Chez certains constructeurs, le manque de pièces oblige à suspendre des productions. © belga image

Les délais de livraison des voitures neuves ne sont pas près de raccourcir

Les crises successives depuis la pandémie ont compliqué la livraison de véhicules. Faut-il craindre une situation identique pour les carburants et doit-on s’attendre à des délais encore plus longs selon les motorisations? Rien n’est exclu puisque l’incertitude règne.

Electricité, (bio)diesel, essence et même GPL: depuis des mois, les hausses colossales des prix de l’énergie et des carburants marquent les esprits et les portefeuilles. La question de la disponibilité pourrait, elle aussi, devenir centrale à court terme. On en a eu un aperçu récemment avec la Californie qui, en proie à la canicule, a interdit la recharge des véhicules électriques à certaines heures de la journée afin de soulager le réseau. La crise énergétique que connaît actuellement l’Europe n’exclut pas ce genre de scénario, et des inquiétudes pointent notamment au sujet de la capacité future à produire assez d’énergie pour un parc automobile qui sera obligatoirement électrifié d’ici à 2035. Selon plusieurs études, le réseau belge devrait pouvoir absorber les 1,5 à deux millions de véhicules électriques censés circuler chez nous à l’horizon 2030 – si une nouvelle crise ne vient pas contredire ces prévisions.

On navigue dans des eaux agitées et les constructeurs devront continuer de trouver des plans B ou C pour livrer leurs clients.

D’autres préoccupations concernent le déploiement des bornes de recharge publiques, puisqu’elles se multiplient plus lentement que le nombre de voitures électriques. La situation est très disparate selon les pays, voire les Régions: ainsi en Belgique, où la Flandre compte plus de 15 000 points de recharge publics contre environ 1 000 à Bruxelles et entre 1 500 et 2 000 en Wallonie. Cette dernière a prévu un budget de neuf millions d’euros pour installer d’ici à 2026 environ 5 600 bornes supplémentaires et 12 000 points de recharge rapide. Reste à voir si cet objectif pourra être atteint en si peu de temps…

Les écueils des carburants alternatifs

Le nombre des points de fourniture est aussi une question qui se pose pour des carburants alternatifs comme l’hydrogène (par ailleurs contraignant à produire), le CNG et, dans une moindre mesure, le LPG. Le pétrole et ses dérivés, par contre, ne sont pas touchés par cette problématique ni même par celle de l’approvisionnement – et ce, malgré le conflit en Ukraine. «Jusqu’en 2021, la Russie était encore le premier pays fournisseur de pétrole en Belgique avec une part de 30%, précise Jean-Benoît Schrans, responsable communication chez Energia, la fédération sectorielle belge des entreprises proposant des solutions énergétiques pour la mobilité et le chauffage. Mais comme il existe une grande diversité d’exportateurs, on a pu se rabattre vers d’autres pays et régions du monde et la guerre en Ukraine n’a pas engendré de problème d’offre. De plus, la Belgique dispose de deux raffineries et le pétrole est importé par bateaux, ce qui permet plus de flexibilité par rapport au gaz et ses gazoducs, par exemple.»

Si l’essence et le diesel restent facilement accessibles, leurs dérivés les moins polluants peinent à se développer à grande échelle. Le diesel XTL, aussi appelé HVO, est seulement disponible dans une poignée de stations belges et son prix au litre reste prohibitif: 3,64 euros/litre à la mi-septembre. Comme le précise Jean-Benoît Schrans, ce tarif est dû au fait que «la production reste coûteuse, car elle n’a pas encore atteint l’échelle des grands volumes. Par ailleurs, le taux d’accises du XTL est égal à celui du diesel traditionnel. Si l’on supprimait ces accises, on pourrait rendre ce carburant concurrentiel et contribuer à verdir le parc automobile existant – en parallèle de l’électrique, bien sûr.»

La démocratisation du diesel XTL pourrait ainsi dépendre des mesures politiques, exactement comme celle des carburants synthétiques (e-fuels). «Leur développement à grande échelle ne devrait se faire que d’ici à une dizaine d’années, poursuit le responsable communication d’Energia. Si le cadre légal invitait à s’engager dans cette voie, ces carburants synthétiques seraient en capacité de répondre à 40% des besoins du transport routier.»

Pénurie de pièces

Finalement, la disponibilité est une question qui affecte aujourd’hui moins les carburants que les véhicules. En ce moment, il faut compter entre trois mois et un an et demi pour obtenir une voiture neuve, quel que soit le type de motorisation. «En raison de la pandémie, de la pénurie de microprocesseurs et de la guerre en Ukraine, toute la chaîne de production et de transport du secteur automobile souffre à différents niveaux, confirme Jean-Marc Ponteville, responsable presse chez D’Ieteren Automotive. Les pièces présentes dans les véhicules proviennent, en outre, de pays touchés différemment par ces trois crises, elles sont acheminées de diverses façons et il suffit qu’un composant coince pour que le véhicule ne soit pas produit ou soit mis en attente.»

Dans certains cas, la disponibilité d’un modèle d’une même marque peut ainsi varier fortement en fonction d’une simple option. Les pénuries de pièces poussent même les constructeurs à suspendre des productions, comme Renault/Dacia l’a fait avec ses véhicules LPG il y a quelques mois. Chez d’Ieteren Automotive, on constate des délais parfois un peu plus longs pour les voitures électriques, tout simplement «parce que la demande est énorme – surtout de la part des entreprises – et dépasse actuellement l’offre, pointe Jean-Marc Ponteville. Le marché est en pleine transition et les capacités de production des véhicules électriques se développent petit à petit.»

Même si les effets de la pandémie et de la pénurie des semi-conducteurs s’estompent progressivement, la disponibilité des véhicules devrait rester imprévisible encore un moment. «Aux crises précédentes, il faut désormais ajouter les perturbations liées aux prix de l’énergie, argumente Jean-Marc Ponteville. On ne sait pas à quoi s’attendre. On navigue dans des eaux agitées et les constructeurs devront continuer de trouver des plans B ou C pour livrer leurs clients.»

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