« Si nous n’étions pas en guerre, De Block et Wilmès seraient obligées de démissionner »

Selon le plan, la Belgique a 38 millions de masques en stock. Dans la réalité nous en avons zéro. « Réaliser des économies sur ces dépenses semble éthiquement inacceptable », estime notre confrère de Knack.

Certains pays sont excellents dans l’élaboration de plans. En Belgique, nous sommes d’excellents débrouillards. C’est une remarque de Piet Vanthemsche, ancien président du syndicat des agriculteurs et à présent coprésident du ‘Economic Risk Management Group’, qui doit maintenir notre économie à flot en période de coronavirus. Les Pays-Bas disposent d’une « vue d’ensemble de tous les risques de catastrophes et de menaces potentielles susceptibles de perturber notre société » qui fait 204 pages. Ce document décrit les scénarios possibles en cas de catastrophes naturelles, d’inondations, d’accidents dus aux radiations, d’incidents chimiques, d’accidents de transport, de cybermenaces, de terrorisme et aussi de maladies infectieuses. Il n’existe pas de tel scénario en Belgique.

En revanche, nous avons un « plan d’urgence belge pour une pandémie de grippe », rédigé en 2006, sous la direction de… Piet Vanthemsche, alors commissaire interministériel Influenza. Les masques buccaux font l’objet d’une grande attention. Ils jouent un « rôle important dans la prévention de la transmission du virus ». Le plan prévoit que le gouvernement fournira 32 millions de masques chirurgicaux et 6 millions de masques FFP2.

Trois ans plus tard, le Comité consultatif de bioéthique a examiné le plan d’urgence et le professeur Marc Van Ranst (KU Leuven) a notamment été entendu en tant qu’expert. Dans son avis, le Comité souligne une fois de plus l’importance des masques. Au sujet des masques chirurgicaux, par exemple, il est dit que « tous les patients infectés doivent les porter, tant ceux qui sont soignés à la maison que ceux qui séjournent dans un hôpital ou dans une autre institution ». Et « dans le cercle familial, il semble également approprié de mettre des masques chirurgicaux dès l’apparition des premiers symptômes, même si un diagnostic n’a pas encore été posé, afin d’éviter, dans la mesure du possible, de propager l’infection aux autres membres de la maisonnée ».

L’avis souligne qu’un stock de 32 millions de masques chirurgicaux et de 6 millions de masques FFP2 est « insuffisant ». Il conseille d’augmenter le stock. Il souligne que « réaliser des économies sur ces dépenses semble éthiquement inacceptable ». Aujourd’hui, il semble que le contraire se soit produit : au lieu d’augmenter le stock, il a été détruit en 2018. D’après Het Nieuwsblad, les masques ont été liquidés parce que le bail des hangars dans lesquels ils étaient entreposés avait expiré. Des masques chirurgicaux encore utilisables auraient également fini dans l’incinérateur.

Par la suite, le stock n’a pas été reconstitué pour des raisons d’économie. Maggie De Block (Open VLD) était ministre de la Santé, l’actuelle première ministre Sophie Wilmès (MR) ministre du Budget et donc responsable des dépenses. Toutes deux sont politiquement responsables de la catastrophe du masque buccal et de la non-application du plan d’urgence. Dans une véritable démocratie parlementaire – et si nous n’étions pas en guerre – elles devraient démissionner.

En conséquence, des dizaines de milliers de femmes ont sorti leur machine à coudre pour fabriquer des masques. Les hommes font des projets, les politiciens les ignorent, et les femmes sont débrouillardes.

Malheureusement, cette mauvaise gestion politique s’inscrit dans un contexte plus large. L’ancien gouverneur Fons Verplaetse a fait remarquer il y a plus de dix ans à Knack que nous économisons sur les choses qui « suscitent peu de résistance au sein de la population ». Les ponts ne sont pas construits, les pistes cyclables ne sont pas aménagées, les routes et les tunnels ne sont pas entretenus. Le non-maintien de l’approvisionnement stratégique en masques s’inscrit dans cette liste. « C’est la solution de facilité », estime l’expert en budget Wim Moesen (KU Leuven) à propos de cette politique budgétaire : « Les politiciens belges ont pris la voie de la moindre résistance pour faire des économies, mais c’est aussi la voie de la moindre intelligence ». Parce que les choses vont bien, jusqu’à ce qu’il s’avère que de nombreux cyclistes meurent dans la circulation, que les plafonds des tunnels s’effondrent et même le personnel soignant et les infirmiers ne disposent pas de masques pendant la crise du coronavirus.

Et tout cela alors que nos dépenses publiques, à 52 % du PIB en 2018, sont parmi les plus élevées d’Europe. C’est révoltant. Plusieurs générations de politiciens portent une responsabilité écrasante.

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