Gérald Papy

Le traumatisme israélien et l’abîme palestinien (édito)

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Jamais Israël, confronté pourtant à plusieurs guerres, n’avait connu un tel déchaînement de violences meurtrières.

L’attaque menée le 7 octobre par le Hamas autour de la bande de Gaza avait toutes
les caractéristiques d’une « chasse aux Juifs » pour en assassiner un maximum et pour en enlever des dizaines d’autres, et les exposer eux aussi à la mort.

Dans une société israélienne marquée par la mémoire de l’Holocauste, les massacres du groupe islamiste palestinien ne peuvent pas ne pas raviver le spectre cauchemardesque de l’extermination. Le parallèle dressé par le chercheur Stéphane Wahnich avec la Shoah par balles perpétrée au début de la Seconde Guerre mondiale en Ukraine par les nazis avant l’installation des camps d’extermination n’est donc pas, toutes proportions gardées quant au nombre de morts, excessive.

Le comportement du Hamas se rapproche de celui de l’Etat islamique

Pour cela, le traumatisme dépasse les frontières de l’Etat hébreu. Les dirigeants du Hamas à Gaza ont donc conçu cette opération dont ils pouvaient anticiper l’impact traumatique pour Israël et le retentissement tragique pour le monde. A cette aune, leur comportement ressort du mantra nihiliste des zélotes de l’Etat islamique et pas de la stratégie étudiée des combattants historiques de la cause palestinienne. Ainsi se sont-ils exclus du champ de la négociation sur l’avenir de l’Autorité palestinienne.

Négociation, quelle négociation ? rétorqueront à juste titre les Palestiniens. L’arrêt de tout dialogue de paix, l’absence de perspective de création d’un Etat viable, l’arbitraire des gouvernements israéliens successifs jusqu’à la dimension discriminatoire supplémentaire portée par l’équipe actuelle à forte composante d’extrême droite ont, il est vrai, créé les conditions d’une situation qui devait inéluctablement aboutir à une irruption violente.

Pour autant, celle-ci pouvait prendre une forme différente que celle que lui a donnée le Hamas. La proximité renforcée du mouvement islamiste palestinien avec le Hezbollah et avec l’Iran ajoute à l’inquiétude sur le futur du combat palestinien. Car, du fait de l’impuissance de l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, une alternative est-elle seulement possible pour les Palestiniens ?

La future introspection d’Israël

En Israël, une fois la réplique aux massacres du Hamas parachevée, viendra le temps des questions sur l’action du gouvernement et des services de sécurité, dont la déflagration du 7 octobre a révélé les failles béantes. Il faut espérer que cette introspection, généralement assumée en Israël, inclue l’analyse de la politique des gouvernements depuis la signature des Accords de paix de 1993. Entraver leur application, délégitimer l’Autorité palestinienne (au besoin en misant sur le Hamas), jouer la carte du pourrissement, accroître la colonisation et, in fine, acter l’impossibilité de la cohabitation avec un Etat palestinien n’a pas apporté la sécurité, légitimement revendiquée, aux Israéliens. Malgré ou à cause de la souffrance endurée, ne viendra-t-il pas le moment de penser à essayer une autre voie que celle incarnée depuis si longtemps par Benjamin Netanyahou ? Mais avec quel « partenaire » ?

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