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Coronavirus: pourquoi la distanciation sociale varie d’un pays à l’autre

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

La distanciation sociale recommandée pour lutter contre la propagation du coronavirus n’est pas la même d’un pays à l’autre. 1 mètre est-il suffisant, ou faut-il aller jusqu’à 2 mètres ? Comment ces limites ont été fixées ? Explications.

De nombreux gestes barrière sont mis en place pour lutter contre la propagation du coronavirus : éviter les poignées de mains et embrassades, se laver les mains régulièrement, porter un masque dans les endroits confinés et/ou à risque, et garder une distance de sécurité avec les autres personnes. Cette « distanciation sociale », qui est en réalité une distance physique entre individus, n’est pas la même partout. 1m, 1,5m, 2m… la recommandation varie entre pays, même voisins. Une différence qui n’est pas anodine, notamment pour les vacanciers qui se rendront à l’étranger cet été.

En Belgique, le juste milieu

« L’Organisation mondiale de la Santé recommande de se tenir à, au moins, un mètre. C’est une mesure générale qui doit être appliquée par chacun, même en l’absence de symptômes ou d’exposition connue », écrit l’OMS sur son site. Concrètement, Hong Kong, Singapour, la France et la Chine suivent la directive de l’OMS qui recommande une distance minimale d’un mètre. L’Australie, la Grèce, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique ajoutent 50 cm. La Corée du Sud est partie sur l’équivalent de 1,4 mètre, les États-Unis pour 1,8 (six pieds) et le Royaume-Uni, le Canada et l’Espagne vont le plus loin avec 2 mètres.

Alors que certains interprètent le principe de prudence de manière très large, le Centre de crise en Belgique a opté pour un juste milieu. Cela doit rester vivable. Lorsque vous prenez les transports en commun ou faites vos courses au supermarché, il devient très difficile de rester à deux mètres d’une autre personne. C’est pourquoi la Belgique n’a ajouté que 50 centimètres à la directive officielle de l’OMS. Il est également utile de savoir que, par exemple, un caddie de supermarché fait environ 1,5 mètre.

Une distance historique

D’où vient la distance prônée par l’OMS? Cela remonte à une étude des années 1930 dans laquelle le chercheur William Wells (Harvard) a étudié la bactérie responsable de la tuberculose. Il a découvert que les gouttelettes émises par la toux et les éternuements s’évaporent rapidement dans l’air et tombent ensuite sur le sol à une distance de 1 à 2 mètres. Comme la grippe, le SRAS et le MERS se comportent de manière similaire, les scientifiques n’avaient aucune raison de douter de cette conclusion et nous revenons donc à cette étude près d’un siècle plus tard. Mais il est de plus en plus évident que le SRAS-CoV-2, responsable du Covid-19, n’est pas comme tous les autres virus.

Les recherches les plus récentes sur le mode de propagation du coronavirus auquel nous faisons face actuellement montrent qu’une distance d’au moins 1 mètre est le meilleur moyen de réduire le risque d’infection. Le risque d’infection est estimé à 13% à moins d’un mètre et à seulement 3% à une distance supérieure. Pour chaque mètre supplémentaire jusqu’à trois mètres, le risque est encore réduit de moitié.

Une étude commandée par l’OMS remise en question

Des scientifiques remettent par ailleurs en question une étude influente commandée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le sujet, selon The Guardian. Cette étude suggère qu’une réduction de 2 mètres à 1 n’augmenterait que marginalement le risque d’infection, de 1,3% à 2,6%. Mais les scientifiques qui se sont penchés sur ces travaux ont trouvé des erreurs qui, selon eux, compromettent les résultats au point qu’on ne peut pas s’y fier.

Cette étude, publiée dans la revue The Lancet, est la dernière en date à avoir été critiquée par des experts qui craignent qu’en pleine pandémie, certains documents de recherche soient rédigés, révisés et publiés trop rapidement pour que des contrôles de qualité suffisants puissent être effectués. Au début de ce mois, le Lancet et une autre publication d’élite, le New England Journal of Medicine, ont été contraints de retirer des études sur les coronavirus après l’apparition de défauts dans les articles.

Une donnée indicative, qui dépend des situations

Si les pays recommandent des distances différentes, il y a également une différence dans la manière d’aborder la distance physique. Ainsi, la recommandation de l’OMS « d’au moins un mètre » indique une limite sous laquelle il ne faut absolument pas être. Les pays qui recommandent davantage indiquent plutôt une distance plus précise à maintenir. Mais ces chiffres sont surtout une donnée indicative : puisqu’on ne sait pas tout sur le coronavirus, on peut considérer ces recommandations comme une base. Mais de manière épidémiologique : plus la distance est élevée, plus les individus se protègent les uns des autres.

Cela dépend également des situations. Si on reprendre la recommandation belge, on peut considérer que le 1,5m ne s’applique qu’en situation statique. Selon une étude belge, il convient cependant de garder une distance physique plus importante pendant le sport, car lorsque vous bougez, que vous toussez ou éternuez, des gouttelettes se déposent dans votre sillage et il y a un grand risque que ceux qui passent après vous absorbent ces gouttelettes. Il est donc recommandé de faire de l’exercice côte à côte. Si vous faites cela l’un après l’autre, il faut alors tenir compte d’une distance plus longue : pour la marche, c’est 4 à 5 mètres, pour la course c’est 10 mètres et pour le vélo à 30 à 40 km/h, au moins 20 mètres.

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