Valerie Glatigny © Belga

Distribution des subsides: quand Valérie Glatigny finance des ASBL socialistes

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Voici comment la ministre (notamment) de l’Enseignement supérieur en Fédération Wallonie-Bruxelles Valérie Glatigny distribue ses subsides facultatifs.

Ministre de l’Enseignement Supérieur, de l’Enseignement de Promotion sociale, de la Recherche scientifique, des Hôpitaux universitaires, de l’Aide à la jeunesse, des Maisons de justice, de la Jeunesse, des Sports et de la Promotion de Bruxelles, Valérie Glatigny (MR) habite à Auderghem, l’une des dix-neuf communes de la région de Bruxelles-Capitale. Ses compétences fonctionnelles très larges en font l’une des ministres les plus pourvoyeuses de subsides, facultatifs ou non.

Depuis le début de la législature, elle a décerné 13 886 subsides facultatifs (1) pour un montant total de 235 878 000 euros.

Pour cette analyse, afin de pouvoir décrypter la répartition géographique des subsides, ceux-ci ont été divisés en deux catégories :

  • Ceux accordés à un bénéficiaire dont l’action n’a pas de barrière géographique (une fédération sportive, par exemple). Ces derniers représentent 35% des subsides octroyés pour un montant de 84,744 millions d’euros.
  • Ceux qui bénéficient à un récipiendaire dont l’action se situe sur une commune particulière (une subvention à un club donné, par exemple). Ces derniers représentent 65% de la somme totale, soit 151,134 millions d’euros. Les explications ci-dessous ne portent que sur cette catégorie.

Où vont les subsides accordés par Valérie Glatigny ? D’abord à Bruxelles

Du point de vue géographique, la ministre Valérie Glatigny a accordé 27% de ses subsides à des bénéficiaires situés sur le territoire de la région de Bruxelles-Capitale. Cela représente un montant de plus de 84 millions d’euros, soit 38% du montant total.

Cet effet d’aspiration vers la région capitale s’explique, d’abord, par le fait que parmi les compétences de Valérie Glatigny figure la Promotion de Bruxelles. Ensuite, la région la plus densément peuplée du pays attire, compréhensiblement, un milieu associatif plus dense. Tout comme, enfin, son statut de capitale.

Dans les dix communes où arrivent le plus de subventions facultatives distribuées par Valérie Glatigny, cinq sont Bruxelloises (Ixelles, deuxième, avec 21 millions d’euros reçus; Woluwé-Saint-Lambert, cinquième, avec 15,6 millions d’euros; Bruxelles-Ville, septième, avec 14,5 millions d’euros; Anderlecht, huitième, avec 10 millions d’euros; et Saint-Gilles, dixième, avec 6,4 millions d’euros). Liège est la ville francophone la plus dotée, avec 23 millions d’euros. Mons (troisième, 18 millions d’euros) et Namur (quatrième, 17 millions), complètent le quinté.

Rapporté au nombre d’habitants, le classement communal des subventions distribuées par Valérie Glatigny diffère sensiblement, puisque la proportion de subsides par habitant est la plus élevée dans les communes de Sainte-Ode (583 euros par habitant), Yvoir (560 euros par habitant) et Ottignies-Louvain-La-Neuve (483 euros par habitant). Les deux premières abritent des hôpitaux universitaires, et la troisième une université: rien d’étonnant, donc, dans ce podium.

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A quelles couleurs politiques bénéficient les subsides de Valérie Glatigny ? D'abord au MR

D’un point de vue politique, la ministre a accordé 20% de ses subsides à des récipiendaires basés dans des communes dont le/la bourgmestre est membre de son parti, le MR (qui constituent 37% des entités de la Fédération Wallonie-Bruxelles). Cela représente un montant de 18,5 millions d'euros, soit 8% du montant total octroyé.  

En outre, Valérie Glatigny a attribué plusieurs subventions facultatives à des associations liées à son parti:

  • REFORM-Recherche et formations socio-culturelles en a reçu 40, pour un montant total de plus de 50 000 euros.
  • O'YES (anciennement Sida'sos) en a reçu 17, pour un montant total de plus de 36 000 euros.
  • DELIPRO Jeunesse en a reçu 15, pour un montant total de plus de 30 000 euros.
  • Responsible Young Drivers Wallonie-Bruxelles en a reçu un, de 4500 euros.
  • Jeunes et Libres, qui fédère toutes ces organisations de jeunesse liées au MR, en a reçu cinq, pour un total de 17 800 euros.

En comparaison, elle a également attribué quinze subsides à des organisations dont le nom contenait le mot "socialiste" (presque exclusivement des centres de planning familial des Femmes prévoyantes socialistes, mais aussi le Mouvement des Jeunes socialistes, qui ont reçu 300 euros en 2020 alors qu'aucune subvention facultative n'a été adresée aux Jeunes MR), pour un montant total de plus de 539 000 euros. Et, à titre d'exemple également, OXYJEUNES, une des organisations de jeunesse membres de la fédération ProJeuneS historiquement liée au PS, a, elle reçu plus de 90 000 euros de subsides divers depuis le début de la législature.

L'association francophone du sport travailliste, si historiquement liée au mouvement socialiste qu'elle est toujours basée au siège du Parti, boulevard de l'Empereur, a, elle, perçu plus de 70 000 euros.
Et le pluralisme prodigue de Valérie Glatigny va si loin qu'une association politique flamande,le Willemsfonds, a même profité de 19 000 euros de subventions pour l'organisation de cours de néerlandais. Les deux autres associations de promotion de la culture flamande liées aux partis historiques, le Davidsfonds pour le monde social-chrétien, et le Vermeylenfonds pour le monde socialiste, elles, n'en ont manifestement pas demandé.

Confessionnel: d'abord le monde laïque

D’un point de vue confessionnel, outre les très nombreux subsides octroyés aux écoles, hautes-écoles et universités catholiques, la ministre Valérie Glatgny a d'abord soutenu le monde laïque (215 000 euros au total au service laïque de placement familial "La Famille d'accueil Odile Henri", 101 000 euros au Service laïque d'aide aux justiciables de la province de Hainaut...). Dans une moindre mesure les mondes chrétien (avec 34 859 euros au total pour la Jeunesse ouvrière féminine chrétienne) et judaïque (860 euros à la Maison de la Jeunesse laïque juive)

Les chouchous de la ministre: le fort biais bruxellois

Plus de douze mille subsides, pour neuf compétences fonctionnelles disparates: Valérie Glatigny a, depuis 2019, eu le choix de chouchouter ses préférés, sans que ça ne se remarque trop. Son arrivée en politique et son ancrage électoral officiel à Bruxelles peuvent expliquer une partie du fort biais bruxellois de sa distribution. La libérale fait toutefois tout dans les règles. Et on aurait tort de la taxer de favoritisme: le club de football présidé par son président de parti, les Francs Borains, a perçu moins de subventions que d'autres équipes de niveau similaire, comme la RAAL, à La Louvière, ou l'Olympic, à Charleroi.

(1)  Par opposition aux nominatives et aux obligatoires, une subvention facultative est, juridiquement, une dépense qui n’est pas réglée par une loi (ou, ici, un décret) mais par un arrêté. Mais ces subventions ne sont pas distribuées par des ministres sans foi ni loi : elles sont encadrées par de nombreuses dispositions légales, qui limitent fortement la liberté du signataire. Il s’agit cependant incontestablement de la catégorie de subventions qui laisse le plus de marge à un mandataire politique pour orienter rapidement, et selon ses préférences, une partie des flux d’argent public sur lesquels il peut exercer un certain contrôle.

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