps à se répercuter et elle continue d’alimenter l’inflation.»

En dehors de l’alimentaire, on continue à voir une augmentation de la plupart des prix.

Philippe Ledent

Economiste (ING)

Actuellement, mesurer une inflation positive (hors alimentaire) «n’est donc pas une anomalie, car il y a toujours des éléments dont le prix augmente». Sur l’alimentaire, la très claire diminution des prix des matières premières suffit à compenser l’augmentation des autres coûts, mais dans les autres secteurs, cet aspect ne se vérifie pas.

Une inflation générale «de moins en moins positive»

Cependant, même si l’inflation des biens et services est positive, «elle l’est de moins en moins», précise Philippe Ledent. En d’autres termes, la pression inflationniste est moindre. «C’est la bonne nouvelle, dans le sens où on ne constate pas un rebond des prix.»

Même si l’inflation des biens et services est positive, elle est de moins en moins positive.

Philippe Ledent

Economiste (ING)

L’inflation générale -positive mais de moins en moins, donc- est soutenue par les prix de l’énergie, qui n’ont pourtant pas réellement augmenté (si ce n’est le prix du pétrole ces dernières semaines), mais qui souffrent de la fin des mesures (chèque énergie, tarif social) visant à abaisser la facture des ménages. «Mécaniquement, cette disparition des mesures d’aide tire les prix de l’énergie vers le haut et crée des distorsions. Cela donne l’impression que l’inflation repart à la hausse uniquement à cause des prix de l’énergie. Or, cette remontée est davantage liée à des ‘effets de base’», complète enfin Philippe Ledent.

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