Des milliers d'Américains ont manifesté ce week-end contre le racisme anti-asiatique, après les fusillades meurtrières dans des salons de massage en Géorgie. © Reuters

Pourquoi le hashtag #StopAsianHate inonde-t-il les réseaux sociaux ?

Stagiaire Le Vif

La tuerie dans trois salons de massages d’Atlanta qui a fait huit morts, dont six femmes asiatiques, suscite une vague d’indignation contre le racisme. Celle-ci dénonce la haine versée contre la communauté asiatique aux États-Unis qui compte 20 millions de personnes. L’attaque inédite constitue un moment charnière pour une population méconnue, silencieuse et réputée peu présente sur la scène politique américaine.

À l’origine de la tuerie dans des salons des massages du mardi 16 mars, Robert Aaron Long, 21 ans. Sa famille et ses amis, qui ont aidé la police à le faire interpeller, le décrivent comme un « obsédé sexuel ». Un jeune homme conscient qu’il a un problème avec la pornographie et des habitudes dans des salons de massage sexuels, écrit le New York Times. Face aux policiers, Long a assuré qu’il ne visait pas particulièrement la communauté asiatique, mais qu’il souhaitait se débarrasser de la tentation que représentaient pour lui des masseuses.

Pour le présentateur Trevor Noah du Daily Show, le caractère raciste ne fait aucun doute : « On ne peut pas déconnecter cette violence des stéréotypes raciaux que les gens collent aux femmes asiatiques. Si ce n’est pas du racisme, alors ce mot n’a plus aucune signification. » Plusieurs grandes villes, de Chicago à Los Angeles, se sont d’ores et déjà engagées à renforcer la présence policière dans les quartiers où la minorité vit.

« Nous devons bannir les fusils d’assaut »

Le président Joe Biden a réclamé mardi l’interdiction des fusils d’assaut après une nouvelle tuerie dans un supermarché au Colorado qui a relancé le débat sur la prolifération des armes à feu aux États-Unis. « Je n’ai pas besoin d’attendre une minute de plus, encore moins une heure, pour prendre des mesures de bon sens qui sauveront des vies à l’avenir. Je vais exhorter mes collègues à la Chambre et au Sénat à agir« , a-t-il dit. Du même avis, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi : « Il faut agir maintenant pour empêcher ce fléau de continuer à ravager notre population« . Le chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a de son côté dénoncé « une épidémie continue de violence par armes à feu qui vole des vies innocentes avec une alarmante régularité« . Mais l’hypothèse d’un durcissement des lois sur les armes reste improbable compte tenu de l’opposition des républicains.

Climat d’hostilité alimenté par Trump

Depuis l’apparition du coronavirus, la communauté asiatique a été pointée du doigt par Donald Trump, l’ancien président des États-Unis. Celui-ci a utilisé les expressions « virus chinois », « virus de Wuhan » ou encore « kung flu » (pour faire un jeu de mots avec la grippe) au coeur de son conflit diplomatique et commercial avec la Chine. Ce genre de propos est jugé responsable du climat agressif, voire meurtrier, envers la communauté asiatique par de nombreuses voix démocrates.

Plusieurs célébrités s’étaient insurgées de ce mauvais traitement. La star des films « Avengers », Mark Ruffalo avait notamment interpellé Trump directement sur Twitter. « Lorsque vous accablez une communauté entière pour un virus, vous montez les gens les uns contre les autres. Lorsque vous faites ces déclarations politiques non scientifiques, certains de vos partisans commencent à agir violemment et de manière exclusive et xénophobe contre ces personnes. »

Aux États-Unis, les actes anti-asiatiques s’intensifient

Stop AAPI Hate, la principale association de défense de la communauté asiatique des États-Unis, a rapidement perçu la hausse des incidents racistes et mis en place une plateforme de signalements pour les victimes. Environ 3 800 signalements d’agressions,de harcèlements ou d’insultes ont été enregistrés en 1 an en particulier pendant les vacances du Nouvel An lunaire.Selon un rapport de Stop AAPI Hate publié mardi,les agressions physiques représentaient 8,7 % de ces incidents, tandis que la toux/crachats totalisait 6,4 %. Le harcèlement verbal et en ligne constituait 70,9 % de ces incidents ; et l’évitement était de 21,4 %. Dans les deux tiers des cas, ce sont des femmes ou des personnes âgées qui sont visées. Près de la moitié des agressions (44 %) se recensent en Californie.

Un hashtag en soutien à la communauté asiatique

#StopAsianHate inonde les réseaux sociaux avec des témoignages et des vidéos. Le mouvement a été lancé sur Instagram la semaine dernière par Michelle Lee, rédactrice en chef du magazine beauté Allure. Près de 4 millions de tweets selon Visibrain ont été comptabilisés le mardi 16. Il est également repris par les militants de Black Lives Matter, qui voient dans le racisme anti-asiatique le même moteur haineux : le suprémacisme blanc.

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Dans sa publication, Michelle Lee relate des faits qui se sont produits ces dernières semaines aux États-Unis, dont le meurtre de Vicha Ratanapakdee, un homme de 83 ans originaire de Thaïlande qui a été tué à San Francisco. Mais également, l’histoire d’un homme de 91 ans violemment poussé au sol dans le quartier de Chinatown, à Oakland, en Californie. Ou encore, celle d’un Américano-Philippin, victime de coups de couteau dans le métro de New York.

Et dans le reste du monde ?

De nombreux témoignages provenant de partout dans le monde accompagnent ce hashtag, prouvant que le phénomène n’est pas lié qu’aux États-Unis. En France, l’an dernier, le hashtag « je ne suis pas un virus » circulait sur les réseaux sociaux pour répondre à une campagne de haine en ligne. Depuis des années, la communauté asiatique est victime de stéréotypes et d’agressions. Elle dénonce un sentiment d’abandon des autorités.

Ce mois-ci, La Presse rapportait que le nombre de plaintes pour des actes racistes ou des crimes haineux envers les Québécois d’origine asiatique déposés au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) avait quintuplé en un an. Les périodes d’épidémies sont propices à la recherche de boucs émissaires, des divisions, surtout dans ce temps d’affirmation identitaire exacerbé.

Valentina Jaimes

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