C'est le ministre de la Mobilité Georges Gilkinet (Ecolo) qui a instauré le budget mobilité

Gilkinet veut interdire les vols de nuit à Zaventem: une « absurdité économique »

Le ministre fédéral de la Mobilité Georges Gilkinet (Ecolo) a présenté en intercabinets un projet d’arrêté ministériel visant à réduire les nuisances sonores que subissent les riverains de l’aéroport de Bruxelles-National.

La mesure phare de ce projet est la suppression totale des vols de nuit, soit entre 23h00 et 06h00 du matin.

Comme annoncé par le ministre à la Chambre, l’arrêté sera déposé d’ici le 21 juillet. Il vise à actualiser le système dit des « quota counts » (QC), soit le niveau de bruit maximum autorisé pour chaque avion à l’atterrissage ou au décollage. Ces normes n’avaient plus été révisées depuis 2009. Cette révision vise une réduction totale du niveau de bruit de 20% qui se ventilera de la manière suivante: 100% de silence en plus durant la nuit (23h00-06h00), 30% de silence en plus en soirée (21h00-23h00) ; 20% de silence en plus en matinée (06h00-07h00) et 7% de silence en plus en journée (07h00-21h00).

Les nouveaux QC diffèreront également selon que l’on soit en semaine ou en week-end/jour férié. Au cours de ceux-ci le niveau de bruit toléré sera plus bas, y compris en journée.

Les valeurs autorisées seront réduites à zéro la nuit

Le projet d’arrêté ministériel introduit en outre des valeurs individuelles pour chaque avion, et des valeurs annuelles maximales. La nuit, les valeurs autorisées seront donc réduites à zéro, tant pour les décollages que pour les atterrissages. Quelques exceptions sont prévues comme les transports gouvernementaux ou les missions militaires, de police ou de secours ainsi qu’en cas de catastrophes ou pour des raisons météorologiques. En journée, tous les avions de nouvelles génération pourront voler ainsi que presque toutes les générations d’avions moyen-courriers. L’intention du ministre est d’aboutir à une entrée en vigueur à l’hiver 2024-2025.

Le projet d’arrêté a déjà été présenté au gestionnaire de l’aéroport de Bruxelles-National et aux compagnies aériennes (BATA). Brussels Airport Company (BAC) serait responsable de la gestion des quotas annuels et la DGTA (Direction Générale du Transport Aérien) de dresser les procès-verbaux.

Open Vld, CD&V et N-VA rejettent une interdiction totale des vols de nuit

L’Open Vld a rejeté le projet du ministre de la Mobilité Georges Gilkinet d’interdire les vols de nuit à l’aéroport de Bruxelles (Zaventem), la qualifiant d' »absurdité économique ». C’est par la voix du député Tim Vandeput, bourgmestre de Hoeilaart (périphérie flamande de Bruxelles) et responsable du dossier pour le groupe parlementaire, que le parti du Premier ministre Alexander De Croo a réagi à la publication dans les médias du plan du ministre vice-Premier ministre Ecolo.

« La Belgique est un pays de commerce international. L’an dernier, les exportations en Flandre ont représenté 380 milliards d’euros, et l’aéroport de Zaventem y joue un rôle crucial« , a souligné l’élu libéral flamand, qui insiste sur l’impact sur l’emploi. Il estime à 2.500 le nombre de pertes d’emplois en cas d’interdiction complète des vols de nuit en Belgique. Tim Vandeput plaide pour des solutions de rechange que, dit-il, les opérateurs sont disposés à envisager. Il appelle le ministre Gilkinet à remettre l’ouvrage sur le métier pour amener des propositions « constructives ».

Un autre parti flamand de la coalition, le CD&V, a aussi décrié la proposition de l’écologiste Georges Gilkinet. Le président du CD&V, Sammy Mahdi, fustige « un non-sens écologique et de la décroissance pure et simple ». La fin des vols de nuit dans l’aéroport de la capitale « serait la fin de Zaventem comme le plus grand hub logistique d’Europe pour les produits médicaux et pharmaceutiques« , a encore critiqué Mahdi sur Twitter. « 25.000 emplois dans la région ne sont pas suffisants pour les écologistes, semble-t-il », ajoute le président de la formation. La N-VA, dans l’opposition au niveau fédéral, mais membre de la coalition au pouvoir en Flandre, a aussi rejeté en bloc la proposition d’interdire les vols de nuit.

« Une mesure essentielle » pour Alain Maron

Le projet du ministre fédéral de la Mobilité Georges Gilkinet d’interdire les vols de nuit à l’aéroport de Zaventem est une mesure « essentielle pour la santé des riveraines et riverains, réclamée depuis longtemps par la Région bruxelloise« , a réagi, de son côté, samedi matin le ministre bruxellois de l’Environnement Alain Maron (Ecolo) par le biais de son porte-parole.

« Je soutiens totalement Georges Gilkinet pour avancer dans cette mesure », a-t-il ajouté à l’adresse de son collègue écologiste. De son côté, l’exploitant Brussels Airport a regretté une mesure « extrême » lancée « sans coordination avec l’aéroport ».

Le bourgmestre de Steenokkerzeel « très surpris »

Le bourgmestre de Steenokkerzeel Kurt Ryon s’est dit samedi « très surpris » de la proposition du ministre fédéral de la Mobilité Georges Gilkinet (Ecolo) d’interdire les vols de nuit à l’aéroport de Zaventem entre 23h et 6h du matin.

« Nous avons récemment eu les états généraux de l’aéroport, au sujet des trajectoires de vol à destination et en provenance de l’aéroport. Nous avons siégé avec le ministre pendant 40 heures, et à aucun moment cette proposition n’a été discutée. Je pense donc qu’elle ne bénéficiera d’aucun soutien« , a estimé l’élu local, qui craint également des conséquences sur l’emploi dans la région.

« En tant que commune, nous essayons de cohabiter le mieux possible avec l’aéroport, et nous y parvenons plutôt bien », a-t-il commenté. Le bourgmestre est d’avis qu’il faut trouver une solution aux nuisances sonores causées par l’aéroport, mais cette proposition « sort de nulle part« , juge-t-il.

« Une proposition courageuse qui lance enfin la discussion », selon le bourgmestre de Wemmel

Le bourgmestre de Wemmel Walter Vansteenkiste a soutenu samedi la proposition du ministre fédéral de la Mobilité Georges Gilkinet (Ecolo) d’interdire les vols de nuit à l’aéroport de Zaventem de 23h à 6h. « C’est une idée courageuse qui lance enfin la discussion sur les nuisances sonores de l’aéroport », a-t-il dit.

« Je constate que de nombreuses personnes sont déjà sur les dents pour rejeter cette proposition », a déclaré le bourgmestre Vansteenkiste. « Et c’est justement le problème de ce dossier, il est bien trop politisé. Je comprends parfaitement l’importance économique de l’aéroport. Ce que je ne comprends pas, c’est l’entêtement à s’en tenir à des modèles économiques qui sont dépassés. Ces modèles ont été conçus il y a des années par l’aviation, mais peut-être y a-t-il quelque chose qui ne colle pas. »

Pour Walter Vansteenkiste l’exploitant de l’aéroport s’est concentré de plus en plus sur les vols de nuit, avec l’idée qu’on n’y toucherait pas. Il relève les exemples des aéroports de Schiphol, Francfort ou Paris, qui se passent pourtant des vols de nuit.  « Actuellement, certaines communes sont survolées trente fois pendant la nuit, ce qui affecte directement plus de cent mille personnes », a ajouté le bourgmestre. « De manière indirecte, au moins cent mille autres personnes, et probablement beaucoup plus, sont touchées. Les économistes de la santé ont calculé que le coût de cette situation s’élève à plus d’un milliard. Cela aussi doit être mis dans la balance ».

De son côté, l’exploitant Brussels Airport a regretté une mesure « extrême » lancée « sans coordination avec l’aéroport ».

Le soutien des riverains

Des riverains et une association environnementale flamande ont apporté leur soutien au projet. Dans un communiqué, le Bond Beter Leefmilieu a rappelé qu’une étude réalisée en début d’année à sa demande avait montré à quel point ces vols de nuit étaient nocifs pour les riverains. Plus de 100.000 habitants dans cette région souffrent de graves troubles du sommeil dus aux nuisances sonores des vols de nuit. « Leur interdiction est donc un choix logique et absolument nécessaire pour protéger la santé des riverains », selon le cardiologue Marc Goethals, cité dans le communiqué.  L’association ajoute que d’autres aéroports européens où les vols de nuit sont considérablement réduits sont toujours opérationnels et économiquement viables.

« De meilleurs résultats à l’école et au travail »

Jasper Wouters, du Bond Beter Leefmilieu, ne s’attend pas dès lors à un effet négatif pour la Belgique. Selon lui, l’interdiction des vols de nuit aurait essentiellement des répercussions sur le modèle commercial « just in time » de DHL.  « Si DHL ne peut plus effectuer de vols de nuit, cela ne se traduira pas nécessairement par un modèle commercial moins attrayant. L’heure de livraison des colis sera tout simplement décalée dans la journée. En contrepartie, les centaines de milliers de riverains retrouveront leur sommeil, ce qui se traduira par de meilleurs résultats à l’école et au travail, et par une économie globale d’un milliard d’euros en termes de coûts de santé ».

Des milliers d’emplois en jeu, plaide le syndicat chrétien

L’ACV-Transcom, branche du syndicat chrétien, fustige samedi la proposition de supprimer les vols de nuit à l’aéroport de Zaventem, émise par le ministre fédéral de la Mobilité Georges Gilkinet. Plusieurs milliers d’emplois sont en jeu, avance le syndicat.

« Non seulement DHL Aviation, mais aussi beaucoup de personnel et d’activités économiques des secteurs adjacents, tels que la manutention, les compagnies aériennes, la logistique et l’aéroport lui-même, subiront d’énormes dommages », souligne l’ACV-Transcom.  Le syndicat déclare qu’il ne permettra pas que « des campagnes politiques soient lancées sur le dos de milliers de travailleurs ». « Gilkinet ferait mieux de travailler sur un cadre juridique solide pour Brussels Airport, sur une politique coordonnée au niveau national pour nos aéroports et nos secteurs de l’aviation. Il y a certainement moins de votes à gagner avec cela ».

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