LE ROI Léo

Il a fallu une demi-décennie à l’Argentine pour se réconcilier avec Lionel Messi, grâce à Alejandro Sabella, qui aura 60 ans en automne, mais n’est sélectionneur que depuis trois ans. Sa nouvelle mission : offrir un nouveau titre mondial à l’Argentine.

2 septembre 2011. L’Argentine dispute un match amical contre le Venezuela à Calcutta, en Inde. C’est le premier sous la direction d’Alejandro Sabella, embauché après une Copa America décevante en Argentine même.

Sa première idée : confier le brassard à LionelMessi mais avant, il veut tâter le terrain auprès d’un des leaders du groupe, JavierMascherano. Celui-ci étant d’accord, Messi devient le nouveau patron.

L’Argentine s’impose 1-0 et la pulga, non contente de délivrer l’assist, force surtout le respect. C’est là, selon Daniel Avellaneda, journaliste du groupe Clarin, qu’a débuté une aventure qui pourrait mener au succès bientôt.

Une des principales missions de Sabella consiste à réconcilier Messi avec l’Argentine. Aucun de ses prédécesseurs – Alfio Basile, Maradona, Sergio Batista – n’y est parvenu. Messi, international depuis fin 2007, déçoit son pays. Un moment donné, il a même disputé seize matches sans trouver le chemin des filets. Impensable dans le chef du meilleur footballeur du monde. Il faut donc changer la donne. Et Sabella va s’y employer.

Tevez incompatible avec Messi

Cet automne 2011 est important pour une autre raison, poursuit Avellaneda. Délivrée du Brésil, hôte du tournoi, l’Argentine devait normalement se qualifier sans problème mais elle a mal débuté sa campagne. À une victoire contre le Chili ont succédé une défaite au Venezuela et un nul à domicile contre la modeste Bolivie. Ensuite, l’Argentine a dû affronter la Colombie, en déplacement.

Une autre étoile a fait basculer le match : El Kun Agüero. Entré en seconde période, à 1-0, il a permis à l’Argentine de s’imposer 2-1. Agüero, GonzaloHiguain, Messi et Angel Di Maria : Sabella a subitement trouvé son attaque. Et ce, au détriment de CarlosTevez, dont ce sera la fin, du même coup, en équipe nationale.

De fait, le courant n’est jamais passé entre Tevez et Messi, même si Maradona, qui avait un faible pour le héros populaire qu’était Tevez avait tout fait pour réconcilier les deux hommes en Afrique du Sud.

Malgré le titre de la Juventus, malgré ses buts en Italie, et bien qu’il ait plus de qualités qu’EzequielLavezzi ou RodrigoPalacio, Tevez n’a donc plus fait partie des plans de bataille.

Depuis ce soir-là, à Barranquilla, tout se passe bien. En juin 2012, quand l’Argentine gagne 4-3 contre le Brésil, au New Jersey, et que Messi marque trois buts, l’Argentine oublie Maradona, à qui la Pulga n’a eu de cesse d’être comparé depuis le début de sa carrière.

La fin d’une longue bouderie

Ce jour-là, Messi conquiert les coeurs de ses compatriotes et les réconcilie avec leur équipe nationale, qu’ils boudaient depuis l’Afrique du Sud et la mauvaise Copa America. Deux ans plus tard, ils rêvent de l’or au paradis car le Brésil est un paradis – tropical – aux yeux des Argentins. Messi, auteur de 18 buts en 21 parties sous Sabella, aura 27 ans pendant le tournoi. L’âge idéal pour un footballeur.

Cette saison, Barcelone n’a pas été bon mais cela ne tracasse pas Sabella. L’équipe nationale et le club sont deux choses différentes. Il ne pense pas non plus que Messi se soit ménagé en prévision du Mondial.  » Il est bien trop sérieux pour ça.  »

Pour Sabella, un coach doit avoir trois qualités : s’y connaître, travailler d’arrache-pied et véhiculer un message clair. Parler le moins possible mais être clair. Il joint les actes aux paroles. Beaucoup d’observateurs jugent que la défense est le point faible de l’équipe, avec des arrières latéraux, PabloZabaleta et MarcosRojo, qui montent peu. Il peut vivre avec la critique mais il signale quand même que les quatre joueurs (les backs sont complétés dans l’axe par Federico Fernandez et EzequielGaray) ont d’autres tâches dans leur club et qu’ils ne restent pas sur une mauvaise saison. Il faut juste peaufiner le tout.

Comme à Pékin

Mascherano est la plaque tournante de l’entrejeu, flanqué de Fernando Gago, avec Lucas Biglia ou Maxi Rodriguez en alternatives sur le banc. Les deux avants doivent se déporter vers les flancs pour créer des espaces pour Messi. Et Di Maria n’a-t-il pas été l’homme de la finale de Lisbonne, opposant les deux phalanges madrilènes ?

Le but pose également problème. Deux des trois gardiens sont réserves dans leur club, explique notre collègue : Sergio Romero à Monaco et Mariano Andujar à Catane. Pour différentes raisons, Wilfredo Caballero, le meilleur gardien argentin en Europe, n’entre pas en ligne de compte. La presse ne comprend pas mais Sabella estime que Romero ne l’a jamais déçu et il s’en tient donc à lui. Il a posé son choix en fonction du groupe, dont les éléments de base se développent ensemble depuis des années.

Ici, l’Argentine dresse un parallèle avec la Belgique. Une grande partie de notre sélection a entamé ensemble son aventure internationale aux Jeux de Pékin, en 2008. La Belgique a terminé quatrième, battue par le Brésil dans la finale pour le bronze. L’Argentine a gagné les JO. Sa sélection ressemblait fortement à l’actuelle : Agüero, Mascherano, Messi, Di Maria, Gago, Romero, Zabaleta, Garay. L’équipe qui entame le Mondial contre la Bosnie dimanche est quasiment une copie de celle qui a triomphé à Pékin et a gagné tous ses matches. Avant de tenter de remporter un nouveau titre ?

PAR PETER T’KINT

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