Un "suicide électronique programmé" rendu possible grâce à un système requérant uniquement de l'humidité. © WaffOzzy/getty images

« Cet engin s’autodétruira dans 5 secondes »

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Des appareils électroniques comme une carte de crédit égarée ou une clé USB contenant des informations sensibles, qui s’autodétruisent de façon contrôlée au contact de l’humidité…

Une prouesse scientifique aux multiples applications potentielles, dans le domaine médical, militaire, de la sécurité ou de l’environnement.  » Ce message s’autodétruira dans 5 secondes  » : déjà dans les années 1970, c’est sur cette fameuse rengaine que se pulvérisaient les instructions laissées, sur bande magnétique, aux agents secrets de la série très populaire Mission impossible.

Si le concept de l’autodestruction électronique relevait jusqu’il y a peu de la fiction pure, des scientifiques américains et chinois viennent de mettre au point un système de  » suicide électronique programmé « . Des engins se désintègrent, à distance et à la demande, tout simplement au contact de l’humidité ambiante. Jusqu’à présent, la plupart des expériences concluantes menées dans ce domaine nécessitaient que l’objet soit plongé dans une solution aqueuse ou dans un biofluide, ce qui limitait considérablement la précision du processus.

Le docteur Cunjiang Yu, de l’université de Houston, et ses collègues de l’université de Pékin ont mis un point un système requérant uniquement de l’humidité. Concrètement, ils créent un circuit, au timing programmé, dans lequel sont intégrées des macromolécules entièrement dégradables au contact de l’humidité. Ces polymères vont alors s’oxyder et dissoudre les métaux. L’acide carboxylique, issu de cette hydrolyse, terminera le travail de décomposition. Pour l’heure, ladite dégradation physique intervient au terme de quelques jours, de quelques semaines, voire plus. Mais les scientifiques n’ont pas dit leur dernier mot.

Le concept de  » l’électronique éphémère  » désigne tout engin qui s’autodétruit une fois sa mission accomplie. Depuis quelques années, il agite sacrément le monde scientifique. Et pour cause : ce concept-là pourrait chambouler radicalement de nombreux domaines comme celui de la gestion des déchets électroniques, par exemple. Ainsi, un téléphone ou une imprimante hors d’usage ne finirait plus à la décharge, mais pourrait être désintégré bien proprement, écologiquement.

Au niveau militaire, la pulvérisation à distance des armes d’un soldat tué éviterait que l’ennemi ne s’empare de sa technologie. Même idée pour les agents secrets. De façon plus prosaïque, une carte de crédit ou une clé USB égarées pourraient, elles aussi, être liquidées à la demande. Au niveau médical, des engins éphémères distribuant des médicaments dans le corps du patient éviteraient à ce dernier une douloureuse opération. De là à ce que de fortunés parents, soucieux de la sécurité de leur enfant, souhaitent faire implanter des GPS temporaires, sous la peau de leur progéniture, il n’y a qu’un pas. Ethique.

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