Passeports carolos

Le Pays Noir n’est-il pas déjà trop petit pour être le terreau de toutes ses ambitions sportives?

Jean-Michel Saive a quitté le Pays de Liège pour éclater à Charleroi. Mr Tennis de Table est aussi connu que… Tintin en Chine et, que ce soit à Macao ou à Shanghai, le ping de Charleroi y a la cote. De ces champions hors norme aux sportifs anonymes, il y a une volonté régionale qui ne manque pas de dash.

Claude Despiegeleer, échevin des Sports de la capitale du Pays Noir, sait que son département est important: « Cela nous a permis de passer de la sinistrose à une dynamique du succès. Toute la région a retrouvé la fierté, le goût du travail et du succès. Moi, je ne parle plus de Pays Noir. Cela a un côté négatif, industries du passé, etc. Je ne renie rien mais, tout en se souvenant de ses racines, il convient de parler du Pays de Charleroi. Le stade du Mambourg porte ce nom-là et le sport le popularise: c’est le symbole de tout le redéploiement de la région ».

L’homme politique carolo sait que le sport n’éradiquera évidemment pas la criminalité organisée (braquages, hold-ups, cambriolages, car et home-jackings), qui est désormais combattue par les grands moyens. Mais rien de tel pour aider les jeunes, notamment.

L’électrochoc Somme

Comment se fait-il que le Hainaut et, de l’autre côté du pays, le Limbourg, deux provinces démunies par rapport aux autres, soient de loin les plus sportives du pays?

« Ce sont des régions où la jeunesse, et donc le dynamisme, ont créé la prospérité dans un passé finalement pas si lointain. Malgré la récession, ces qualités sont restées, enrichies par le brassage des populations unies dans leurs diversités autour du sport. L’identification via le sport est forte dans les clubs, c’est positif. Positiver l’image de Charleroi: c’est ce que Jean-Claude Van Cauwenberghe, alors bourgmestre, voulait faire après avoir redressé les finances de la ville de 1983 à 1986. Il a pensé au sport qui, sa popularité aidant, devait avoir le meilleur rendement par rapport à nos moyens limités », commente Claude Despiegeleer.

Charleroi-la-Sportive: un beau slogan était né, c’était le début d’une aventure: « L’arrivée d’ Eric Somme a été l’électrochoc dont nous avions besoin. Il a compris que Charleroi était en attente d’émotions avec ses atouts: 210.000 Carolos et un rayonnement sur une région plus élargie de plus ou moins un demi-million de personnes. Charleroi est un aimant et le sport de haut niveau pouvait en renforcer le pouvoir attractif. Eric Somme a réussi à le faire via le basket. Charleroi n’a pas misé d’argent dans son défi. Somme voulait des infrastructures pour révéler son boulot sportif. Pour nous, c’était le bon deal. En 15 ans, la Ville de Charleroi a investi 37.500.000 d’euros pour rénover ou construire l’outil sportif. Nous consacrons 12 millions d’euros par an au sport, ce qui représente 3% des dépenses de la Ville. L’effet Somme a joué et tout s’est déclenché », ajoute l’échevin carolo.

Le football lui doit aussi beaucoup: « Oui, il a pensé à la solution Scifo, à son impact, à son prestige », reconnaît Claude Despiegeleer.

Reste à savoir ce que Charleroi serait devenu sans ses réussites sportives actuelles. « Le présent et l’avenir auraient été moins attractifs pour les jeunes. Mais cette région est faite pour vivre en harmonie avec le sport. Charleroi est la capitale du sport au niveau de la Wallonie et de la Belgique. Mieux: je ne connais pas d’autres villes européennes de ce format où le sport, de haut niveau ou pas, est un credo pour tous », dit encore l’élu carolo.

Jean-Mi et Action 21

Le tennis de table a suivi et le football en salle est en train de vivre la même explosion…

« L’effet Jean-Mi a secoué tout le monde. Charleroi a cru en son charisme. Il a conquis la Belgique et l’Europe avec la Villette. Tout cela avant que ce club ne devienne même champion du monde. Je ne sais pas si notre pays a bien mesuré l’impact de cet exploit. A l’heure où la Chine s’ouvre de plus en plus sur le monde, c’est important pour Charleroi. Un tel succès vaut de nombreuses campagnes de promotion d’un pays. La Villette est devenue une référence, a fait venir des joueurs aussi réputés que Primorac et Samsonov.

Quant au football en salle, je dois avouer qu’au départ, je ne savais que penser de ce sport. Mais j’ai vite été convaincu par ses potentialités. Le public adore, il y a du monde, le confort est assuré. A mon avis, le foot en salle n’en est même qu’à ses débuts, certainement dans nos contrées. Kickers et Action 21 sont dirigés par des gens de qualité. Ils ne pensent qu’à leur sport. En accompagnant Action 21 à l’étranger et bien entendu lors de sa brillante campagne européenne, j’ai expliqué 100 fois où était Charleroi et quels étaient ses atouts. C’est une locomotive de plus », reconnaît Claude Despiegeleer.

Idées gagnantes

A Charleroi, il y a encore les Dauphines et le Gymnos mais aussi le football. Autre sport, autre format, autres obligations financières: le moment n’était-il pas venu de fusionner le Sporting et l’Olympic? Cette synergie, c’est un « machin », un début de fusion non avoué. On peut penser qu’il y a là, pour une fois, un manque de vision. Eric Somme, gourou de Charleroi-la-Sportive, trouve que c’est bizarre. A notre avis, il serait passé tout de suite à la fusion…

« Non, je ne crois pas. Les mentalités ne sont pas prêtes pour une fusion. Les deux clubs peuvent trouver ce qui leur convient dans cette synergie: échanges de joueurs et formation des jeunes. D’ailleurs, en basket, je pense que les succès des Spirous s’expliquent aussi par l’entente avec Gilly. Il y a complémentarités entre l’Olympic et le Sporting. Elles seront encore plus évidentes quand les joueurs de D1 pourront militer en D3 mais en restant à la dispositon de leur club de l’élite », réfute Claude Despiegeleer.

Les Zèbres se serrent la ceinture. Ce n’est un secret pour personne. Le Pays Noir semble trop petit pour ses ambitions sportives alors qu’il y a trois clubs de la région en D1.

« A mon avis, il y a place pour trois clubs dans la région. Charleroi n’a qu’un club de D1 en foot: les Zèbres. La Louvière a créé une magnifique émulation et je souhaite que Mons monte en D1. Pourquoi le Hainaut ne pourrait-il pas vibrer autant que la province d’Anvers? Nous avons moins d’argent mais ce terroir a tout de même prouvé à travers plusieurs sports qu’il avait de l’enthousiasme et des idées gagnantes ».

Pierre Bilic, ,

« L’effet Saive a secoué tout le monde » (Despiegeleer)

« Je souhaite que Mons monte en D1 » (Despiegeleer)

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