Les négociations pour la formation d’un gouvernement bruxellois reprennent enfin. Le MR a proposé une solution au veto des partis opposés à voir la N-VA dans la coalition. Six formations politiques se rencontrent ce lundi.
Alors, ça y est, Bruxelles arrive? Une semaine après leur première rencontre dans un salon feutré de l’Amigo, célèbre hôtel bruxellois, le MR de Georges-Louis Bouchez et le PS d’Ahmed Laaouej sont arrivés à un point décisif: l’élaboration d’un schéma permettant un gouvernement bruxellois sans briser aucun veto. La formule est inédite et laisse encore pas mal de questions sur les conséquences qu’elle implique, mais elle a le mérite d’exister. Le MR, qui disposera du poste de Ministre-Président et d’un autre de Secrétaire d’Etat sacrifiera ce dernier afin de désigner un membre de la société civile, validé par les autres partis de la coalition ainsi que par la N-VA.
Nous suivons cette initiative pour voir si elle peut enfin déboucher sur une majorité qui a du sens sur le fond et sur le plan institutionnel
Peu avant le début du mois de juin pourtant, nombreux étaient ceux qui réclamaient la sortie de Georges-Louis Bouchez des discussions. Force est de constater que c’est pourtant le président du MR qui a contacté le socialiste bruxellois, Ahmed Laaouej, pour rétablir le contact. «Ce n’était pas le Bouchez que l’on connaît, il était plus conciliant, peut-être politiquement affaibli, même», pointe un témoin. Le tandem s’est rencontré à plusieurs reprises, et c’est finalement le libéral qui proposé le scénario de déblocage. Initialement, la blanche colombe proposée comme Secrétaire d’Etat devait être validée par l’ensemble des partis néerlandophones présents au gouvernement bruxellois en plus de la N-VA. Finalement, les partis francophones devront également donner leur feu vert.
Une majorité qui a du sens
Pour la N-VA, dont l’Open VLD exigeait la participation au gouvernement et dont le PS exigeait son absence, c’est donc un pied dehors, un pied dedans. «Nous suivons cette initiative pour voir si elle peut enfin déboucher sur une majorité qui a du sens sur le fond et sur le plan institutionnel, et sur un gouvernement qui tente de mettre de l’ordre dans ses affaires», a réagi la présidente régionale du parti et ministre flamande en charge de Bruxelles, Cieltje Van Achter. L’Open VLD est l’autre élément qui pourrait encore tout faire capoter, cela sera découvert dans les jours à venir lorsque les discussions sur le fond s’ouvriront. Ce lundi après-midi au parlement bruxellois, les six partis (MR, PS, Engagés, Groen, Vooruit, Open VLD) mettront en commun leurs agendas.
Ailleurs, plusieurs conditions risquent de se chevaucher sur le débat, comme la composition du cabinet de ce Secrétaire d’Etat asexué, ou encore l’appartenance à son groupe linguistique. En fonction de la langue maternelle du candidat, ce dernier héritera également de compétence à la Cocof ou a la VGC. Dans Le Soir, le politologue Dave Sinardet pointe que «ce scénario brise la stricte division entre les groupes linguistiques». Ce n’est pas anodin, moins d’un mois après la rupture entre les socialistes néerlandophones et francophones, suite à quoi ces derniers avaient annoncé vouloir lancer des listes bilingues en 2029.
Tout le monde s’est fait mal dans la recherche d’un gouvernement bruxellois
«Finalement, on est dans un scénario où tout le monde s’est fait un petit peu mal, c’est un compromis à la belge», souffle une bonne source. Les choses sérieuses commenceront véritablement cette semaine lorsque les partis entameront des discussions sur le fond. Les priorités du MR, qui devrait conduire ces négociations, sont connues: elles sont budgétaires, sécuritaires, et tournées vers l’emploi avant tout.
Sur cet aspect, les socialistes entendent bien profiter de la friture sur la ligne qui apparaît petit à petit dans l’axe MR-Engagés. Le fait que le nouveau président du parti centriste soit Bruxellois, qu’il ait fait de la question du financement des CPAS un enjeu de sa participation au gouvernement fédéral n’est pas anodin. Mis à la porte des gouvernements du pays en juin 2024, le parfum socialiste ne serait-il pas en train de revenir par la fenêtre?
Un gouvernement pour le 21 juillet, vraiment?
Georges-Louis Bouchez prédit un gouvernement bruxellois pour le 21 juillet. Cieltje Van Achter (N-VA), Frédéric De Gucht (Open Vld) et Ans Persoons (Vooruit) ont, eux, fait preuve de plus de réserve à leur arrivée au cabinet de la cheffe de file Groen, Elke Van den Brandt pour une réunion de concertation préliminaire à une rencontre avec le MR, le PS et les Engagés. À entendre Frédéric De Gucht et Ans Persoons, tout au plus peut-on espérer un accord sur des grandes lignes d’ici le 21 juillet, et un accord de gouvernement détaillé d’ici la fin de l’été. Un accord pourrait être conclu cet été bien sûr, mais il ne pourra être entériné que par le parlement qui, lui, revient de vacances le 15 septembre.
«Si cela dépend de nous, cela peut aller vite. Mais faire un budget pour le 21 juillet, ce n’est pas possible. Je pense que d’ici là, nous pourrons fixer les grandes lignes et nous pourrons atterrir à la fin de l’été», a déclaré Frédéric De Gucht. Le libéral néerlandophone a indiqué que l’absence de représentant direct de la N-VA ne constituait pas un problème en soi pour lui.
La voie empruntée par le MR et le PS pour débloquer le processus de formation bruxelloise est une «solution créative, même si elle ne remportera aucun prix de beauté, a déclaré à ce propos Cieltje Van Achter. Aujourd’hui, nous essayons de rétablir le respect de la majorité flamande. Il est important que nous nous réunissions à quatre partis (néerlandophones)», a ajouté la ministre bruxelloise du gouvernement flamand. Pour celle-ci, l’absence de la N-VA à la réunion avec les partis francophones, lundi après-midi, ne devrait pas être un problème majeur. «L’essentiel est que nous sortions de l’impasse et que nous avancions sur le plan du contenu.»