L’art de l’insulte
En cette journée du compliment, on s’est demandé pourquoi c’est plutôt l’insulte qui claque à la moindre contrariété. Quelle est donc l’obscure raison qui nourrit notre amour immodéré pour les gros mots ? Avec, en bonus, un passage en revue des insultes d’ici et d’ailleurs.
Avant de parcourir le monde à la recherche d’inspiration dans le domaine des grossièretés, il serait bon de se pencher sur le pourquoi. Qu’est-ce qui nous pousse à nous insulter les uns et les autres ? Si l’on en croit Philosophie Magazine, il y aurait quatre raisons à cela et autant de penseurs pour étayer ces thèses.
La première explication serait à trouver du côté du plaisir qu’on en retire si l’on en croit les écrits d’Aristote. Ou plutôt du plaisir libérateur qui en découle. En effet, en outrageant l’autre, on apaise une tension intérieure due à la colère. Pour ce penseur grec, l’insulte aurait même tout du nectar verbal. Un nectar qui gagnerait en puissance salvatrice si l’insulte est cinglante.
Pour Sénèque, il s’agit surtout d’un manque de discernement, puisque, selon le philosophe romain, l’insulte, ou l’incontinence verbale, fleurit surtout suite à une erreur d’appréciation. Faire fi des insultes serait, pour cet adepte du stoïcisme, l’ultime vengeance devant une bordée de jurons. Ou pour paraphraser la sagesse populaire : « la bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe. »
Pour Arthur Schopenhauer, qui vécut au 19e siècle, l’insulte est au contraire le dernier recours pour sauver ce qui nous reste d’honneur. Dans cette optique, elle est même rudement efficace. Mais, précise-t-il encore, pour faire mouche, l’art de l’insulte doit viser juste. C’est-à-dire taper là où cela fait mal. Et pour y parvenir, il n’y aurait rien de tel que la pratique.
Plus récemment, William B. Irvine a expliqué dans un livre paru en 2013 et consacré à la philosophie de l’insulte, que ce genre d’interaction avec autrui permettait de garder sa place à l’intérieur du groupe que constitue notre société. Mais aussi dans le trafic. Ceci expliquant cela.
L’insulte, ce produit local
Le site Vice a publié un article reprenant les manières d’insulter des inconnus dans différentes langues européennes. En effet, on n’insulte pas partout de la même manière.
On y apprend par exemple que l’Italie est friande d’insultes. Comme le stipule encore le site, « en Italie, il est tout à fait possible de converser avec une personne de manière sensée en utilisant uniquement des insultes ». Mais pour être complètement raccord, il est tout de même de bon ton de privilégier les attaques familiales, envers Dieu ou la Vierge Marie, voire les morts. Et surtout de veiller à étoffer un maximum le tout. Bref ne pas avoir peur de l’insulte à rallonge.
On notera au passage que le « nique ta mère », et tout ce qui a attrait au vagin, a particulièrement la côte en Serbie. En Roumanie la plupart des insultes sont axées autour du triptyque « sexe oral, les mères et Jésus », avec une mention spéciale pour « muie », qui veut dire « suce mon pénis « .
Aux Pays-Bas, on laisse les mères et leur sexe relativement tranquilles pour mieux se concentrer sur les maladies comme « klere (le choléra), pest ou encore tering (la tuberculose) ». Des termes que l’on peut adapter à toutes les situations.
Enfin, contrairement au Danemark, où on suggère d’aller se faire manger par Satan, on ne serait pas très créatif en Allemagne. Tout au plus l’article se contente de préciser que les insultes sont plus de l’ordre fécal que sexuel. C’est un peu le même principe en Espagne où « si vous voulez vraiment insulter quelqu’un en espagnol, il faut que vous déféquiez dans une partie de son corps, ou celle d’une figure sainte. »
Pour parfaire vos connaissances sur le sujet, voici une vidéo qui revient, en version originale, sur les différentes insultes dans le monde.
Mais aussi la suivante qui vous permettra de subtilement remettre au goût du jour des insultes désuètes :
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