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Covid: des vaccins gaspillés?

Mélanie Geelkens
Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Gaspiller le précieux vaccin anti-Covid aurait un côté indécent. Pourtant, le risque existe, inhérent au conditionnement du produit mis au point par Pfizer-BioNtech. Les protocoles mis en place tentent de le réduire au minimum.

Surprise! Quand y en a plus, y en a encore. Les médecins chargés d’administrer le vaccin contre la Covid-19 s’en sont vite rendu compte: lorsque la fiole contenant cinq doses était censée être vide, il restait en réalité suffisamment de matière pour en administrer une sixième. Une question de seringues et d’aiguilles, en fait, dont certains types (tout à fait courants) permettent de réduire le « volume mort ». Donc, d’utiliser le fameux liquide jusqu’à la lie.

Le 8 décembre dernier, l’EMA (agence européenne du médicament) a d’ailleurs modifié ses recommandations accompagnant le fameux antidote mis au point par Pfizer-BioNtech, inoculé depuis le 4 janvier dans les maisons de repos et de soins du pays. Sur les 350.000 doses reçues ce mois-ci, 70.000 supplémentaires pourront donc être injectées, pour autant que les seringues les plus efficaces soient utilisées. Celles-ci sont distribuées par l’AFMPS (Agence fédérale des médicaments), qui n’a pas répondu à notre demande d’interview. Le 12 janvier, en commission Santé de la Chambre, le ministre Frank Vandenbroucke a annoncé que ces seringues, utilisées pour l’instant, risquaient à manquer en février, le temps de recevoir une commande qui devrait arriver en mars. Durant cette période, il faudra sans doute dire adieu à la sixième dose providentielle.

Sur les 350 000 doses reçues ce mois-ci, 70 000 supplémentaires pourront être injectées.

Il existe un autre risque de gaspillage, inhérent au conditionnement. Le sérum est donc fourni par doses de cinq. Si la résidence compte un nombre de personnes prêtes à passer sous l’aiguille qui soit un multiple de cinq, les comptes sont bons. Sinon, il en reste à injecter. « C’est pour cela que nous avons demandé aux maisons de repos de passer commande en identifiant au mieux le nombre de personnes à vacciner, détaille Jean-Michel Dogné, professeur de pharmacologie à l’UNamur et membre de la task force vaccination.

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Si, par exemple, il y en a 90, alors pas de souci. S’il y en a 91, 95 doses seront envoyées et il en restera quatre qui pourront être administrées. » A qui? Aux membres du personnel (outre ceux qui sont repris dans la phase « 1a » du processus) ; des listes d’attente ont été établies. Certains établissements procèdent par âge, pour déterminer les priorités. Les plus âgés d’abord.

Impossible rapatriement

S’il y a des volontaires, il n’y a donc pas de gaspillage. « Jusqu’à présent, il n’y a pas de retour important de la part du terrain faisant état de pertes », assure Jean-Michel Dogné. Les impératifs de conservation du précieux liquide (qui, une fois « décongelé », ne peut se conserver que cinq jours à une température entre 2 et 8 degrés) rend de toute façon impossible le rapatriement des non-consommés vers un point central pour ensuite les redistribuer.

Le vaccin Moderna, non encore injecté mais dont la Belgique a reçu les premières doses le 11 janvier, posera aussi des questions de rationalisation, étant fournis par doses de dix et nécessitant un transport limité. Une fois livré, il se conserve toutefois jusqu’à trente jours à une température de 2 à 8 degrés, ce qui pourrait faciliter l’utilisation des excédents. Acheté 30 euros la dose (contre 16,5 euros pour le Pfizer), ce serait dommage de ne pas l’utiliser jusqu’à la dernière goutte…

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