Bart De Wever dit-il toujours le contraire de tout? (fact-checking)
Il domine la vie politique depuis vingt ans. Dans six mois, le président de la N-VA pourrait décider de l’avenir de la Belgique. Mais que pense vraiment Bart De Wever? Retour sur une vie politique de victime à travers une demi-douzaine de préceptes.
Bart De Wever dit toujours le contraire de tout (2/6)
La carrière de Bart De Wever, président de la N-VA depuis vingt ans et jusqu’à quand, bourgmestre d’Anvers depuis 2012 et, il l’espère, au moins jusqu’à 2030, semble témoigner d’une intangible stabilité. Mais la fluidité de ses prises de position est presque proverbiale en Flandre. Et pas uniquement sur l’engagement à un ultime mandat présidentiel.
Cet automne, il a, à deux jours d’écart, successivement:
– donné une interview à nos confrères flamands de Trends pour dire qu’il renonçait à envisager d’encore participer au fédéral: que les Wallons et les mauvais Flamands s’y débrouillent tout seuls!
– donné une interview à nos collègues flamands du Laatste Nieuws pour dire qu’il envisageait de lancer des listes en Wallonie: que les Wallons et les mauvais Flamands ne nous laissent pas tout seuls!
Mais il y a plein d’autres exemples.
Sur la collaboration des flamingants, il a beaucoup changé, Bart De Wever. Il en fut, jeune, un spécialiste si investi qu’il présenta des travaux à des cercles fort engagés, par exemple pour réhabiliter Joris Van Severen, fondateur du mouvement fasciste Verdinaso exécuté en 1940.
Quand il était dans l’opposition à la commune d’Anvers et au fédéral mais toujours dans le cartel CD&V – N-VA, en 2007, il avait estimé «gratuites» les excuses présentées par la Ville d’Anvers pour avoir collaboré à la déportation de Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le cartel avait failli se casser et le rédacteur en chef d’un magazine communautaire, Michael Freilich, écrivait que la communauté juive devait se faire du souci si Bart De Wever devenait jamais bourgmestre d’Anvers. Et puis, quand il était au pouvoir à la commune d’Anvers et au fédéral, mais plus dans le cartel CD&V – N-VA, en 2015, et il avait estimé les excuses nécessaires, parce que «la collaboration avait été une erreur terrible à tous les niveaux». Aujourd’hui, Michael Freilich est député fédéral N-VA.
Ou sur Jean-Marie Dedecker, il a beaucoup varié, Bart De Wever. Quand Dedecker quitte l’Open VLD en 2006, il devient membre de la N-VA. Mais la N-VA est en cartel avec le CD&V. Le CD&V s’oppose à l’arrivée de Dedecker.
Alors De Wever exclut Dedecker de la N-VA. Et Dedecker fonde la LDD (Libertair, Direct, Democratisch), qui fait un bon résultat aux élections de 2007. Quand la N-VA quitte le cartel avec le CD&V en 2008, Bart De Wever dit qu’une collaboration avec la LDD ne le «tente pas du tout» car «Jean-Marie Dedecker est un poujadiste, ce que je ne suis pas».
En 2019, Jean-Marie Dedecker n’est peut-être plus poujadiste. Il est à coup sûr beaucoup plus tentant, puisqu’il est élu député fédéral sur la liste N-VA en Flandre-Occidentale. Il la poussait comme candidat indépendant. Et Dedecker, en juin 2024, après avoir vainement négocié avec le Vlaams Belang, tirera la liste N-VA en Flandre-Occidentale, comme candidat indépendant toujours. Sans doute plus comme poujadiste pas tentant du tout.
Mais sur les francophones, en revanche, il n’a jamais bougé, Bart De Wever. Les menteurs, ce sont eux tous, tout le contraire de lui seul. «Un Flamand, quand il dit quelque chose, c’est dit. Quand il se déjuge, il a toute la presse et tous les concurrents politiques sur le dos. Un francophone, il dit les choses avec beaucoup d’emphase, avec beaucoup de style, puis il change d’avis, et personne ne se formalise», déclarait-il au Vif, avec emphase et style, en août 2008. Il ne dit pas le contraire aujourd’hui. Sur ça, il n’a pas changé d’avis depuis, et plus personne ne s’en formalise.
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