Ses propres expériences

Le cadet des frangins essaye de limiter la casse.

Depuis le début de la saison, Olivier Rochus est marqué par la malchance. Alors que son niveau de tennis était assez élevé, il n’a pu qu’en de trop rares occasions en profiter. Diverses blessures l’ont en effet éloigné des courts et, quand il avait la possibilité de prendre part à un tournoi, la douleur ne lui permettait pas de s’exprimer totalement. Aujourd’hui, à quelques jours de Roland Garros, le cadet des frères se dit physiquement au point et espère ne pas trop descendre au classement mondial : « Globalement, je suis ok. Mon problème au dos est oublié. J’ai bien quelques contractures de temps en temps mais, physiquement, je peux dire que je suis au point ».

Comment résumeriez-vous les quatre premiers mois de votre saison 2001?

Jusqu’ici, elle n’est pas très bonne. J’ai fait une demi-finale en Challenger et un bon match en Coupe Davis et aussi un quart de finale à Houston mais, à part cela, je n’ai pas eu beaucoup de chance. En fait, c’est râlant parce que je jouais bien. Chaque fois que j’ai repris le collier, je jouais pas mal mais à cause des blessures, je n’ai pas pu prendre part à la tournée américaine (Delray Beach, Indian Wells et Miami) et, lors de la tournée en Australie, je n’étais pas prêt. En fait, jusqu’à aujourd’hui, j’ai peut-être pu aller à fond pendant quatre tournois. Dans les autres, j’étais handicapé par une douleur ou une blessure.

Cela laisse-t-il des traces moralement?

Non, pas trop. Il ne sert à rien de regarder vers le passé. Il y a de beaux tournois qui arrivent et je préfère me concentrer sur ceux-là plutôt que de regretter mes prestations passées. Mais bon, c’est sûr que c’est dommage car je n’avais quasiment aucun point à défendre au cours des quatre premiers mois et que si j’avais pu jouer, je me serais retrouver aux alentours de la 50e place mondiale. Tandis que maintenant, même si je réussis de bons résultats, je risque de descendre. En fait, si je parviens à garder ma place et à ne pas sortir du Top 100, ce serait déjà pas mal. Il faut en fait que je limite la casse. Si j’avais pu faire des points en début d’année, je me serais présenté très relax pour la saison que j’affectionne particulièrement, à savoir celle qui commence à Roland Garros. Mais bon, c’est comme cela. Je sais que je devrais logiquement redescendre.

Cela vous fait peur?

Non, pas vraiment car je sais que l’année prochaine, il y aura cinq mois pendant lesquels je n’aurai pas de points à défendre. J’aurai alors la possibilité de revenir à un meilleur niveau. Mais bon, je vais peut-être devoir repasser par les challengers dans quelques semaines si je retombe 120, 130.

Quel objectif de classement vous fixez-vous?

Il faudrait que je sois aux alentours de la 100e place après le tournoi de Palerme. Si tel est le cas, j’entrerais toujours dans les tableaux finals des tournois du Grand Chelem. Mais, pour y arriver, il faut que je prenne au moins 2 ou 300 points dans les tournois à venir.

Etre dans cette situation de défense de points vous stresse au moment des matches?

Non, pas du tout. Je n’y pense pas mais chaque match gagné me soulage malgré tout. Je vais tout faire pour bien jouer mais le niveau est assez élevé et tout dépendra du tirage. S’il est favorable, ok, sinon, on verra. Mais c’est vrai que c’est dommage car j’aurais pu exploser.

Quand vous avez battu Marat Safin à la Hopman Cup en début d’année, vous vous êtes dit que vous étiez à l’aube d’une grande saison?

Non, pas du tout. Je savais que c’était le lendemain du Nouvel An (il rit). Qu’il n’avait pas joué un grand match. Je ne me suis pas dit que j’avais battu le Numéro 1 mondial.

Vous avez-été un peu dans le trou à cause de votre blessure?

Non, pas vraiment. J’avais vraiment envie d’aller à Indian Wells et Miami car je n’ai jamais pris part à ces compétitions. Mais je n’ai jamais été vraiment découragé car je n’ai pas besoin de beaucoup de temps pour retrouver mon niveau. En général, en quinze jours, je récupère mon tennis, ce qui n’est pas le cas de beaucoup de joueurs.

Vous dites que vous allez peut-être devoir rejouer des Challengers. C’est quelque chose qui vous vexe?

Non. Andre Agassi a aussi dû repasser par là. Vous savez, les Challengers, aujourd’hui, sont des tournois de très haut niveau.

Quelle est la différence entre un joueur de Challenger et un autre qui est habitué aux tournois majeurs?

Tennistiquement, il n’y en a pas. Sur un match, un 200e mondial peut être aussi fort qu’un 50e. Par contre, il est forcément moins constant.

C’est aussi difficile de gagner un match dans un Challenger que dans un tournoi du circuit?

Oui, bien sûr. D’autant que les joueurs de Challenger ne balancent jamais un match. Alors que, sur le circuit, cela peut arriver. Je viens de voir Pioline prendre 6-3 6-0 au premier tour de Rome. Il est clair qu’il balançait.

Cela arrive souvent?

Souvent, non. Mais j’ai vu Agassi perdre au premier tour à Atlanta contre Thomann et, s’il n’a pas balancé, il ne s’est pas accroché non plus. Il est venu prendre sa garantie et, comme il n’a pas joué à fond, il valait un 300e mondial. Ceux qui ont plein d’argent, ils n’en n’ont rien à faire de balancer. Par contre, un joueur qui rame en Challenger et qui a besoin d’argent ne va jamais te laisser gagner.

Vous avez déjà balancé un match?

Euh, non, jamais.

Même en double?

( il rit) En doubles, euh.. Peut-être une ou deux fois.

Vous avez réellement fait votre entrée sur le circuit au cours d’une saison 2000 exceptionnelle. Quel est, un an plus tard, le jugement qu’ont de vous les autres pros?

Les joueurs rigolent encore et toujours de ma taille. Mais bon, cela me fait plutôt rire. On s’amuse souvent avec cela.

Vous rigolez ou vous en avez ras-le-bol?

Non, avec ceux que je connais bien, cela me fait plutôt rire.

Après un an et demi de top niveau, à quelle place estimez-vous devoir vous situer?

Parfois, je vois des joueurs qui sont Top 50 alors que je trouve qu’ils n’ont vraiment rien de spécial. Par contre, parfois, on croise un 150 ou 200e et on se demande comment il n’est pas plus haut. Si je me compare à certains, je me dis que je devrais être 50e mondial. Mais, pour cela, il faut être constant tout au long de l’année. Si l’on n’a pas trop de réussite avec le tirage au sort, on peut faire 4 ou 5 premiers tours d’affilée. Et alors, on perd un peu la confiance. Cela peut aller très vite dans un sens ou dans un autre.

On traverse parfois des périodes sans se rendre compte de ce qui se passe?

Oui, parfois, les semaines et mes matches s’enchaînent sans que l’on perçoive exactement ce que l’on fait. On joue, on perd, on prend l’avion et on s’installe dans un hôtel sans réellement savoir où on en est. Il y a tellement de tournois que parfois, on ne fait pas le point.

Que pensez-vous du jeune Andy Roddick, qui a un an de moins que vous?

Il sera numéro 1. Si pas bientôt, dans un an. Il sert tous ses premiers services à 220 ou 230 km à l’heure. Même Sampras est ridicule. Ses deuxièmes services vont à 180, 190 avec un effet tel que tu dois jouer nettement au-dessus de l’épaule. Il sert si bien qu’il touche les spectateurs qui sont derrière la ligne de fond. C’est à un point tel que c’est ridicule de jouer contre lui. Il a une force dans le bras, dans l’épaule. C’est du jamais vu. Il sert tout le temps plus vite que Rusedski.

C’est frustrant de constater qu’un joueur du même âge que vous est capable, sur un coup, d’être cinquante ou soixante places plus haut?

Non, c’est comme cela. Il est sans doute né pour être numéro 1 mondial, tant mieux pour lui. Il sera plus riche que moi ( il rit).

C’est la dernière année de Pete Sampras?

Oui, je le pense sincèrement. A mon avis c’est la fin. Agassi, non, encore un an ou deux.

Sinon, il y a d’autres joueurs en train d’émerger?

Malisse, vous connaissez? Non, sérieusement, il est bien, Xavier. Il s’entraîne avec Felgate, l’ancien coach de Tim Henman, et tout à l’air de bien se passer. Je pense qu’il peut réussir une très belle saison.

Quelle est votre réaction lorsque vous enregistrez l’arrêt de carrière de Dewulf, Van Herck, Goossens?

Je trouve qu’ils arrêtent assez tôt, qu’ils sont assez jeunes mais je sais qu’ils ont eu beaucoup de problèmes. Van Herck, par exemple, a souffert du dos et n’a pas été capable de retrouver son meilleur niveau. Dewulf, c’est un peu différent, c’est plus mental. Il n’a jamais vraiment aimé le tennis.

Dewulf a-t-il été un exemple pour vous?

Oui, sûrement, mais inconsciemment. Quand je jouais le tournoi junior de Roland et que Filip était en demi-finale, j’allais voir ses matches et j’étais content de constater qu’il y avait moyen. Cela m’a fait rêver, il a prouvé qu’un Belge pouvait y arriver.

Vous avez beaucoup parlé avec lui?

Non, Filip n’a jamais été un gars qui parlait beaucoup. Je me suis toujours très bien entendu avec lui mais on n’a pas parlé de son expérience. On ne s’est jamais assis autour d’une table pour qu’il me parle de ses matches à Roland.

Vous étiez prêt à entendre ses éventuels conseils?

Non, moi, je suis plutôt du genre à aimer faire mes expériences tout seul. Je n’aime pas quand on me dit ce que je dois faire. Je suis un gars assez têtu. Quand on me dit ce que je dois faire, je peux parfois le prendre mal.

Bernard Ashed

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