Décompresser

Après une saison calamiteuse, l’Albert descend en D2. Les confidences de l’ex-capitaine devenu adjoint.

Le rideau est tombé. Après trois saisons au plus haut niveau, Mons retrouvera l’antichambre de l’élite. La défaite encourue dans leurs installations û toutes neuves û contre Mouscron (0-2) ne laisse aux Dragons plus aucun espoir. Multipliant les erreurs tout au long de la saison, les dirigeants hennuyers ont récolté le fruit de leurs décisions.

Symbole de cette année chaotique, Olivier Suray. A la base de l’affaire Nutella qui signa le début de la fin de l’ère Brio, il connut les affres du banc sous Jos Daerden avant d’aboutir comme adjoint de Michel Wintacq. Expérience mitigée :  » Ce n’est pas sur les trois, quatre derniers matches que Mons a perdu son championnat mais sur les deux dernières saisons. C’était la chronique d’une mort annoncée. On a montré de la combativité contre Bruges mais notre tâche ne consistait qu’à défendre tandis que contre Mouscron, on devait faire le jeu. Pour gagner une rencontre, il faut marquer ce qu’on n’a pas réussi à faire lors de nos deux dernières sorties. Contre Mouscron, on a disposé de plusieurs occasions mais on n’a pas réussi à cadrer un seul tir « .

Quel sera ton avenir ?

Olivier Suray : Nous verrons cette semaine. Cela dépend du projet de Mons en D2. Est-ce que le club voudra investir sur les jeunes, continuera-t-il à être professionnel ou semi-pro. Ma décision dépendra de tous ces paramètres. J’aimerais bien être fixé sur mon sort rapidement mais d’un autre côté, je ne sais pas à quoi j’aspire. La saison fut tellement stressante que je ne me suis pas encore concentré sur mon avenir. Je reste ambitieux et j’aspire encore à évoluer en D1 même si en D2, je pourrais peut-être combiner le poste de joueur et d’adjoint. Mais nous n’en sommes pas encore là. Après Anderlecht, il me faudra dix jours de tranquillité pour décompresser. J’espère simplement que les clubs ne penseront pas que, parce que j’ai accepté ce poste d’adjoint, ma carrière de joueur est derrière moi.

Il s’agit de ta première relégation…

Comme joueur, je n’avais jamais basculé. Pourtant, j’en ai connu des clubs délicats comme La Louvière, Beveren sans oublier mes deux expériences en Turquie (Altay Izmir et Adanaspor). J’aurais peut-être dû rester dans le groupe.

Dès la fin de saison dernière, un signe t’était envoyé. Tu ne faisais plus vraiment partie des priorités ?

J’avais passé les six derniers mois de la saison passée avec un staphylocoque dans le corps. Pour ce genre de blessure, on a déjà amputé des gens. Sur ce coup-là, j’avais un peu fait l’inconscient. Je voulais aider Brio et le club et à la fin de saison, alors que l’on m’avait promis une augmentation, on me dit que techniquement et physiquement, j’avais déçu et que je ne devais plus m’attendre à avoir automatiquement une place de titulaire.

 » Brio et Martorelli sont brûlés  »

A partir de moment-là, tu n’étais plus en odeur de sainteté auprès de Brio…

Je me suis dit qu’il manquait un peu de respect et puis, pour une simple tartine au choco, il m’a retiré de l’équipe. Et en plus, avant un Mons-Charleroi, match que je désirais disputer plus que toute autre rencontre.

Mais tu avais tes torts dans cette histoire, non ?

J’avais pris ce qu’il y avait sur le buffet. Brio m’a dit que ce n’était pas bon et je lui ai répliqué que ce n’était pas plus mauvais que la confiture ou le jambon de Parme. Il m’a fait trois remarques et puis je l’ai vu écrire quelque chose sur sa feuille. Je savais à quoi m’attendre mais ce n’est que durant la théorie, quand j’ai vu que je ne faisais pas partie de l’équipe, que j’ai pété un câble (sic) et que je l’ai insulté. J’étais hors de moi, à deux doigts de le frapper. Je me sentais trahi. Pourtant, j’ai senti dans toute cette histoire que le club me soutenait ou se servait de cet alibi pour mettre Brio au pied du mur. Pendant une semaine, je ne voulais plus rien savoir. Même plus m’entraîner ou rester dans le noyau. Et puis quand j’ai vu les réactions que cela déchaînait et que finalement, c’était Brio qui s’attirait le ridicule, j’ai essayé de trouver une porte de sortie et j’ai présenté mes excuses.

Comment le club est-il arrivé à cette situation avec Brio ?

Le président Leone a cru Brio et Giocondo Martorelli dans leurs discours. Au lieu de finir avec de très bons joueurs, on s’est retrouvé avec un noyau plus que moyen. Je me rappelle lors du stage d’avant saison que Michel Wintacq avait essayé de prévenir Leone que l’équipe ne tenait pas la route. Mais le président avait répliqué û Laissez faire Brio et Martorelli, ils vont construire une grande équipe. Brio était conscient de ce que faisait Martorelli. On sait que dans le monde du foot, entraîneurs et managers sont complices mais quitte à faire plaisir, autant amener alors des joueurs valables. Brio et Martorelli se sont grillés à vie.

Pourtant, en cas de relégation, certains affirmeront que Brio n’avait pas fait moins bien…

Brio a trucidé, laminé le club. Dire que le club se serait sauvé avec lui relève de l’utopie. On aurait été descendant au mois de mars.

Puis est arrivé Daerden qui t’a mis un peu à toutes les sauces ?

Au premier tour, je n’ai raté qu’un ou deux matches. Mais on m’a essayé à toutes les positions (arrière central, back gauche, back droit, milieu défensif). Je sentais le vent tourner et je savais que l’on ne m’alignerait plus au second tour. Cela a été confirmé au mercato quand le club a transféré tous ces défenseurs. Mais malgré tout, Daerden m’a toujours dit que je me conduisais comme un vrai pro.

Qu’a-t-il manqué à Daerden ?

Une certaine t autorité dans le groupe. Il mettait le doigt sur certains détails comme le fait de passer par certains couloirs pour sortir du stade ou le fait que les vestiaires devaient être nettoyés avant son arrivée, mais quand il y avait un débordement à l’entraînement, il laissait passer. Et les débriefings d’après match étaient trop rares.

Pourtant, virer un entraîneur qui fait encore des résultats à quatre journées de la fin, ce n’est pas très malin…

Le président a de nouveau pris un risque. Il me fait un peu penser à… moi. Il est très impulsif. Mais il a une pression énorme. Il doit supporter des contrats concernant le stade et les joueurs. Il a injecté beaucoup d’argent et quand on arrive dans la dernière ligne droite, c’est un peu normal de réagir à l’affectif.

 » Mes capacités sont toujours là  »

On ne t’a vu qu’une seule fois sur le terrain au second tour. On te sentait démotivé à tel point que l’on a parlé de toi à Namur à la fin du mercato…

J’ai été suspendu lors du premier match du deuxième tour et il était logique que l’entraîneur ne modifie pas une équipe qui gagnait mais à La Gantoise, j’ai disputé la rencontre et on a gagné. Selon sa logique, je ne devais pas disparaître du onze. Je ne sais pas pourquoi j’ai été écarté. Quant à mes touches au mercato, c’était plus pour voir comment le club allait réagir et s’il comptait encore sur moi. Quand j’ai entendu que les dirigeants disaient que je pouvais partir, j’ai compris…

Tu t’es remis en question à ce moment-là ?

Je me suis juste demandé pourquoi je ne jouais pas. Mais je n’ai jamais douté de mes capacités. D’ailleurs, contre Gand, j’ai disputé une bonne rencontre. Et il faut croire en ses capacités parce que parfois certains pourraient arriver à te faire croire que tu ne sais pas jouer.

Pourquoi avoir répondu positivement à l’appel de Wintacq pour devenir adjoint ?

Je sortais d’une blessure. Pour les quatre derniers matches, il allait nous falloir des guerriers et je savais que je ne serais pas prêt. Je me sentais plus utile dans ce rôle. Passer de l’autre côté de la barrière, j’en ai toujours rêvé. Gérer un groupe au quotidien, c’est magnifique et cela restera pour moi une expérience positive malgré les mauvais résultats.

Mais durant toute la saison, on t’a senti plusieurs fois en rupture avec le club et finalement, tu deviens entraîneur adjointà

Je reste toujours à 100 % derrière le club. A chaque fois que l’on a fait appel à moi, j’ai répondu présent. Moi, j’ai toujours conservé ma ligne de conduite. Ce sont les autres qui ont modifié leur jugement sur moi au gré des événements. Et finalement, ils se sont aperçus que je pouvais encore rendre service. J’ai pris cela comme une revanche. Après toutes les péripéties, se retrouver au sommet de la pyramide, c’est bien.

Comment cela s’est passé avec le groupe les premiers jours de ton changement de statut ?

Le lundi, à l’entraînement, avant que je sois nommé, ils me disaient déjà que je pourrais devenir T2. Certains entendent les rumeurs plus vite que moi. Après, ils ont de suite senti que j’avais passé la barrière. Il n’y a pas eu de copinage. C’est dans mon caractère d’être dur. J’espère maintenant qu’ils savent faire la différence.

La tactique face au GBA fut pas mal critiquée.

Il fallait mettre qui contre le GBA ? Junior n’a pas apporté le plus attendu. Il vient d’Anderlecht, quand même. On avait donc décidé de se passer de ses services au GBA. Philippe Billy et Yannick Vervalle devaient adresser de nombreux centres. Ils ne l’ont pas fait. Ils devaient évoluer à 60 mètres de leur but. Ils sont restés à 30 mètres. Si Aliyu Datti avait montré la même agressivité que face au Club Bruges, on n’en serait pas là. S’il avait travaillé beaucoup plus, il plantait 25 goals sur sa saison.

Pourtant, on a vu une équipe amorphe. Vous restiez sur de bonnes prestations au deuxième tour ?

Il faut relativiser nos victoires. On a battu qui ? Saint-Trond, Beveren, Westerlo et La Louvière dans les conditions que l’on connaît. Seul le match contre Gand doit servir d’exemple. Car sinon, toutes les rencontres à enjeu (contre le Cercle, le GBA, le Brussels, Ostende), on a perdu. Pour moi, c’est un signe de manque de combativité.

Question d’ambiance ?

L’ambiance est normale mais il n’y a pas de groupe. Or, c’est cela qui avait fait notre force lors de notre première saison en D1. Marc Schaessens essaye de s’entraîner tous les jours avec un ligament déchiré et tous les Français sont impeccables. Avec 20 joueurs français, on termine troisième. Dans ce groupe, il y avait au total plus de saules pleureurs que de guerriers. S’il y en a qui ne se bougent pas plus, dans deux ans, ils vont devoir trouver un autre travail.

Stéphane Vande Velde

 » DAERDEN METTAIT LE DOIGT sur certains détails mais pas l’essentiel « 

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire