Wilmington, le 13 septembre 2018 © AFP

Que doit-on craindre de l’ouragan Florence?

Le Vif

L’ouragan Florence, annonciateur de précipitations massives et d’inondations sur le Sud-Est américain, pourrait être d’autant plus « méchant » que, phénomène inhabituel, il devrait descendre le long de la côte, souligne Emmanuel Bocrie, prévisionniste à Météo-France.

Florence a été rétrogradé en catégorie 2 (sur l’échelle de Saffir-Simpson, qui en compte 5). Quels sont encore les risques ?

Les « catégories » correspondent à la vitesse du vent. Or un ouragan c’est un monstre de plusieurs jours, aussi épais que l’atmosphère, qui, poussé vers l’ouest par la rotation de la Terre et nourri par la température de la mer, produit bien d’autres dégâts, notamment des marées de tempête et des vagues. La surface de la mer est comme aspirée, avec des surélévations. Et puis il y a les précipitations, et c’est ce qui va être le gros problème dans le cas de Florence. On s’attend à des vagues de 3 à 6 mètres, et puis on va avoir, sur l’épisode, des précipitations de l’ordre de 500 à 700 mm d’eau, localement 1.000 mm. En comparaison, il tombe en France 700 mm d’eau en moyenne en un an ! On attend 500 à 1.000 mm à Jacksonville, où la moyenne mensuelle habituelle est de 180-200 mm !

Un événement de moindre catégorie peut donc être « méchant » et faire de gros dégâts.

Et puis Florence, qui va arriver sur la côte américaine très certainement demain (vendredi) soir, au niveau des Caroline, devrait ensuite descendre le long de la côte, ce que nous montrent tous nos modèles, et rester sur la limite terre-mer pendant deux ou trois jours, être quasiment stationnaire. Harvey au Texas (en 2017) avait été extrêmement méchant parce que stationnaire.

C’est la structure de l’atmosphère qui fait ça : vous avez un cyclone plus erratique, sans flux bien ordonné, ce qui est assez inhabituel et va poser de gros problèmes, notamment de prévision. Comme il sera à la limite terre-mer, il n’est pas évident de prévoir exactement son comportement, combien de temps il va se déplacer, s’il rentre sur les terres un peu plus vite que prévu… »

2017 avait été une année à ouragans sur l’Atlantique nord. Comment se présente cette saison ?

Concernant Isaac, sur les Antilles, l’oeil devrait passer entre le nord de la Dominique et la Guadeloupe, qui prendra le plus de vent. Saint-Martin est en vigilance orange, Guadeloupe et Martinique en rouge. Mais ce n’est pas un gros cyclone, il faiblit progressivement et devrait passer en tempête tropicale. Ce n’est pas anodin, mais rien à voir avec Irma l’an dernier.

Cette année, la NOAA (américain) et le Met Office (britannique) prévoient 10 à 16 phénomènes nommés (catégories 1 à 5), dont 5 à 9 ouragans (catégorie 3 et plus), et Météo-France 12 événements nommés et 6 à 7 ouragans. Donc une saison (juin-novembre) assez « classique », normale. Entre autres parce que les températures de l’eau de mer sont habituelles. En revanche l’an dernier, elles étaient de 2 à 3°C au-dessus des normales.

Mais attention ! Cela ne veut pas dire qu’il ne peut pas y avoir de grosse catastrophe: il suffit d’un seul cyclone ! »

Quel sera l’impact prévisible du réchauffement global sur ces phénomènes ?

Avec le changement climatique, on aura a priori un petit peu moins de cyclones. Mais les plus forts le seront encore plus, ils seront plus violents et destructeurs, et on s’attend à un peu plus de précipitations. Parce que la température de l’eau va augmenter, mais surtout parce qu’avec une atmosphère plus chaude, l’ouragan contiendra plus d’humidité et restituera beaucoup plus de pluie. »

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