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Port du masque : « Le gouvernement a raté le coche »

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

Le port du masque ne sera pas imposé dans les magasins et autres endroits où la distanciation sociale n’est pas possible. Jean-Luc Gala, professeur à la faculté de médecine de l’UCLouvain, commente cette décision pour LeVif.be.

A la suite du Conseil National de sécurité de ce mercredi qui a statué sur la phase 4 du déconfinement, les différents gouvernements du royaume n’ont pas choisi d’imposer le port du masque, comme l’avaient demandé certains virologues. Les experts ont adapté leurs recommandations en raison de la situation épidémiologique. « Mais nous continuons à le recommander fortement », déclare Sophie Wilmès. La Première ministre précise: « S’il devait y avoir un rebond, le port du masque serait obligatoire dans tout espace public. » Jean-Luc Gala, professeur à la faculté de médecine de l’UCLouvain commente pour LeVif.be cette décision du CNS.

Pourquoi ne pas imposer le port du masque à ce stade du déconfinement ?

Il serait très difficile pour le gouvernement, alors qu’il ne l’a jamais fait, d’exiger le port du masque maintenant alors que tous les indicateurs épidémiques sont à la baisse. Il fait beau, les gens en ont marre du déconfinement. La manifestation de 10.000 personnes il y a deux semaines n’a pas eu de conséquences sur les chiffres. Les jeunes qui fêtent la fin de l’année scolaire n’en ont rien à faire du port du masque,… Des mesures coercitives seraient bien difficiles à mettre en place dans de telles circonstances. Pourtant, le port du masque est plus que jamais recommandé, surtout maintenant que davantage de personnes vulnérables des groupes cibles à risques sortent de leur bulle et rencontrent de plus en plus de monde.

Vous critiquez la mauvaise communication du gouvernement à ce sujet

Le gouvernement a raté une réelle occasion en début de crise sanitaire d’inculquer à la population les bonnes pratiques sur le port systématique du masque dans les endroits publics, dès qu’on sort de sa bulle proche, que ce soit dans les magasins, les supermarchés, au restaurant… C’est en effet la mesure la plus efficace, et bien plus que le mètre et demi de distance pour se protéger soi-même et les autres du virus.

En Italie, je suis actuellement à Turin, je remarque que les gens, frappés par l’épidémie, ont intégré cela dans leurs habitudes. C’est devenu un réflexe pour les Italiens de mettre leur masque en rentrant dans un restaurant, en allant aux toilettes… En Belgique, je reproche au gouvernement de n’avoir rien fait pour au minimum expliquer l’utilité du port du masque pour protéger les personnes les plus vulnérables. Les experts du Gees ne sont pas non plus de fervents défenseurs du port du masque alors que l’OMS a fait marche arrière. Et la pénurie de masques en début d’épidémie est un faux problème, le gouvernement aurait pu enseigner aux citoyens la manière de se fabriquer un masque efficace, mais il n’a jamais communiqué là-dessus. Il n’a jamais voulu jouer sur ce facteur culturel de lutte contre le virus. Il est très difficile maintenant de revenir en arrière.

Le gouvernement en viendra-t-il à l’avenir à rendre obligatoire le masque ?

On profite actuellement de circonstances très favorables pour combattre le virus. Il y a un peu d’immunité croisée qui joue, mais surtout, des conditions météo exceptionnelles. On sait maintenant que le virus suit une certaine saisonnalité et qu’il est moins actif aux beaux jours. Mais quand ces conditions vont changer en automne, il faudra être très prudents. A ce moment, obliger le port du masque pourrait bien être une mesure efficace pour contenir une éventuelle seconde vague épidémique.

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