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« Cet Euro doit conférer une place à notre sport »

A partir de ce lundi 28 janvier, Anvers est la ville hôte de l’Euro de futsal. Présentation de ce sport spectaculaire avec les principaux acteurs belges.

Par Jens D’Hondt

Au début de ce mois, les Diables Rouges de futsal étaient un peu patauds en se retrouvant sous les feux de la rampe, à l’occasion de la Football Battle, un tournoi rassemblant cinq équipes professionnelles. Leur sélectionneur a assisté à la présentation de cette Football Battle à l’hôtel de ville d’Anvers. « N’hésitez pas à m’interrompre si je parle trop », nous a-t-il prévenus. « Je n’ai pas l’habitude de donner des interviewes. » Alain Dopchie est le sélectionneur en question. Dessinateur industriel, âgé de 49 ans, il est originaire d’Ath. Il est sélectionneur après ses heures de travail, de même que la plupart de ses joueurs qui sont amateurs.

Ce sport est en proie à un étrange paradoxe, souligne Karim Bachar, un ancien international devenu entraîneur du FT Anvers, un des ténors du pays. « Le football en salle est un sport récréatif très populaire. Les halls sont remplis tous les jours et on dirait que chaque entreprise possède sa propre équipe. Pourtant, nous ne parvenons pas à transposer cette énorme popularité dans le championnat professionnel. Cet EURO doit enfin conférer une place à notre sport. »

Le Brésil

L’Amérique latine est le berceau du futsal, qui a gagné nos contrées au début des années 70. Les règles privilégient un football technique et offensif. La discipline tactique y est essentielle mais ce sont la créativité, l’improvisation et la vitesse de réflexion qui font la différence. Cristiano Ronaldo, Messi, Iniesta et Xavi ont fait leurs classes en salle. Plus près de chez nous, c’est aussi le cas de Moussa Dembélé, Axel Witsel, Dries Mertens. Hasard ou non, le sport s’est essentiellement développé dans le Limbourg, à Anvers et dans le Hainaut, des provinces où beaucoup d’immigrés turcs, marocains et italiens se sont installés.

Le principal atout du football en salle réside dans sa simplicité : une salle, un ballon, dix hommes et c’est parti. Ces dernières années, le FT Anvers et Châtelineau se partagent les titres. Ce sont aussi les principaux fournisseurs de l’équipe nationale. Il y a dix ans, la Belgique a même compté un club de haut niveau en Europe, Action 21 Charleroi, qui a disputé plusieurs finales de Coupe d’Europe et a enlevé dix des onze titres distribués entre 2000 et 2010. Cette pluie de trophées a coïncidé avec l’arrivée d’un solide contingent brésilien. Liliu a débarqué en Belgique il y a dix ans, avec six compatriotes. Depuis, il est devenu international belge. Tous les favoris de cet EURO ont d’ailleurs une touche brésilienne. « Mon pays natal reste la référence en futsal, un sport incroyablement populaire là-bas », explique Liliu. « Toutes les salles sont pleines. Le gouvernement encourage la pratique de ce sport. De Pelé à Neymar, toutes les grandes vedettes brésiliennes ont joué en salle. Des clubs comme Flamengo, les Corinthians et Cruzeiro ont une salle, qui constitue un passage obligé dans la formation des jeunes. En Belgique, c’est l’inverse : mon fils joue à Mons et il ne peut même plus s’adonner au futsal, sans que le club ait fourni un motif. Je ne comprends pas pourquoi le futsal ne décolle pas en Belgique. »

Par idéalisme

L’Espagne est la grandissime favorite du tournoi. Elle est en mesure de s’adjuger un cinquième sacre d’affilée à Anvers. L’Italie et la Russie sont ses principales rivales. Il y a manifestement une fracture géographique en Europe : tous les prétendants au titre sont issus du Sud et de l’Est. Les grandes nations du football, comme l’Allemagne, la France et l’Angleterre, sont même absentes du tournoi. La Belgique, elle, n’a plus engrangé de victoire à un EURO depuis 1996. Tête de série, notre pays a toutefois eu la main heureuse lors du tirage au sort. L’Ukraine et la Roumanie, respectivement numéros huit et onze au classement mondial, sont certes des adversaires sérieux mais elles n’émargent pas au cercle des favorites. La Belgique, 28e, s’appuie sur les automatismes acquis au niveau des clubs. Cinq joueurs viennent de Châtelineau – le capitaine Chaibai, Rahou, Dujacquier, les Brésiliens Liliu et Lucio, tandis que Sababti, Hitou et El Ghaadauoi défendent l’honneur d’Anvers. Leur statut d’amateur leur fait subir un retard physique. En plus, l’attaque constitue un point d’interrogation car les avants Rahou et Hitou ont vu leur préparation contrariée par des blessures.

Deux joueurs vont beaucoup manquer à l’équipe. Yassine Achahbar, un grand espoir du FT Anvers, a été suspendu pour consommation de cannabis et, soupçonné de trafic de drogue, il s’est même retrouvé en prison l’année dernière. Autre absent, le dribbleur Karim Bali, qui s’est déchiré le tendon d’Achille le mois dernier. Aux yeux de beaucoup d’observateurs, Bali aurait pu devenir une des étoiles de ce tournoi. Cette sélection peut toutefois compter sur son esprit d’équipe, malgré les origines très variées de ce groupe multiculturel, ou justement grâce à celles-ci. Dopchie a connu beaucoup de joueurs quand il entraînait les espoirs et il a initié un climat plus professionnel. Désormais, les vidéos de scouting n’arrivent plus après le tournoi… Sous sa férule, le nombre de forfaits a sérieusement diminué et les indemnités ont augmenté. Les joueurs le qualifient de « vrai idéaliste », qui se démène pour réussir malgré des moyens très limités. Dopchie est issu du football en plein air mais il veut lancer le futsal. « Je mène un combat quotidien pour sortir notre sport de l’anonymat. Un peu d’ouverture d’esprit pourrait suffire à ouvrir des portes entre les sports. Beaucoup de footballeurs abandonnent vers l’âge de 18 ans, pour l’une ou l’autre raison. Hélas, ils arrêtent carrément le sport alors qu’ils pourraient avoir un avenir en salle s’ils avaient appris à connaître le futsal plus tôt. »

L’enthousiasme contagieux de Dopchie et l’avantage du terrain sont de nature à donner des ailes aux Diables Rouges. À partir des quarts de finale, le tournoi se poursuit au Sportpaleis. La Belgique aurait réussi son tournoi si elle atteignait cette scène mais à ce niveau, elle devra affronter un ténor comme la Russie ou le Portugal.

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Retrouvez l’intégralité de cet article et l’interview du capitaine de l’équipe dans Sport/Foot Magazine.

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