la tour japonaise © Belga

Une partie de l’immobilier royal à l’abandon

Kristof Clerix
Kristof Clerix Rédacteur Knack

Une partie du vaste patrimoine de la Donation royale est à l’abandon, alors que c’est précisément ce que le roi Léopold II voulait éviter en faisant don de ses biens à l’État.

Knack, De Tijd, Apache et VRT NWS ont évoqué les 7500 hectares de terrain et 77 bâtiments que la Donation royale possède en Belgique – les anciennes propriétés que Léopold II a données à l’Etat au début du 20ème siècle. Le « souci de préserver les beautés naturelles du pays » était l’une des principales préoccupations lorsque la Donation royale a été créée en 1930 en tant qu’institution publique pour assurer « la gestion, le bon entretien et la préservation des biens en question ».

Interrogé par De Standaard, le comte Paul Buysse, président de la Donation royale, a répondu aux premières révélations d’Immo Royal. » La question est de savoir si nous voulons un autre don royal ou si nous laissons tous ces bâtiments se détériorer », dit Buysse. Mais la conclusion, c’est que c’est déjà le cas : une série de propriétés sont délabrées. La Donation royale fait de son mieux avec les moyens à sa disposition », répond l’administrateur délégué Philippe Lens.

Quelques exemples actuels d’abandon

1. La tour japonaise et le pavillon chinois de Laeken sont fermés pour des raisons de sécurité depuis 2013. La tour est confrontée à des problèmes de stabilité et le faîte du pavillon risquait de s’effondrer. Ils appartiennent tous deux à la Donation royale, mais sont utilisés par les Musées royaux d’Art et d’Histoire.

Philippe Lens rappelle que les bâtiments ont une vocation d’intérêt général. « La gestion a été transférée à l’État avant la création de la Donation en tant qu’institution publique. » La Régie des bâtiments est donc responsable de la rénovation. Elle espère l’achever d’ici fin 2023.

Le pavillon chinois
Le pavillon chinois© Alexander Dumarey

2. À Laeken, les 17 serres des Jardins du Fleuriste sont dans un état déplorable. Les fermes ont été gravement endommagées par les ravages du temps, le verre a été complètement endommagé en de nombreux endroits et l’ensemble est envahi par la végétation. Depuis 2003, la Régie des Bâtiments n’a pas été impliquée dans sa gestion ou son entretien. En 2019, la Donation royale louera les serres à la Direction de l’Environnement de la Région de Bruxelles-Capitale, qui bénéficie de droits de construction. Le service démolira les serres à partir de décembre et en reconstruira six.

3. À Strombeek-Bever, la Donation royale a engagé un responsable pour éviter que l’ancien site Inter Nos ne devienne la proie de squatters ou de vandales. Il s’agit d’un terrain de plus de 2,6 hectares situé entre les Nieuwelaan et Antwerpselaan : des terrains de sport qui, il y a quelques années encore, étaient utilisés par Inter Nos, le séminaire et centre de rencontre du SPF Finances. Les fonctionnaires des Finances pouvaient se détendre sur un terrain de football, des courts de tennis et des terrains de pétanque, et il y avait aussi un bar et un restaurant.

Le terrain est désert et les courts de tennis sont envahis par les mauvaises herbes. Une enseigne « Club Internos Privé » devant la porte d’entrée couverte de mousse rappelle la splendeur passée. En 2017, la Donation royale a embauché Entrakt, le spécialiste en biens vacants basé à Anderlecht, pour trouver des résidents temporaires et éviter que le site ne soit occupé par des squatters. Pendant la courte période de vacance, il y a eu aussi du vandalisme. Actuellement, une personne vit temporairement dans l’ancienne maison de gardien sur le site. Plusieurs fois par an, la Donation assure encore l’entretien des espaces verts du site.

4. Certaines fermes louées de la Donation royale dans les Ardennes sont délabrées ou en attente urgente de rénovation. Nous nous sommes rendus sur place et nous avons vu des fenêtres pourries, des toits qui fuient, des fissures dans les murs, des problèmes de chauffage et d’électricité… « L’hiver est rude », dit un agriculteur anonyme. « Nous chauffons au mazout et au bois, mais nous pouvons à peine chauffer le premier étage, et en haut, il n’y a même pas de chauffage. Je doute que vous puissiez vivre ici. »

Ferme à Mont Gauthier
Ferme à Mont Gauthier© Alexander Dumarey

D’autres agriculteurs se plaignent des investissements dont ils sont chargés. « En fait, ils font tout ce qui est en leur pouvoir pour que leurs locataires entretiennent le bâtiment », dit une agricultrice anonyme. « Y compris ce qu’ils sont censés faire. » La loi wallonne sur le bail à la ferme stipule que les travaux de gros oeuvre à l’extérieur sont à la charge du propriétaire et que les travaux d’entretien à l’intérieur sont à charge du locataire. « Ils (Donation royale, NLDR) n’ont pas assez d’argent pour tout entretenir et placer l’argent là où ils le veulent « , dit-il. Les biens sont loués dans les meilleures conditions possibles », déclare Mikael Stassen, régisseur de la Donation. « Les recettes doivent permettre à la Donation royale de couvrir les frais, tels que le stipule la loi. »

Stassen souligne que la Donation s’efforce de répondre aux plaintes des locataires « en fonction des priorités et des ressources dont elle dispose ».

L’administrateur délégué Philippe Lens rappelle que ces dernières années la menuiserie extérieure de plusieurs fermes ardennaises a été remplacée. Lens : « Par ailleurs, nous avons lancé une campagne pour le Domaine de l’Ardenne en vue de restaurer les toits des fermes du château. Le budget estimé pour 2020 est de 300 000 euros alors que nos locataires ont souvent abandonné l’usage de leurs anciennes écuries pour en construire de nouvelles, plus conformes aux normes d’exploitation actuelles. »

5. La ville d’Ostende loue les écuries norvégiennes pour une bouchée de pain (2100 euros par an) à la Donation royale. Six clubs sportifs locaux ont été hébergés dans des écuries vieilles de plus de 100 ans, avec une interprétation typiquement scandinave de l’Art Nouveau et du style Viking. Mais le bâtiment est vétuste et l’ensemble de la construction doit être rénové. Ces travaux ont été budgétisés par la ville d’Ostende à raison de 10,6 millions d’euros, dont 80% seront financés par des subventions de patrimoine. Le reste est pour les caisses de la ville. Le projet se déroulera en trois phases, le calendrier dépendra des ressources que l’Agence immobilière pourra mettre à disposition.

Les écuries norvégiennes
Les écuries norvégiennes© Alexander Dumarey

6. L’ancien institut Kind & Gezin à Kraainem n’appartient plus à la Donation royale. Il y a longtemps, elle a acquis près de 3 hectares de terrain à Kraainem pour construire un abri ou un orphelinat pour les enfants des classes sociales défavorisées de la périphérie et de Bruxelles. L’institut a été nommé en l’honneur de l’ancien premier ministre Henri Jaspar dans les années 1930. Mais l’histoire plus récente du complexe est moins positive.

Kraainem: Kind en Gezin
Kraainem: Kind en Gezin© Alexander Dumarey

Jusqu’en 2005, une petite partie des bâtiments était encore utilisée par Kind en Gezin, mais ensuite le complexe s’est complètement vidé. Les bâtiments sont restés à l’abandon pendant des années, avec des façades pleines de graffitis et des fenêtres cassées. Le 19 mai 2010, la Donation royale a vendu le complexe au groupe Ghelamco, qui souhaitait construire des services-flats de luxe pour personnes âgées. Mais même après la vente, le bâtiment est resté vide pendant des années. En 2014, il y a eu un violent incendie après qu’un squatteur ait allumé un feu pour se réchauffer. Entre-temps, l’entreprise de soins résidentiels Vulpia s’est chargée des bâtiments et y a enfin construit les appartements de service. « La commune aurait dû faire quelque chose de ce magnifique bâtiment. Une occasion manquée », avait déclaré l’opposition à Kraainem en 2011. Mais Kraainem n’avait pas autant d’argent que les sociétés immobilières pour acheter le complexe de la Donation royale.

7. Un autre ancien bâtiment de la donation royale, qui s’était détérioré pendant des années et qui a finalement été vendu au secteur immobilier, est situé rue Brederode à Bruxelles. Pendant vingt ans, les maisons des numéros 27-29 ont été un cancer de la ville qui a défiguré le quartier autour du Palais Royal. Il y a eu des problèmes de squatters et même un incendie. Jusqu’à ce que la propriété (déjà vendue par la Donation en 2007) soit finalement vendue en juillet 2013. L’acheteur, une société immobilière, y a construit de luxueux appartements et duplex neufs.

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