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Succession : faire des donations, un objectif fiscal

Philippe Berkenbaum
Philippe Berkenbaum Journaliste

Parler d’argent et de décès ? Autant de sujets délicats à aborder en toute sérénité. D’autant que, l’espérance de vie ne cessant de s’allonger, les futurs héritiers prennent eux aussi de l’âge. Organiser sa succession à l’avance est devenu un must.

La donation, c’est l’instrument de base d’une transmission planifiée. Elle consiste à céder de son vivant une partie de ses avoirs à quelqu’un. L’objectif premier est de permettre au bénéficiaire d’en profiter quand il en a besoin, sans devoir attendre le décès du donateur. On pourra notamment cofinancer l’achat de sa première habitation avec l’un de ses enfants, céder une partie du capital dans l’entreprise familiale à celui qui y travaille déjà, financer de coûteuses études à l’étranger, etc.

La donation a également, et peut-être surtout, un objectif fiscal.

Donner, c’est donner ! Sauf si le bénéficiaire est le conjoint, une donation est irrévocable et définitive. Mais elle peut être assortie d’une condition, comme ce qu’on appelle la « réserve d’usufruit ». Il s’agit par exemple de donner son appartement en nue-propriété à ses enfants mais d’en conserver les loyers, ou les dividendes de ses actions. Cela permet au donateur de garder, s’il le souhaite, la jouissance financière de l’avoir dont il s’est défait.

Car dans la pratique, si elle permet de donner un coup de pouce à ses enfants tant qu’ils en ont besoin, la donation a également, et peut-être surtout, un objectif fiscal. Les droits de donation sont nettement plus avantageux que les impôts sur la succession. Pour les biens mobiliers (argent liquide, portefeuille titre, bijoux, etc.), les premiers sont de 3 %, quel que soit le montant, alors que les seconds sont progressifs et peuvent atteindre 30 % en ligne directe, à Bruxelles et en Wallonie. Ils sont en outre libératoires. Autrement dit, aucun autre impôt ne sera dû même si le donateur décède dans les trois ans qui suivent l’acte de donation. Pour les biens immobiliers, c’est plus complexe mais tout de même plus intéressant. Et en Wallonie comme en Flandre, il n’y a plus de droits à payer sur la donation d’une entreprise familiale, sous certaines conditions. A Bruxelles, un taux réduit de 3 % reste d’application.

Dans les faits, si le don est manuel et non enregistré (argent, bijoux…), aucun droit de donation n’est dû si le donateur ne décède pas dans les trois ans. Dans le cas contraire, la donation doit être intégrée à la déclaration de succession. Si vous donnez un bien immobilier, il faut passer par un notaire et payer à la fois des frais et des droits de donation. Si le donateur décède dans les trois ans, ceux-ci seront déduits des droits de succession. Après trois ans, plus rien n’est dû.

On l’aura compris, la donation constitue une forme d’avance sur héritage. Au décès du donateur, les autres héritiers peuvent exiger que cela soit rectifié. On prendra alors en compte la valeur des biens concernés au moment de la donation et celle-ci sera imputée sur la succession. Il est dès lors plus judicieux de jouer cartes sur table dès le début pour éviter les conflits futurs entre héritiers. D’où l’intérêt du pacte familial.

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